
Le doctorant Sébastien Dumont étudie la vulnérabilité des arbres à des événements climatiques extrêmes.
— Université Laval, Yan Doublet
La série Échantillons de la recherche raconte l'expérience de membres de la communauté étudiante en recherche. Ils partagent un aperçu de leur projet aux cycles supérieurs.
«J'ai toujours aimé l'écosystème forestier et je voulais le comprendre. C'était donc naturel comme choix de domaine», raconte Sébastien Dumont, étudiant au doctorat. À travers son projet, il veut déterminer comment les différentes espèces d'arbres et les types de forêts sont affectés par les changements climatiques. «Avec la recherche, on est capable de faire des recommandations concrètes, d'arriver à des résultats pratiques qui vont pouvoir être appliqués.»
Sébastien s'intéresse à leur vulnérabilité face à des événements extrêmes, comme les sécheresses, les événements de gels printaniers ou de dégels hivernaux. «On comprend encore très mal leur impact sur la santé et la croissance des arbres, souligne-t-il. C'est plus dur à quantifier parce que ça arrive en quelques jours seulement.»
Ce qui rend les stress climatiques dangereux pour les arbres, c'est lorsqu'ils ne sont pas adaptés au moment où l'événement survient, explique Sébastien. «Pour qu'un gel soit dommageable, il faut que l'arbre soit à un moment vulnérable, comme lorsque ses bourgeons s'ouvrent au printemps. L'hiver, les températures de -30℃ ne sont pas un problème parce que l'arbre y est adapté.»
Ses travaux se déclinent en deux volets. Le premier observe les effets du climat à l'échelle du Canada. Sébastien travaille notamment avec des centres de recherche à travers le pays pour obtenir des données d'inventaires forestiers. «On a réalisé une base de données commune qui est sans précédent à l'échelle nord-américaine», précise le doctorant, qui travaille sous la direction des professeurs Guillaume Moreau et Loïc D'Orangeville.
Ce partenariat est possible grâce au programme de recherche de Silva 21, dans lequel s'inscrit son projet. Il regroupe des partenaires industriels et gouvernementaux, et plusieurs universités canadiennes. Sébastien peut ainsi échanger et collaborer avec d'autres étudiantes et étudiants au pays. «Les projets sont complémentaires, donc ça amène de belles discussions.»
Le laboratoire vivant de la Forêt Montmorency
Le second volet du projet doctoral se passe sur le terrain, à la Forêt Montmorency. «J'aime ce côté pratique, d'aller dans la forêt, de ne pas toujours être dans le laboratoire ou devant un écran», rapporte Sébastien.

Des étudiants ont planté des semis sur un site de la Forêt Montmorency. La coupe a été réalisée l’été précédent. Les rubans verts correspondent à l'épinette blanche et les rouges, à l'épinette rouge.
Au printemps 2024, le doctorant a planté des arbres de différentes espèces pour faire de la «migration assistée», c'est-à-dire qu'il utilise des semences qui viennent du sud, où le climat est plus chaud et plus sec, et il les plante plus au nord. L'idée derrière cette démarche est d'anticiper le réchauffement du climat. «On pourrait se dire que le sud du Québec va avoir un climat semblable à celui du Massachusetts dans 50 ans», illustre le jeune chercheur.
Dans la Forêt Montmorency, une forêt boréale, on retrouve normalement du sapin, de l'épinette blanche ou noire, et du bouleau à papier. Avec son projet, Sébastien a ajouté du chêne rouge, du pin blanc et des érables, qui ne sont pas des espèces locales.
Durant les prochaines années de son doctorat, le chercheur va regarder les taux de survie et mesurer la croissance des arbres annuellement. Il a aussi mis des caméras sur les sites de ses pousses, notamment pour étudier le niveau de santé du feuillage à travers les saisons, par exemple l'ouverture des bourgeons ou la tombée des feuilles. Le professeur Loïc D'Orangeville abordera cette portion de la recherche lors d'une conférence le 19 mars, dans le cadre de la Semaine des sciences forestières.

Une épinette blanche plantée en juin 2024. Elle avait déjà terminé une année de croissance en serre.
Selon le doctorant, la recherche qui se fait à la Forêt Montmorency ne pourrait pas être faite ailleurs. «Ça nécessite énormément de place. Mon espace de plantation fait plusieurs terrains de football. En forêt publique ou privée, ça n'aurait pas été possible.»
Son projet s'insère aussi dans le reboisement d'une coupe totale planifiée. Pour préparer le terrain, il a travaillé avec les aménagistes de la Forêt. «Ça demande de l'expertise et beaucoup de logistique pour ces opérations. On a vraiment un bon accompagnement», souligne Sébastien.
La Forêt permet aussi de suivre les projets à très long terme. «On peut penser suivre les effets des changements climatiques sur 10 ou 20 ans. Ça nous donne vraiment la flexibilité pour établir des projets de grande envergure.»