
«Si les résultats sont concluants, ces nouveaux outils pourraient être proposés aux femmes enceintes d'ici 10 ans», estime François Rousseau.
— Marc Robitaille
La probabilité de donner naissance à un enfant atteint d'une anomalie comme la trisomie augmente avec l'âge de la mère. Auparavant, les médecins proposaient l'amniocentèse aux femmes enceintes de 35 ans et plus ainsi qu'à celles qui avaient des antécédents familiaux de maladies génétiques. Les cas survenant chez les femmes plus jeunes passaient sous le radar. Depuis quelques années, des tests biochimiques et un examen échographique permettant d'évaluer le risque de porter un enfant avec anomalie génétique sont proposés à toutes les femmes, quel que soit leur âge. À la lumière de ces tests, seules les futures mères qui présentent un risque élevé sont invitées à subir une amniocentèse.
Le prélèvement de liquide amniotique comporte un inconvénient majeur: il provoque des fausses-couches dans environ 1% des cas. «On estime qu'environ 10 000 Canadiennes subissent cette intervention chaque année, ce qui conduirait à la perte de 70 fœtus qui étaient en bonne santé», souligne François Rousseau. Autre désavantage, l'amniocentèse est effectuée entre la 14e et la 18e semaine de grossesse de sorte qu'en ajoutant les délais pour obtenir les résultats, une femme en arrive parfois à devoir subir une interruption de grossesse à la 19e ou à la 20e semaine.
La découverte de la présence d'ADN fœtal dans le sang de la mère a ouvert la porte à une nouvelle approche plus précoce et moins risquée de dépistage des anomalies génétiques. «Des fragments d'ADN du fœtus traversent le placenta et se trouvent en très faible concentration dans le sang de la mère, explique le professeur Rousseau. À l'aide d'une simple prise de sang effectuée avant la 9e semaine de grossesse, on peut détecter les anomalies du fœtus. En théorie, cet outil permettrait de ne faire que 300 amniocentèses là où il en faut présentement 10 000.»
Au cours des quatre prochaines années, le chercheur et ses collaborateurs recruteront 5600 femmes enceintes dans cinq centres canadiens afin de comparer la performance de tests génomiques qui font appel à l'ADN fœtal trouvé dans le sang maternel. Ils évalueront le coût de ces examens par rapport à leur efficacité ainsi que leurs répercussions éthiques, sociales et légales. Enfin, ils proposeront la meilleure façon de les implanter au Canada. «Notre étude va fournir toutes les informations dont les décideurs ont besoin pour se prononcer sur l'instauration de ces tests. Si les résultats sont concluants, ces nouveaux outils pourraient être proposés aux femmes enceintes d'ici 10 ans», estime le chercheur.