
— Jean Rodier
Galvanisés par un tel discours et impatients de partir à la conquête de leurs rêves, les diplômés sont aussi, pour la plupart, un peu tristes de clore un chapitre de leur vie. «La symbolique de la collation des grades est très forte. Pour les gens qui, comme moi, s'en vont vers le marché du travail, c'est une page qui est tournée», affirme Annabelle Lemire, diplômée du baccalauréat en sciences et technologie des aliments. Très impliquée dans les associations étudiantes tout au long de son baccalauréat, la jeune femme a été membre de la BoULangerie du Comtois et du comité Le Carnivore, avant de devenir présidente de l'Association générale des étudiants en agriculture, alimentation et consommation, puis vice-présidente aux affaires institutionnelles de la CADEUL. C'est notamment pour honorer cet engagement étudiant qu'elle a été désignée pour porter la masse lors de la cérémonie du samedi 9 juin en après-midi. «C'est une très belle reconnaissance, avoue Annabelle Lemire. Toutefois, je ne réalisais pas l'ampleur du rôle jusqu'au moment où j'ai vu les 3 000 personnes présentes se lever pour l'entrée du défilé universitaire.» Avec ce privilège vient aussi celui de prononcer, au nom de tous les étudiants présents à la même cérémonie, un discours protocolaire, auquel la diplômée a tenu à ajouter une touche plus personnelle. «En guise de mot de la fin, a-t-elle déclaré, je souhaite féliciter particulièrement les étudiantes et étudiants ayant vécu des épreuves moins communes. Que vous veniez d'un milieu moins privilégié, que vous soyez parent-étudiant, que vous ayez fait face à de l'intolérance, que vous ayez été ou que vous soyez atteint d'un trouble mental ou physique, peu importe la façon par laquelle votre réussite a été mise en péril, vous avez déjoué les statistiques, vous avez été résilientes et résilients. Et aujourd'hui, nous sommes ensemble pour souligner votre succès!»
Le lendemain 10 juin, c'était au tour de deux finissants du doctorat en sciences du bois de recevoir leur précieux diplôme. Le premier, Naamwin-So-Bâwfu Romaric Meda, est originaire du Burkina Faso, alors que le second, Thibaud Geoffroy, vient de la France. Tous deux ont travaillé à la valorisation de produits de l'érable à sucre et de l'érable rouge autres que le sirop. Le premier a fait une thèse sur les propriétés du bourgeon qui peuvent avoir un intérêt, entre autres, pour la santé humaine et la production pharmaceutique; le deuxième a fait de même avec l'écorce. Comme eux, ce sont 10,7% des diplômés en 2017-2018 qui sont des étudiants étrangers ou des résidents permanents. Pour eux, la cérémonie se révèle parfois d'autant plus émouvante qu'elle constitue une scène d'adieu au Québec. «J'avais vraiment envie de vivre une cérémonie de collation des grades dans le style nord-américain, comme on en voit à la télévision, remarque Romaric Meda. Je suis ouvert à toutes les possibilités, mais j'envisage présentement un retour en Afrique. Le Québec va me manquer, mais je me considère comme un citoyen du monde.» De son côté, Thibaud Geoffroy était content de partager ce moment avec deux de ses collègues – dont Romaric Meda – sans lesquels, selon ses dires, il n'en serait pas là. «La cérémonie a été pour nous un moyen de célébrer l'aboutissement d'un peu plus de trois ans de dur labeur», déclare-t-il. Les deux nouveaux docteurs étaient particulièrement touchés que leurs familles respectives se soient déplacées d'Afrique et d'Europe pour vivre ce moment avec eux.
Les cérémonies se poursuivront la fin de semaine prochaine, notamment avec les finissants de la Faculté de philosophie. Parmi eux, il y aura Daphnée Savoie, l'une des trois récipiendaires aux cycles supérieurs de la Médaille académique du gouverneur général. Cette distinction qu'elle recevra au cours de la cérémonie du 16 juin en matinée représente pour elle «une façon de célébrer les efforts». Selon l'étudiante-chercheuse, «la collation des grades est un rite de passage qui touche l'imaginaire et qui inspire.» C'est également un moment de joie à partager avec ses proches. «Ma famille m'a vu progresser tout au long de ma maîtrise. Les recherches que l'on effectue à la maîtrise et au doctorat représentent quelque chose de très personnel.» Après s'être intéressée à la question du fétichisme dans son mémoire, la jeune femme entreprendra à l'Université Laval, en cotutelle avec le Collège Birkbeck de l'Université de Londres, des études doctorales sur un tout autre sujet: la responsabilité des banques et de leurs hauts dirigeants dans le déclenchement des crises financières. Elle espère ainsi démontrer, entre autres, que la philosophie est pertinente pour réfléchir au monde actuel.
Si la philosophie s'inscrit profondément dans la tradition universitaire, ce n'est pas le cas de tous les domaines à l'honneur lors de la collation des grades. Le dimanche 17 juin, 46 étudiants, soit une première cohorte complète, recevront leur diplôme de baccalauréat en design de produits. «Nous étions en quelque sorte une cohorte cobaye, indique la finissante Gabrielle Roberge. Il y a une certaine fierté à être les pionniers d'un nouveau programme, surtout que notre cohorte a réussi au-delà des attentes de l'École de design.» Cette étudiante s'est récemment distinguée en remportant le Prix d'excellence du programme en design de produits, décerné par l'École de design à l'étudiant présentant le meilleur parcours universitaire, et le Prix de l'École de design, remis au projet «coup de cœur» des professeurs. Elle a mérité cette dernière distinction pour le projet «Jardin», une gamme de produits de ritualisation funéraire à tendance écologique. Lorsqu'elle réfléchit à ce que représente pour elle la collation des grades, la finissante souligne l'importance de se réunir une dernière fois entre collègues d'études. Elle note aussi l'incidence du choix des récipiendaires des doctorats honoris causa. «Monsieur De Winter a beaucoup fait pour le design en sol canadien. Le design est de plus en plus intégré aux grandes entreprises. C'est un domaine émergent, mais qui prend de plus en plus de place dans la société. Voir qu'un doctorat honorifique est décerné dans ce programme universitaire non traditionnel est très prometteur pour les jeunes diplômés. C'est une porte qui s'ouvre! Ça prouve que nous avons notre place à l'université et dans la société.»
En 2017-2018, l'Université aura décerné 11 381 diplômes, tous cycles et attestations confondus, à 10 972 diplômés.
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«Je ne réalisais pas l'ampleur du rôle jusqu'au moment où j'ai vu les 3 000 personnes présentes se lever pour l'entrée du défilé universitaire», a avoué Annabelle Lemire, à qui on avait confié la tâche de porter la masse.

Au cours de la première fin de semaine, 2 465 finissants ont reçu leur diplôme.

La rectrice Sophie D'Amours a souhaité aux finissants une vie enrichissante et remplie d'expériences stimulantes à la hauteur de leurs talents et de leurs ambitions.

Thibaud Geoffroy et Naamwin-So-Bâwfu Romaric Meda (deuxième et troisième à partir de la gauche) ont obtenu leur diplôme de doctorat en sciences du bois. Tous deux ont fait une thèse sur la valorisation d'un produit de l'érable autre que le sirop.

Les cérémonies du 9 et du 10 juin réunissaient les finissants et les professeurs des facultés de Médecine, de Médecine dentaire, de Pharmacie, des Sciences de l'agriculture et de l'alimentation, des Sciences infirmières, des Sciences de l'administration, des Sciences et de Génie ainsi que de Foresterie, de Géographie et de Géomatique.
Une 300 000e personne diplômée!

Le dimanche 10 juin, l'Université a diplômé la 300 000e personne de son histoire. Vanessa Tremblay, originaire de Clermont dans la région de Charlevoix, a réussi des études de 1er cycle en administration. Pour souligner l'événement, la rectrice Sophie D'Amours a rencontré la finissante, le vendredi 8 juin, dans son environnement d'études à la Faculté des sciences de l'administration. «Vanessa, déclare la rectrice, représente un modèle très inspirant de détermination, de dynamisme et d'engagement à bâtir un monde meilleur. Sa réussite rejaillit sur l'Université Laval tout entière et confirme sa raison d'être dans ce qu'il y a de plus noble, soit de former des citoyens compétents, responsables, engagés, ouverts sur le monde et sur l'avenir.»
Photos: Jean Rodier