
— Michaël Monnier
Modeste, il préfère partager ce prix avec les nombreux journalistes, enseignants et chercheurs qu'il a connus au fil de sa carrière. «Une carrière, ça se fait avec les autres. Si j'ai fait beaucoup de choses, c'est à cause de tous ces gens que j'ai côtoyés. Ils ont autant le droit que moi de partager ce prix.»
C'est au sein de la station CHRC, où il faisait un peu de tout, que Florian Sauvageau a amorcé sa carrière dans les années 60. À l'époque, il n'existait pas de programme de formation en journalisme au Québec. Grâce à une bourse de l'Université, il est allé parfaire ses connaissances à l'École supérieure de journalisme de Paris, puis à l'Université de l'Illinois. Avant même d'avoir 30 ans, il est devenu directeur de l'information du quotidien Le Soleil. Il a aussi animé un nombre important d'émissions à la radio et à la télévision de Radio-Canada, en plus de collaborer à la réalisation de documentaires à l'Office national du film du Canada. Du côté universitaire, il a, entre autres, participé à la création du premier programme d'enseignement du journalisme au Québec et fondé le Centre d'études sur les médias.
Pour lui, un journalisme de qualité se définit d'abord et avant tout par l'explication. Les journalistes ne peuvent plus se contenter de rapporter des myriades de faits bruts. Ils doivent mettre en contexte et donner un sens à l'information. «Nos travaux au Centre d'études sur les médias montrent que les citoyens sont souvent perplexes et ne comprennent pas grand-chose aux grands dossiers. Ce n'est pas de leur faute; les médias ne les leur expliquent pas suffisamment. C'est l'orientation que doit prendre le journalisme.»
Un message qui trouve écho auprès de Gabrielle Brassard-Lecours, rédactrice en chef adjointe de la revue Kaléidoscope et cofondatrice de Ricochet, un nouveau média bilingue pancanadien. «Sa vision idéaliste et pure du journalisme est très inspirante. En plus, il est l'une des rares personnes de sa génération à s'adapter aux changements que l'on voit dans le métier. Il n'est pas déconnecté, et c'est tout à son honneur», explique cette diplômée de la maîtrise en journalisme international, un programme mis sur pied par Florian Sauvageau.
Comme elle, la journaliste indépendante Auberi Maitrot, qui travaille notamment chez Radio France international, garde de précieux souvenirs de son ancien professeur. Chaque semaine, elle se plaisait à visionner le cours télévisé qu'il donnait sur le journalisme international. «C'était la première fois que j'apprenais tout en m'amusant. Son cours m'a donné de très bonnes bases pour faire ce métier.»
Convergence médiatique, crise de la presse écrite, réduction des effectifs, travail précaire… Florian Sauvageau reconnaît que la réalité du journalisme a bien changé depuis son époque. Quel avenir pour ceux qui rêvent d'une carrière dans le domaine? Le professeur se fait optimiste. «Les jeunes devront apprendre à créer leur propre emploi. Des postes stables dans un même média avec une retraite garantie, il y en aura de moins en moins. Mais je continue à penser que les gens qui ont du talent vont réussir.»