
Voici un exemple de justice réparatrice, définie comme une solution de rechange aux processus traditionnels de justice pénale. «C'est une prise en charge qui remplace une répression dure», dit Catherine Rossi, professeure au programme de criminologie de l'École de service social et participante au Symposium national sur la justice réparatrice, qui a eu lieu récemment à Québec. «La justice réparatrice prend les gens en considération, elle met l'accent sur la réinsertion au lieu d'envoyer des gens en prison, explique Catherine Rossi. Mais il arrive parfois que des victimes ne veuillent pas opter pour la justice réparatrice et préfèrent porter plainte, surtout si ce n'est pas la première fois qu'ils subissent un certain type d'agression.» Ceci vaut pour les délits mineurs.
En matière de crimes graves, comme les meurtres ou les agressions sexuelles, il existe également des programmes de justice réparatrice au Québec et au Canada. Ces programmes n'ont pas pour but de remplacer des poursuites contre l'agresseur, mais visent à aider la victime à reprendre le contrôle de sa vie, une fois l'agresseur reconnu coupable et emprisonné. «Dans le cas où un enfant a été assassiné par l'un de ses parents, par exemple, le parent qui reste est traumatisé à vie, malgré un suivi psychologique, explique la criminologue. Même chose pour une agression sexuelle. La victime veut avoir la vérité, elle souhaite entendre de la bouche même de l'agresseur ce qui n'a pas été dit lors du procès». C'est alors que les médiateurs en justice réparatrice (au nombre de 17 au Canada, dont 4 au Québec) entrent en jeu. L'opération débouche éventuellement sur une rencontre entre la victime et le détenu. Il va sans dire que cette séance de médiation est minutieusement préparée et que tout ce qui s'y dit demeure secret. Cela n'a aucune incidence sur la peine de l'agresseur, même s'il avoue avoir menti lors du procès.
«À la suite de cette rencontre, la victime pourra alors recommencer à vivre, affirme Catherine Rossi. De son côté, l'agresseur sera davantage en mesure d'assumer ses torts et d'entreprendre une certaine réinsertion sociale. On a ainsi vu des agresseurs devenir des aidants pour d'autres détenus.» Cela dit, ce type de rencontre demeure très rare, car elle exige beaucoup de temps et d'investissement, d'ajouter la criminologue. En effet, la victime doit être prête à toute éventualité: que l'agresseur reste silencieux ou qu'il profère des insanités.» Et le pardon? «Le pardon n'est pas un objectif, répond Catherine Rossi. Les victimes n'ont pas envie de pardonner.»
Spécialisée dans le champ des crimes graves, Catherine Rossi donne de nombreuses formations en matière de justice réparatrice et dirige des rencontres de dialogues entre auteurs de crimes et victimes. Elle a écrit Homicide, les proches des victimes, édité chez L'Harmattan, collection criminologie, Paris.