Pourtant, la politesse possède un effet d’entraînement: en effet, cet étudiant ayant reçu un accueil cordial de son professeur sera probablement porté à agir dans ce sens avec les autres. C’est le genre de situation que Denis Jeffrey, professeur au Département d’études sur l’enseignement et l’apprentissage, a expliquée à des élèves de la Commission scolaire de Montréal lors d’une série de conférences portant sur le civisme et la civilité. Par exemple, est-il acceptable qu’une personne qui parle avec son téléphone portable dans un espace public le fasse comme si elle était seule au monde? Réponse: non. Quel est le choix le plus approprié face à cette situation: interdire l’usage du cellulaire dans certains espaces publics ou miser plutôt sur le savoir-vivre de chacun pour son usage?
Ni trop près ni trop loin
«En toute occasion, faire appel au civisme règle la plus grande partie des problèmes, affirme Denis Jeffrey. Je donne aux élèves l’exemple de la compagnie d’autobus qui assure le transport entre Québec et Montréal. Dès le départ, le chauffeur demande de faire preuve de discrétion en utilisant le cellulaire, le iPod et autres faiseurs de bruits, et ça fonctionne!» Selon Denis Jeffrey, le Québec a encore beaucoup de chemin à faire par rapport aux règles les plus élémentaires de civisme, de civilité et de politesse. Donner la priorité au piéton quand on est au volant de sa voiture, s’excuser quand on bouscule quelqu’un, dire merci et s’il vous plaît, vouvoyer les gens qu’on ne connaît pas représentent des choses qui se perdent, à son avis. «L’autre jour, j’étais dans la salle d’attente du dentiste, raconte Denis Jeffrey. Des parents laissaient leurs jeunes enfants se comporter comme s’ils étaient dans leur salon. Il n’y avait aucune règle de conduite, aucune discrétion. Et pourtant, les parents doivent être les premiers éducateurs de leurs enfants.»
D'après Denis Jeffrey, la condition présidant à toutes nos relations de civilité devrait être de garder une juste distance de respect avec toute personne, qu’elle nous soit familière ou étrangère, qu’elle soit une personne d’ici ou d’ailleurs, une femme ou un homme, un premier ministre ou un prêtre. «Pour instaurer une relation sociale, on doit se rapprocher de l’autre, mais en se gardant de l’envahir, dit-il. Une bonne distance ne pourrait être mesurée. Elle évolue au rythme de ce qui se passe entre les individus qui se rencontrent. Il est certain que chacun protège son espace vital, et qu'on n'entre pas dans cet espace sans y être invité. Le respect de la personne humaine passe par le respect de cet espace entre nous qui nous permet d'exister sans être abandonné ou délaissé, sans être non plus sous l'emprise de l'autre.»