
Les pagayeurs de l’équipe de canoë de béton de l’Université Laval durant la compétition organisée par l’American Society of Civil Engineers et tenue début juin à Louisiana Tech University.
— Alec Gatewood
Du 3 au 5 juin à Ruston, en Louisiane, l’équipe de canoë de béton de l’Université Laval a pris part à la 2022 ASCE Society-Wide Concrete Canoe Competition. Cette compétition internationale a attiré 19 équipes du Canada, des États-Unis, de Porto Rico et de l’Inde. Au final, les étudiants de l’Université Laval ont décroché la deuxième place au classement général. Il s’agissait du dixième top 3 pour l’Université depuis la fondation de l’équipe en 1996.
«Nous avons concouru dans 10 catégories et nous avons terminé parmi les quatre meilleures équipes de chacune des catégories», explique Mireille Jean, étudiante au baccalauréat en génie civil et responsable entre autres de la gestion du budget et de la rédaction du rapport technique. «Nous avons obtenu, poursuit-elle, six deuxièmes places, une troisième place et trois quatrièmes places.»
La moitié des épreuves étaient de nature sportive, notamment les courses de rame et les sprints masculin et féminin, trois épreuves où l’Université Laval a terminé en deuxième place. Ces performances sont d’autant plus remarquables que le canot pesait 113 kilos. «Nous étions quand même assez fiers de nos résultats, dit-elle, puisque notre béton était vraiment plus lourd que celui de nos concurrents. Certaines années, notre canot a pesé 45 kilos de moins. Avec ce poids en moins, nous serions allés plus vite qu’eux. Mais nous avons eu un problème d’approvisionnement dû à la COVID-19.»
La compétition est organisée annuellement par l’American Society of Civil Engineers. Les épreuves allaient de la présentation technique au slalom masculin, en passant par le rapport d’amélioration et le produit fini. Un des plus importants règlements concerne l’utilisation stricte de béton. «On ne peut même pas appliquer de la peinture sur l’extérieur du canoë, c’est interdit, souligne-t-elle. La solution consiste à mélanger des pigments de couleur au béton.»
Mireille Jean insiste sur les différences entre le béton utilisé en compétition et celui utilisé dans l’industrie de la construction. «Le premier n’a pas la même quantité d’air, ni la même texture, ni la même masse volumique que le second, indique-t-elle. Cela nous prend du béton vraiment particulier pour pouvoir l’appliquer et pour pouvoir lui donner les formes que l’on veut. Grosso modo, le béton du canot a une masse volumique environ la moitié plus faible que celle du béton standard.»
Une embarcation de près de six mètres
La version 2022 du canoë de l’Université Laval fait 5,9 mètres de long, 65,5 centimètres de large et 36,8 centimètres de haut.
Cette année, une quarantaine d’étudiants et d’étudiantes au baccalauréat en génie civil ont participé de près ou de loin au projet. Le travail était placé sous la responsabilité de 10 personnes, dont un responsable de l’esthétique et un responsable de la conception. «Je pense qu’esthétiquement, on avait un super beau canot, affirme l’étudiante. La petite équipe a eu de bonnes idées, comme pour le logo officiel du chandail du canot, pour notre kiosque sur place et pour les bases supportant l’embarcation. Je pense que ces éléments nous ont permis de beaucoup nous démarquer. Quant à l’équipe de conception, elle a beaucoup travaillé sur la forme du canot pour qu’il soit le plus hydrodynamique possible. Je l’ai essayé. Il allait vraiment très bien. Il flottait bien et je n’ai pas eu de difficultés à faire les virages. Il était vraiment manœuvrable.»
Et l’entraînement? «Cette année, répond-elle, nous étions à la base de plein air de Sainte-Foy. Debout vers cinq heures, les pagayeurs ramaient pendant deux heures. Normalement nous ramons jusqu’au mois de novembre. Il est arrivé, pendant les dernières pratiques d’automne, que nous ayons eu à casser la glace qui s’était formée durant la nuit. Cet hiver, nous nous sommes entraînés dans une salle aménagée spécifiquement pour la rame, gracieuseté d’un commanditaire, Rame Québec.»
«Il faut que ça flotte!»
Chaque année, le grand défi de l’équipe de l’Université Laval se limite à une chose que Mireille Jean résume de la façon suivante: «Il faut que ça flotte!» «Nous sommes à la recherche de granulats de plus en plus légers, dit-elle, car les règles sont de plus en plus strictes à cet sujet.» L’autre grand défi consiste à attirer des participants et à les motiver. «Le projet de canoë de béton comprend plusieurs volets et peut donc toucher beaucoup de monde, poursuit-elle. Ceux et celles qui aiment bouger peuvent faire de la rame. Si on aime le travail de laboratoire, on peut s’occuper des mélanges de béton. La rédaction de rapports, la construction des formes pour le coulage du béton ou bien le sablage du canot sont d’autres activités offertes. Il y a tellement de choses à faire.»
Le groupe occupe un local au pavillon Adrien-Pouliot. Deux soirs par semaine, les étudiants se sont rendus dans les locaux du Centre de recherche sur les infrastructures en béton de l’Université Laval pour travailler leurs mélanges. «Nous étions bien encadrés», souligne-t-elle. Selon l’étudiante, le projet demande beaucoup d’ouvriers. «Il faut beaucoup sabler le canot pour essayer de diminuer son épaisseur, souligne-t-elle. Cette année, nous avons eu besoin de 800 à 1000 heures pour faire le travail. Il a été difficile de trouver de la main-d’œuvre pendant la session d’hiver. On portait tout le temps un masque N95, car ce genre d’activité est très dangereuse pour les poumons. Nous portions aussi des lunettes, des gants, des manches longues et des pantalons.»
L’équipe est sérieuse et déterminée. «Nous voulons avoir de bons résultats, poursuit-elle. Nous sommes aussi axés sur le fait d’avoir du plaisir à travers nos tâches. Par exemple, nous organisons des “sablothons” de 24 heures pour le sablage. Au travers, nous mettons de la musique et nous dansons!»
Mireille Jean fait partie de l’équipe depuis trois ans. Elle a touché à tout: de la rame, des rapports, de la construction, des mélanges. «J’ai consacré plus de 400 heures au projet cette année, explique-t-elle. Ce fut une grosse année. Mais cela a valu la peine. Je ne regrette rien.»

Des membres de l’équipe de canoë de béton de l’Université Laval au travail dans l'une des courses de rame. L’équipe a terminé au deuxième rang de cette catégorie.
— Alec Gatewood