«Au cours des dernières années, les commerces ont fait des efforts pour rendre leurs installations plus accessibles aux personnes à mobilité réduite. En 2022, il est plus que temps d'élargir le concept d'accessibilité pour y inclure les personnes qui ont un handicap communicationnel», soutient Annie Légaré, orthophoniste et chargée d'enseignement en médecine à l'Université Laval.
Voilà l'idée qui sous-tend le projet Accessibilité communicationnelle des commerces pour une équité des services (ACCES), mis sur pied par Annie Légaré, Laura Monetta et Monica Lavoie, de la Faculté de médecine de l'Université Laval, dans le cadre de leur engagement bénévole au sein de CommunicActifs. Sarah Bérubé-Lalancette s'est jointe à l'équipe à titre de coordonnatrice du projet. Les quatre orthophonistes sont appuyées par Joëlle Duchesne, directrice d'ARTÈRE, un organisme qui offre des services aux personnes qui ont subi un accident vasculaire cérébral.
ACCES s'adresse aux commerçants qui souhaitent offrir des services plus accessibles aux personnes ayant des difficultés de communication, entre autres l'aphasie. Rappelons que ce trouble du langage affecte la capacité à comprendre, à s'exprimer, à lire ou à écrire. C'est une séquelle courante de l'accident vasculaire cérébral. Au Québec, 6000 nouveaux cas d'aphasie sont diagnostiqués chaque année.
«L'accessibilité communicationnelle est un enjeu important pour la participation sociale et l'inclusion des personnes aphasiques, souligne Joëlle Duchesne. Les commerces leur sont généralement peu accessibles, en raison de la rapidité des échanges et du manque de sensibilisation de leurs interlocuteurs.»
Le programme ACCES comporte deux volets. Le premier est une formation en ligne, d'une durée d'environ 30 minutes, destinée au personnel chargé du service à la clientèle. «On y présente ce qu'est l'aphasie, quels sont les obstacles à la communication avec les personnes aphasiques et quelles stratégies mettre de l'avant pour surmonter ces obstacles», explique Annie Légaré.
Le deuxième volet suggère des façons d'adapter les installations et les services afin de faciliter la communication avec les personnes aphasiques. «Il s'agit de trucs simples, peu coûteux et rapides à mettre en place, précise-t-elle. Par exemple, placer des menus près de l'entrée pour que les personnes aphasiques aient le temps de les consulter avant de commander, ou écrire sur des affichettes le nom des produits qui sont dans les présentoirs.» Ces améliorations peuvent faciliter les communications avec bien d'autres clients, notamment les personnes dont l'audition faiblit ou les allophones, précise-t-elle.
Les commerçants qui auront implanté la grande majorité des mesures applicables et dont 80% du personnel aura suivi la formation recevront le sceau ACCES. Ils pourront l'afficher dans leur vitrine, comme gage d'accueil et de convivialité pour les personnes aphasiques.
Le lancement du programme ACCES a eu lieu le 1er mai, premier jour du mois de l'ouïe et de la communication. «Chez Boulay – comptoir boréal a accepté d'être notre ambassadeur, souligne Annie Légaré. Il s'agit du premier commerce à avoir obtenu le sceau ACCES au Québec.» Chez Boulay lancera une chaîne de défis à d'autres commerçants pour qu'ils obtiennent eux aussi le sceau ACCES.
Présentement, ACCES est offert aux commerces de restauration avec comptoir de service. Il n'y a aucun frais. La marche à suivre pour obtenir le sceau ACCES est expliquée en détail sur le site Web du projet.
«Dans un deuxième temps, nous pensons adapter le programme afin de l'ouvrir à d'autres types de commerces, par exemple les pharmacies et les banques, précise Annie Légaré. De la même façon que les commerces offrent des rampes d'accès aux personnes à mobilité réduite, nous avons le devoir d'offrir une rampe d'accès communicationnelle aux milliers de personnes aphasiques du Québec.»