En conditions normales, les hormones femelles (œstrogènes) stimulent la multiplication des cellules mammaires, alors que les hormones mâles (androgènes) la freinent. Les trois chercheurs ont donc placé une lignée de cellules cancéreuses sensibles aux deux types d’hormones sexuelles dans des milieux de culture contenant différentes concentrations de DDE. Dans les milieux exempts d’hormones, les cellules cancéreuses ne répondaient pas à une hausse du DDE. Par contre, en présence simultanée d’hormones mâles et femelles, les cellules cancéreuses proliféraient en fonction de la concentration de DDE. Les chercheurs ont démontré que l’effet inhibiteur des hormones mâles sur la multiplication des cellules du sein disparaissait en présence du DDE, tout comme en présence d’un composé reconnu pour ses propriétés antiandrogéniques, l’hydroxyflutamide.
Ces résultats viennent confirmer l’hypothèse que les trois chercheurs avaient avancée dans une étude antérieure après avoir observé que la concentration de DDE était associée à l’agressivité des tumeurs chez les femmes atteintes d’un cancer du sein. «La voie de signalisation des androgènes, qui inhibe le développement des cellules du sein, semble perturbée par le DDE», constatent-ils. Ce composé bloquerait les récepteurs d’androgènes à la surface des cellules mammaires, ce qui ouvrirait la voie à la prolifération des cellules cancéreuses.
Selon les chercheurs, ce mécanisme expliquerait pourquoi les études épidémiologiques n’ont pas démontré de lien clair entre l’abondance de composés aux propriétés œstrogéniques dans l’environnement et le risque de cancer du sein. Des recherches portant sur des composés antiandrogéniques qui, comme le DDE, bloquent l’action des hormones mâles apporteraient peut-être un éclairage nouveau sur la question, croit Pierre Ayotte.