La série Échantillons de la recherche raconte l'expérience de membres de la communauté étudiante en recherche. Ils partagent un aperçu de leur projet aux cycles supérieurs.
C'est sa grande curiosité qui a amené Salomé Paradis dans le domaine du droit spatial. «Il y a énormément de questions à se poser et je pense qu'il y a beaucoup de choses à faire dans le domaine. Je sens que mon apport, aussi minime soit-il, peut faire une différence».
Après un baccalauréat en études internationales, l'étudiante a réalisé une maîtrise en droit international durant laquelle elle a suivi un cours en gouvernance spatiale. «Je suis tout simplement tombée en amour avec le domaine», raconte-t-elle.
Le droit spatial encadre toutes les activités spatiales, autant pour le lancement d'une fusée, l'opérationnalisation d'un satellite que pour les activités d'exploration et d'exploitation des corps célestes. Outre l'aspect juridique, il incorpore d'autres domaines comme l'astrophysique, l'ingénierie et même la philosophie.
Un domaine en évolution
L'expertise de Salomé Paradis touche l'obligation d'assurance spatiale, qui vise à responsabiliser les entreprises privées en cas de dommage dans le contexte d'activités spatiales.
«Si un satellite tombe sur un territoire ou s'il entre en collision avec un autre satellite, la responsabilité revient à l'État de lancement. Ce serait à lui d'indemniser l'État tiers dans le cas d'une demande en réparation», rapporte-t-elle. Avec le phénomène de la privatisation de l'espace, les entreprises jouent un rôle important et de plus en plus d'États leur demandent d'assurer leur responsabilité civile.
Dans le cadre de son doctorat, sous la direction de la professeure Cinthia Duclos de l'Université Laval et du professeur Lucien Rapp de l'Université Toulouse Capitole, Salomé Paradis compare la mise en place de l'obligation d'assurance spatiale selon les différents États. «Certaines entreprises privées ont le luxe de choisir le cadre règlementaire le plus avantageux pour elles. Pour les attirer, certains États vont abaisser leurs standards juridiques, notamment pour l'obligation d'assurance spatiale», rapporte l'étudiante.
Elle s'intéresse également à la portée de l'assurance spatiale liée aux les dommages environnementaux. «Dans les contrats, pourrait-on imposer des clauses spécifiques liées à la pollution?» se questionne-t-elle. Elle souligne la grande quantité de débris dans les orbites terrestres et l'enjeu de la pollution dans les activités spatiales. «En ce moment, on retrouve 34 000 grands objets en orbite, dont seulement 9000 sont des satellites opérationnels. C'est sans compter les millions de petits débris, comme les éclats de peinture.»
Une compétence recherchée
Son doctorat lui a ouvert une porte en enseignement. Son professeur l'a recommandé pour donner un cours en droit spatial à des étudiants à la maîtrise en ingénierie spatiale à Institut supérieur de l'aéronautique et de l'espace.
Elle aime former la relève et entendre les questions et les réflexions des étudiants. «L'un d'eux voulait démarrer son entreprise pour exploiter des ressources lunaires. Il avait mille et une questions par rapport à ce à quoi il serait confronté sur le plan juridique pendant l'extraction.»
En octobre, Salomé Paradis mettra aussi à profit son expertise lors d'une conférence scientifique. Elle présentera les premiers constats de son projet doctoral au Congrès international d'astronautique, qui aura lieu à Milan. «Il s'agit du plus grand événement dans le secteur spatial. C'est stressant, mais motivant, car c'est une belle occasion d'obtenir l'opinion des intervenants du domaine.»
Un avenir prometteur
La doctorante entame la troisième année de son programme d'études. Jusqu'à maintenant, elle a abordé le côté théorique de son sujet, mais elle sera amenée à interviewer des assureurs pour connaître leur point de vue et leur perspective par rapport à leur rôle dans la gouvernance des activités spatiales. «On compte actuellement une trentaine d'assureurs spatiaux qui sont souvent des acteurs transfrontaliers. Ils doivent donc s'adapter à la législation selon l'État où ils sont établis», souligne-t-elle.
Salomé Paradis ne sait pas ce que le futur lui réserve, mais elle espère poursuivre en recherche. «J'ai encore du pain sur la planche. C'est un sujet complexe qui évolue très vite.»