5 juillet 2024
La musique personnalisée pour le bien-être des personnes âgées vivant avec un trouble neurocognitif
Élodie Marois, étudiante au doctorat à l’École de psychologie, s’intéresse aux effets psychosociaux et cognitifs de la musique pour des personnes hébergées à la Maison des aînés et alternative de Sainte-Foy
La série Échantillons de la recherche raconte l'expérience de membres de la communauté étudiante en recherche. Ils partagent un aperçu de leur projet aux cycles supérieurs.
Élodie Marois a grandi avec la musique. «Ma mère et ma sœur jouent du piano, et j'ai moi-même chanté dans des comédies musicales et des chorales», raconte l'étudiante au doctorat. Elle se considère chanceuse de mener un projet motivant qui rallie son intérêt pour la musique et la neuropsychologie auprès de la clientèle âgée.
L'étudiante a l'occasion de travailler directement avec les résidents de la Maison des aînés et alternative (MDAA) de Sainte-Foy à travers le Laboratoire vivant Camelia, sous la direction de Carol Hudon, professeur à la Faculté des sciences sociales. «On est plus proche de nos participants et on apprend à bien les connaître. On peut aller chercher davantage la réalité du terrain», souligne Élodie. Comme elle travaille directement à la MDAA, elle peut collaborer aussi avec les soignants, les éducateurs spécialisés et les bénévoles. «Ça me permet de récolter plusieurs points de vue. C'est très enrichissant», ajoute Élodie, codirigée par Valerie Peters, professeure à la Faculté de musique.
Pour mener son projet, Élodie a recruté une douzaine de personnes âgées réparties dans les différentes maisonnées. La première étape: rencontrer les résidents et leurs proches. «En réalisant des entrevues, j'apprends à connaître l'histoire de vie du résident et ses préférences musicales. Ce sont de belles rencontres. Les proches sont souvent touchés et contents que le résident ait accès à une initiative comme celle-là.»
Une fois les informations en main, l'étudiante au doctorat crée une liste musicale personnalisée qui sera testée à plusieurs reprises auprès du résident. «L'objectif est de déterminer quelles chansons lui font du bien ou lui rappellent de bons souvenirs», explique Élodie. Après ces tests, la liste finalisée est jouée chaque jour au résident, à des moments optimaux.
«Par exemple, on pourrait utiliser la musique avant ou pendant les soins pour détendre le résident et le mettre dans un état d'esprit positif. Certains peuvent montrer de la résistance aux soins ou de l'agitation à ces moments-là, ce qui peut rendre le travail des soignants plus difficile. La musique serait bénéfique au résident ainsi qu'au personnel», rapporte Élodie.
La musique peut également servir le matin, quand la personne se sent plus déprimée ou plus stressée. En soirée, certains résidents peuvent aussi montrer une augmentation de l'agitation ou de l'anxiété, ce qu'on appelle le syndrome crépusculaire. «Mettre de la musique personnalisée pourrait aider le résident à se replonger dans de bons souvenirs», ajoute l'étudiante au doctorat.
Les listes sont très variées et peuvent incorporer plusieurs genres. Outre les goûts musicaux, la sélection de chansons est influencée par l'effet visé. «Si la volonté est de détendre la personne, on choisira des pièces musicales qui induisent un état de calme et d'apaisement», indique Élodie, dont le projet est financé par le Fonds François-et-Rachel-Routhier.
Pendant l'écoute de la musique, les soignants, les éducateurs spécialisés ou les bénévoles qui collaborent activement au sein du projet de recherche remplissent une grille d'observation. «Ils doivent noter la réaction du résident. Est-ce qu'il s'est mis à chanter, à applaudir, à danser, à taper du pied? Pour les résidents apathiques, ça peut être des réactions plus subtiles comme un sourire», souligne l'étudiante au doctorat.
Elle communique beaucoup avec le personnel de la MDAA afin d'apprendre à connaitre davantage chaque résident. Cela lui permet de savoir quels sont les symptômes qui se sont manifestés chez le résident au cours du dernier mois, s'il y a eu de l'agitation ou de l'anxiété par exemple, afin de mieux personnaliser l'intervention.
À travers son projet doctoral, Élodie s'intéresse aussi au vécu des soignants, en lien avec la détresse psychologique et la charge de travail. «Est-ce que la musique les aide dans leur travail, dans l'administration des soins, lorsque le résident est plus calme? Sont-ils moins stressés d'intervenir auprès du résident?»
Si la recherche montre des bienfaits et que l'implantation se déroule bien, l'objectif serait d'offrir de la musique personnalisée à tous les résidents de la MDAA de Sainte-Foy, et même à d'autres résidences et CHSLD. Actuellement, elle collabore avec le Centre d'excellence sur le vieillissement de Québec (CEVQ) qui a lancé un projet similaire, intitulé Mémoire en musique, dans quelques établissements du CIUSSS de la Capitale-Nationale durant la pandémie. «L'équipe du CEVQ voulait éventuellement étendre leur projet à la MDAA de Sainte-Foy. Nous nous sommes arrimés et avons joint nos expertises», raconte l'étudiante au doctorat.
Après ses quatre années de doctorat, Élodie souhaite devenir neuropsychologue auprès des personnes âgées. «Cette clientèle me tient à cœur. Depuis que j'ai commencé à travailler dans l'équipe de Carol Hudon et que je suis en contact avec elle, ça confirme mon intérêt à poursuivre en clinique. Je veux aider au diagnostic et au suivi des patients, et essayer de les accompagner le plus possible.»