Près de 70% des boissons alcoolisées prêtes à boire de type cocktail ou soda sont vendues dans des contenants portant des informations nutritionnelles qui leur donnent, à tort, un halo santé, révèle une étude menée par une équipe de recherche de l'Université Laval et de Santé publique Ontario. À la lumière de ce constat, les auteures de l'étude estiment que la réglementation entourant la mise en marché de ces produits devrait être resserrée.
Cette recherche, qui vient d'être publiée dans la revue Preventive Medicine Reports, repose sur une analyse détaillée de l'information présentée sur les contenants de boissons alcoolisées, de type cocktail prêt à boire ou soda, vendues au Québec. Pour constituer l'échantillon étudié, les chercheuses se sont rendues, en juillet 2021, dans trois supermarchés de différentes bannières situés dans la ville de Québec et elles ont acheté une canette de chaque produit de ce type offert en magasin. Au total, 193 produits fabriqués par 49 entreprises ont été étudiés.
Leurs analyses ont révélé que 68% des produits portent au moins un énoncé nutritionnel. Le plus souvent, il s'agit d'un énoncé sur la présence d'arômes naturels (45%), de la présence d'un tableau de la valeur nutritive (38%), d'un énoncé sur le contenu en calories (29%) ou en sucre (20%), ou d'un énoncé sur l'absence de gluten (13%) dans le produit.
«La présence d'informations nutritionnelles pourrait rendre ces produits plus acceptables aux yeux des personnes qui se soucient de leur santé. Ces informations peuvent aussi occulter le fait que ces boissons contiennent autant d'alcool que des boissons alcoolisées traditionnelles comme la bière», souligne la première auteure de l'étude, Élisabeth Demers-Potvin, nutritionniste et étudiante-chercheuse dans l'équipe de Lana Vanderlee, de l'École de nutrition, du Centre NUTRISS – Nutrition, santé et société, et de l'Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels de l'Université Laval.
En comparant les produits à taux ordinaire d'alcool (plus de 4% jusqu'à 7%) aux produits à teneur réduite en alcool (3,5% à 4%), les chercheuses ont constaté que ces derniers portent plus souvent un énoncé nutritionnel (97% contre 19%) et un tableau de la valeur nutritive (97% contre 26%). «La présence plus importante d'énoncés nutritionnels sur les produits à teneur réduite en alcool détourne l'attention du fait qu'elles contiennent presque autant d'alcool que des boissons alcoolisées régulières», fait valoir Élisabeth Demers-Potvin.
Règle générale, les produits qui affichent plus d'information nutritionnelle peuvent être vus comme un meilleur choix que ceux qui en ont peu ou pas, poursuit-elle. «On sait que pour d'autres produits alimentaires, cela peut influencer le choix des consommateurs et les quantités consommées.»
Les boissons alcoolisées prêtes à boire contiennent essentiellement de l'eau, des arômes et de l'alcool. «Le recours très répandu aux énoncés nutritionnels qui donnent un halo santé à ces produits peut créer une certaine confusion, estime Élisabeth Demers-Potvin. Dans l'intérêt des consommateurs, il faudrait mieux réglementer et uniformiser l'étiquetage et la mise en marché de ces produits.»
Les signataires de l'étude publiée dans Preventive Medicine Reports sont Élisabeth Demers-Potvin, Alexa Gaucher-Holm, Véronique Provencher, Manon Niquette, Ariane Bélanger-Gravel et Lana Vanderlee, de l'Université Laval, et Erin Hobin, de Santé publique Ontario.