«Je dis souvent aux jeunes: “Si au moins je vous ai appris à hacher correctement de l’échalote cette semaine, alors moi, j’aurai accompli énormément de choses.” Ça peut paraître banal, mais il y a un paquet d’adultes qui sont incapables de faire ça.»
Le réputé chef international Jean Soulard, qui a dirigé les cuisines du célèbre Château Frontenac pendant 20 ans et enseigné à des milliers d’adultes, met son tablier depuis 7 ans, chaque été, pour enseigner sa passion aux jeunes dans le cadre du camp de jour Aliment’Terre de l'Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels (INAF).
«Chez plus jeunes, les 10-12 ans, on leur fait notamment découvrir les aliments et leur parcours du jardin à l'assiette. Avec le Jardin universitaire Roger-Van den Hende, qui est tout juste à côté, on leur explique comment semer une graine, comment elle pousse, puis on va cueillir après ce qui est poussé. Évidemment… tout ça se fait en accéléré (rires). Bref, les rudiments de base de nutrition et de cuisine: que dans la fabrication du pain, il y a de la farine, que dans le yogourt, ça prend une bactérie, etc. Puis, en cuisine, on leur explique quelques techniques de base: comment tenir un couteau, un fouet ou encore comment faire de la vinaigrette, mais on fait évidemment quelques recettes! Du côté du groupe des Jeunes Foodies, les 13-15 ans, l’apprentissage ne se fait pratiquement qu’en cuisine. On enseigne des techniques, on développe les goûts et on crée des recettes. Car, avec eux, je vise à expliquer que la cuisine, ce n’est pas seulement des recettes, mais quelque chose qu’on ressent et qu’il faut développer.»
Le succès du camp de jour Aliment'Terre, qui vise à enseigner les rudiments de la cuisine et de la nutrition aux jeunes, ne se dément pas. Offert une seule semaine l’année de sa création, le camp se déroule maintenant pendant 6 semaines, soit durant tout l’été. Et avis aux futurs intéressés: les places s’envolent plutôt très vite chaque année!
D’ailleurs, le groupe des Jeunes Foodies est largement composé chaque année d'ados qui ont non seulement la piqûre pour les fourneaux, mais aussi, qui reviennent au camp pour une deuxième ou troisième année consécutive. Désosser un poulet ou préparer un filet de poisson sont autant d’exemples de techniques qu’ils apprennent.
«J’ai toujours été bien dans une cuisine. À un tel point que lorsque je suis dans une cuisine et que je ne cuisine pas, je trouve ça vraiment bizarre (rires). Ce que j’aime bien de la cuisine, c’est que c’est en partie de l’art et de la technique.» – Alexis Busque, 12 ans
«C’était ma troisième année à ce camp. J’ai fait les deux premières années et cette année, c’était ma première année au camp des Jeunes Foodies. Cuisiner, ça me passionne. Avec le temps, je réalise que c’est vraiment intéressant de voir le processus de A à Z et surtout de pouvoir goûter à ce que je fais à la fin, puis être fière de moi, de savoir que c’est moi qui l’ai cuisiné!» – Rosalie-Maude Beaulieu, 14 ans
«J’ai beaucoup aimé désosser un poulet, car on apprenait aussi les différentes parties qui le composent, comme les cuisses, les escalopes et les pilons. De plus, monsieur Soulard est quelqu’un de très gentil, de très authentique, qui aimait beaucoup nous aider. Même si on avait de la difficulté ou si on faisait moins bien quelque chose, il nous proposait toujours une solution pour qu’on puisse mieux réussir.» – Laurie Rousseau, 15 ans
«J’ai eu un peu de difficulté à arranger le poisson, j’ai laissé quelques arêtes. Mais bon, c’était ma première fois et ça s’est, somme toute, bien passé! À la fin du camp, on quitte pour notre chalet et je devrais donc être capable d’arranger mes truites (rires).» – Émile Joly, 15 ans
Mais au-delà des techniques, le chef Soulard souhaite que les jeunes apprennent une chose qu’il estime la plus importante: créer.
«Je leur répète souvent: “Vous allez apprendre comment utiliser les ingrédients et pourquoi on fait ceci comme ça. Le pourquoi est important, pas les recettes. Tout le monde peut suivre une recette, même celui qui ne sait pas cuisiner! Vous devez aller beaucoup plus loin que les recettes en intégrant votre âme, votre personnalité et là, ça goûtera bon!”», dit-il, souriant et d’un ton très convaincu.
Résultat? Le grand chef se dit impressionné par les jeunes chaque année. «Pendant la semaine, on leur met un panier qui peut contenir 35 ingrédients devant eux puis on leur dit: “Soyez créatifs et faites-nous quelque chose avec ça!” Et chaque fois, je suis stupéfait, je me dis : “Ils sont capables de faire ça?” C’est incroyable tout ce dont ils sont capables de faire, finalement.»
Animatrices et étudiantes en nutrition
Mais le camp Aliment’Terre, c’est aussi les animatrices Couscous, Avoine, Kamut et Sorgo, de leurs surnoms de camp, qui veillent à encadrer chaque groupe de jeunes, à les aider et à répondre à leurs questions. En fait, elles sont, respectivement, Stacy, Laurie, Camille et Aurélie, toutes étudiantes au baccalauréat en nutrition à l'Université Laval.
«Les jeunes avaient l’air très intéressés et j’étais même parfois impressionnée par leurs connaissances et leurs questions, raconte Stacy, dite Couscous. Tout le monde semblait avoir du plaisir et être captivé par ce que Jean disait. Quant à moi, j’estime apprendre tout autant. On apprend à travailler avec les jeunes, à communiquer et en même temps, on apprend des techniques et d’autres notions sur la nutrition. C’est vraiment enrichissant!»
Leur collègue d’études, Justine Morand, qui est la coordonnatrice du camp, va dans le même sens. «Même s’il s’agit pour moi de ma septième année dans un camp de jour, cette expérience, comme coordonnatrice, s’avère un très beau défi pour moi. Il faut tout penser : s’assurer de répondre aux questions, aider les monitrices, etc. Bref, s’assurer que tout fonctionne et que tant les enfants que les parents sont satisfaits.»
Tout compte fait, ce sont encore des jeunes heureux, valorisés et satisfaits qui auront participé au camp Aliment’Terre cette année!