10 octobre 2024
Jeunes adultes non binaires: comment se construit et s'affirme leur identité de genre?
Maxime Plante vient de terminer sa maîtrise à la Faculté des sciences sociales sur les expériences qui influencent la construction et l'affirmation des personnes non binaires
La série Échantillons de la recherche raconte l'expérience de membres de la communauté étudiante en recherche. Ils partagent un aperçu de leur projet aux cycles supérieurs.
Originaire d'un petit village en région, Maxime Plante a fait face au défi de se comprendre et de s'affirmer en tant que personne non binaire. Après son coming out, à 15 ans, pour annoncer son orientation sexuelle, celui de son identité de genre s'est fait beaucoup plus tard, à l'âge de 31 ans.
Depuis son enfance, Maxime se questionnait sur son identité de genre. «C'est durant mon baccalauréat en travail social que j'ai découvert ce qu'était la non-binarité. J'ai réalisé que c'était possible d'être autre chose qu'une femme ou un homme.»
À l'instar de Maxime, la majorité des personnes non binaires ont tendance à comprendre et à affirmer leur identité de genre plus tardivement, comparativement aux personnes trans, selon la littérature. Parmi les facteurs qui peuvent contribuer à ce phénomène, il y a le manque de représentation et de compréhension sociale.
C'est ce qui a poussé Maxime à entreprendre une maîtrise en travail social, sous la direction du professeur Kévin Lavoie et de la professeure Annie Fontaine. Son projet portait sur la construction et l'affirmation d'une identité de genre non binaire.
Pour son mémoire, qui a récemment été publié, Maxime a utilisé les données du projet de recherche Savoirs sur l'inclusion et l'exclusion des personnes LGBTQ (SAVIE-LGBTQ). «J'ai ainsi eu accès à des entrevues réalisées auprès de personnes non binaires âgées de 18 à 29 ans. Comme les objectifs de recherche se rejoignaient, j'ai participé à donner une seconde vie à une portion des données de ce projet.»
Ressortir les tendances
Au fil de son analyse, Maxime a mis de l'avant plusieurs faits saillants sur la construction et l'affirmation identitaire. «Je pouvais faire des parallèles avec ma propre expérience, car différents résultats résonnaient avec mon vécu. Mon parcours personnel a influencé ma recherche et vice versa.»
Maxime a montré que, dès l'enfance et l'adolescence, les personnes non binaires interviewées se sont trouvées en marge de l'hétérocisnormativité, un système normatif qui présume, assigne et prône la binarité des sexes et des genres. «Dans les entrevues, je voyais que ça pouvait amener de l'incompréhension, de la détresse, de la dépression ou un sentiment de différence diffus, c'est-à-dire que les personnes n'avaient pas de mots pour expliquer ce qu'elles vivaient.»
Cette démarche a aussi été complexifiée par le fait qu’en plus d’être issues de la pluralité des genres, les personnes interviewées sont toutes issues de la diversité sexuelle. Maxime note que cela a suscité de la confusion dans la construction identitaire de ces jeunes adultes. «Certaines personnes pensaient être plus masculines parce qu'elles étaient lesbiennes.»
L'analyse des entrevues suggère que l'accès des personnes participantes à des modèles non binaires, une personnalité publique ou quelqu'un de leur réseau, par exemple, représente un «point tournant». «Ça peut accentuer les remises en question, apporter un sentiment de validation ou clarifier le ressenti identitaire.»
Pour ce qui est de l’affirmation sur le plan des transitions sociales, comme un changement de prénom, de pronom ou d'expression de genre, Maxime relève deux tendances. La première, la plupart des personnes interviewées restent discrètes par rapport à leur identité de genre, un choix associé à l'anticipation du mépris ou du rejet ou le fardeau de devoir expliquer son genre. La seconde tendance, moins populaire, est de faire connaître son identité de genre à son entourage.
Le recours aux transitions légales, qui impliquent de modifier le prénom ou la mention du sexe auprès de l'état civil ou d'autres organisations publiques et institutionnelles, est par ailleurs quasi-inexistant chez les personnes interrogées. Certaines appréhendaient des discriminations ou des coûts. Aucune n'a eu recours aux transitions médicales. «Différentes personnes ne ressentaient pas d'inconfort face à leur corps, ou pas suffisamment», note Maxime. Le manque de connaissances face à l'hormonothérapie a aussi été évoqué.
Durant sa maîtrise sur la non-binarité, Maxime a reçu du soutien financier de plusieurs organismes. «Ça me fait plaisir, ça démontre un engagement, une reconnaissance de la pertinence du sujet.»
Les évaluations positives reçues pour son mémoire lui ont permis de se tailler une place au Tableau d'honneur de la Faculté des études supérieures et postdoctorales.
Un changement de carrière
Avant de se lancer en travail social, Maxime a reçu une formation en arts plastiques. C'est une expérience d'emploi au GRIS Chaudière-Appalaches, un organisme de démystification de la diversité sexuelle et de la pluralité des genres, qui a motivé son parcours. «J'ai tellement aimé ça que j'ai décidé de faire un retour aux études avec le baccalauréat en travail social pour aider les communautés LGBTQ+.»
Durant ses études, Maxime a travaillé comme auxiliaire de recherche, puis a choisi de poursuivre à la maîtrise pour approfondir les connaissances sur la non-binarité.
Maxime travaille actuellement comme professionnel(le) de recherche sur des projets en lien avec la communauté LGBTQ+, une voie qui lui plaît particulièrement.