
Paula Casillas Sánchez a coorganisé le projet PASSAGE MURAL qui a transformé les piliers de l’autoroute Dufferin-Montmorency, à l'îlot Fleurie.
— Université Laval, Yan Doublet
La série Échantillons de la recherche raconte l'expérience de membres de la communauté étudiante en recherche. Ils partagent un aperçu de leur projet aux cycles supérieurs.
Paula Casillas Sánchez a découvert sa passion pour l'art de rue au fil de ses voyages dans le monde. «Quand je passais dans les villes, je voyais tout ce street art. Ça attire notre attention, parce que c'est comme une métamorphose de l'espace urbain. Ça a piqué ma curiosité: qui sont derrière ces œuvres et quelles étaient leurs intentions?», raconte la candidate au doctorat en littérature et arts de la scène et de l'écran, qui a récemment soumis sa thèse sur le sujet.
Motivée par un désir d'en apprendre plus sur cette expression artistique, Paula a mis sur pied l'organisme Street Art in Action. À travers ce projet, elle a mené plus de 500 entrevues avec différents artistes pour leur donner de la visibilité. «Je voulais créer une petite communauté artistique avec laquelle je pourrais développer des projets. Finalement, elle est devenue pas mal grande», dit-elle avec un sourire.
Paula a découvert plusieurs aspects intéressants pendant ses multiples entrevues. «Il y a toute une culture et des règles de la rue, des philosophies, des techniques, des styles, des personnages qui se partagent un même espace», rapporte-t-elle.
Elle a voulu pousser davantage son exploration de l'art de rue en se lançant aux études doctorales, dans le profil recherche-création, sous la direction du professeur Robert Faguy et la codirection de la professeure Geneviève Chevalier. Pour le volet création, elle a réalisé un documentaire sur le projet PASSAGE MURAL. Cette initiative de Street Art in Action, réalisée en août 2023 en collaboration avec deux autres organismes, a permis à 19 artistes originaires du Canada, de l'Argentine, du Brésil, du Mexique, de la Belgique et de la France de revitaliser l'îlot Fleurie, à Québec.

Avec PASSAGE MURAL, Paula voulait métamorphoser l’espace urbain.
— Courtoisie
Pour la portion de recherche, la finissante au doctorat a choisi d'étudier plus particulièrement l'aspect participatif de l'art de rue, c'est-à-dire comment les artistes intègrent le public et les organismes dans leurs œuvres, de l'idéation à l'appréciation du public, en passant par la réalisation.
Pour la participation directe, qui met en relation les personnes avec l'artiste, Paula donne l'exemple d'une artiste espagnole venue à Québec pour s'entretenir avec des personnes âgées en maison de retraite et apprendre à les connaître. Elle réalisait ensuite un croquis à reproduire sur un mur de la ville. La doctorante regarde aussi la participation par la technologie, notamment à travers des applications comme Flash Invaders qui permet d'accumuler des points en interagissant avec une œuvre ou avec des codes QR.
Transformer l'espace urbain
Sa recherche fait ressortir la philosophie commune des artistes d'embellir un lieu à travers l'art et de métamorphoser l'espace en tenant compte des personnes qui y vivent. «Ils observent le milieu et essaient de s'en imprégner. Quand un artiste fait une murale dans un autre pays, il crée une œuvre en dialogue avec l’espace urbain et la communauté qui l’habite», raconte-t-elle.
— Paula Casillas Sánchez, étudiante au doctorat à la Faculté des lettres et des sciences humaines
Cette idée d'intégrer la communauté dans les œuvres interpelle Paula. «Dans mes projets de Street Art in Action, je trouve que c'est vraiment important de faire participer la communauté avec laquelle j'interviens.» En 2024, elle est allée au Sénégal, à l'île de Carabane, pour un projet participatif avec plus de 500 jeunes. «On a peinturé tout le mur qui entourait leur école. J'ai fait venir un artiste brésilien et une artiste sénégalaise qui est pionnière dans le graffiti», rapporte Paula. Cette initiative était en partenariat avec l'École d'architecture de l'Université Laval, qui réalisait un projet de construction d'une ombrière avec la Chaire UNESCO pour la conception et la construction d’écoles solidaires et durables.
Maintenant que sa thèse est déposée, Paula considère poursuivre au postdoctorat pour documenter cet art «qui est tellement libre et qui est parfois mal vu». En parallèle, elle continuera de s'engager avec son organisme Street Art in Action. «C'est un très bon moyen d'appliquer la théorie à la réalité, de donner de la visibilité et une voix aux artistes que je découvre.»
Elle entrevoit de beaux projets pour l'année 2025. «Je veux continuer à embellir Québec à travers l'art de rue. Je pense que c'est un art super intéressant que tout le monde devrait connaître.»