La nouvelle série Mille mercis, lancée pour souligner l’avènement du Mois de la reconnaissance, vise à reconnaître l’engagement de membres de la communauté universitaire et à leur témoigner de la gratitude. L’engagement peut prendre diverses formes. Il peut se manifester par une implication environnementale ou sociale, par un esprit d’équipe unique, par de la bonne humeur contagieuse et un dévouement envers des collègues, par des projets visant l’équité, la diversité et l’inclusion, par des idées novatrices ou des réalisations remarquables pour améliorer la vie sur le campus. Bref, il a différents visages et se retrouve aussi bien chez les étudiants que parmi les membres du personnel. La série se poursuivra au cours de la prochaine année. Si vous connaissez des «perles» dont l’engagement mérite d’être mis en valeur, écrivez-nous à nouvelles@ulaval.ca.
En juin 1974, Lynda Morin vient tout juste de souffler 16 chandelles quand elle obtient un emploi d'été comme étudiante en secrétariat au Département d'histoire. À la fin août, son patron lui remet une lettre de référence dans laquelle il indique qu'elle deviendra une très bonne secrétaire, louant son humeur égale et son dévouement envers les autres. Cinquante ans plus tard, ce sont toujours les mêmes qualités que lui reconnaissent ses collègues de travail.
«Lynda est toujours souriante et à l'écoute des autres. C'est une personne extrêmement généreuse et d'une patience infinie, en plus d'être d'une grande modestie», témoigne Julie De Blois, conseillère à la gestion des études, qui la côtoie quotidiennement depuis plus de 8 ans.
Aujourd'hui agente à la gestion des études à la Faculté des lettres et des sciences humaines, Lynda Morin a travaillé dans plusieurs départements et facultés au cours des 50 dernières années. Elle a eu le loisir d'observer de l'intérieur l'évolution de l'université, notamment la progression de la place des femmes au sein de celle-ci. «Quand je suis arrivée, il y avait encore plein de "monseigneurs", dit-elle en riant. On ne pouvait pas porter de minijupe ni de décolleté.»
De secrétaire à cheffe d'équipe
De retour à l'école à l'automne 1974, la jeune Lynda Morin se voit offrir un stage à la Faculté d'architecture. Puis, au printemps suivant, on lui propose un poste à la Faculté de philosophie. Le 21 avril 1975, elle commence donc officiellement sa carrière à l'Université Laval. «Je n'avais même pas encore terminé mes études. Lors de mon embauche, on m'a accordé la permission d'aller faire mes examens du ministère de l'Éducation à la fin de l'année scolaire», se remémore-t-elle.
À l'époque, le travail était très hiérarchisé. «J'étais l'adjointe de Gemma Parent, la sœur de monseigneur Parent. Elle était la secrétaire du doyen et avait le privilège de taper les lettres à la machine à écrire. Moi, je faisais des photocopies et je plaçais les lettres dans des enveloppes», se souvient-elle.
L'année suivante, on lui offre déjà une promotion. Elle se retrouve au Département de génie mécanique, où elle découvre la gestion des études. «Je m'occupais des inscriptions. Tout se faisait à la main et je me rappelle de longues journées de travail que je terminais les doigts enflés», dit-elle en riant. C'est aussi un endroit où elle a appris à prendre sa place, mais «tout en restant polie et gentille», précise-t-elle. «J'avais 18 ans et je me retrouvais dans un milieu très masculin. Il y avait une seule étudiante dans ce département et c'était Claire Deschênes [NDLR: aujourd'hui professeure émérite au même département]. Une fois, les étudiants m'ont obligée à aller me présenter au concours de la plus belle secrétaire de l'Université, une compétition qui heureusement est disparue depuis longtemps. Ça n'a pas été ma plus belle expérience», raconte avec humour Lynda Morin à propos de cette époque révolue.
La jeune femme se retrouve ensuite au Département de mathématiques, un milieu qui était peu prisé par les agentes de secrétariat. «À la dactylo, explique-t-elle, c'était plus exigeant de faire des documents avec des symboles mathématiques. Il fallait souvent changer les sphères d'impression pour avoir le symbole désiré.» Cette contrainte n'altère en rien l'enthousiasme de Lynda Morin, qui conserve ce poste pendant 15 ans, avant d'être mutée pendant quelques années à la Faculté de foresterie, une autre unité qu'elle a beaucoup aimée.
Puis, on lui offre de devenir l'une des premières techniciennes à occuper un emploi de cheffe d'équipe en gestion des études dans une faculté. «J'ai apprécié que la Faculté des sciences et de génie me fasse confiance. C'est l'une des réalisations professionnelles dont je suis la plus fière», confie-t-elle.
En 2013, Lynda Morin prend ce qu'elle appelle sa «fausse» retraite. «À 55 ans, dit-elle, je n'étais pas prête pour la retraite.» Après quelques semaines d'arrêt, elle accepte donc un contrat d'un an à la Faculté des sciences de l'éducation. Puis, elle commence un contrat de 4 mois à la Faculté des lettres et des sciences humaines… où elle travaille encore près de 10 ans plus tard. «J'ai formé presque tous les agents et les conseillers à la gestion des études de la Faculté. J'ai bien sûr le cœur lourd de partir, mais aussi le cœur léger de voir la belle équipe, compétente et efficace, que j'ai contribué à bâtir. C'est un autre de mes beaux accomplissements», dévoile-t-elle.
Cependant, il n'y a pas que les membres de cette équipe qui ont appris les rudiments du métier grâce à Lynda Morin. Ils sont aujourd'hui des dizaines d'employés à la grandeur du campus à avoir bénéficié de ses judicieux conseils et de son amour pour la gestion des études. Dernièrement, quelques employés de la Faculté des sciences et de génie et du Bureau du registraire – dont certains ont progressé dans la profession ou sont devenus gestionnaires –, lui ont d'ailleurs manifesté leur gratitude pour tout le savoir qu'elle a généreusement partagé. «C'est toi, Lynda, qui m'as fait aimer la gestion des études», lui ont-ils tous répété pour souligner son legs immense.
Nourrir les belles relations
Visiblement, les gens qu'elle quitte ont, eux aussi, le cœur lourd. Les fleurs avec lesquelles Lynda Morin tenait à être prise en photo lui ont été offertes, pour célébrer sa retraite, par les deux conseillères en gestion des études avec qui elle collabore au quotidien. «Je suis chanceuse, déclare-t-elle. J'ai eu droit à beaucoup de marques de reconnaissance au cours de ma carrière. Un de mes beaux souvenirs est mon 50e anniversaire. Mon conjoint avait organisé un brunch un dimanche matin au mont Tourbillon. Il avait demandé l'aide d'une collègue pour inviter quelques personnes de la Faculté des sciences et de génie. Finalement, ce sont des dizaines de collègues qui sont venus. Même le doyen était présent. Ça m'a beaucoup touchée que tous ces gens se déplacent pour moi durant la fin de semaine.»
Il faut dire que Lynda Morin a toujours été présente et prévenante pour ses collègues. Par exemple, lors de la grève du Syndicat des employées et employés en 2017, elle a accompagné ses confrères et consœurs dans leur action syndicale, bien qu'elle n'ait pas été elle-même obligée d'aller manifester, bénéficiant du statut de retraitée. «Je n'aurais pas pu me tenir la tête haute en restant au chaud chez moi pendant qu'ils faisaient du piquetage dehors l'hiver», soutient la femme solidaire pour qui nourrir les amitiés et les belles relations au travail a toujours été primordial.
Le secret de son succès: respecter les étudiants
«J'ai toujours aimé le travail bien fait et, dans la gestion des études, tout n'est pas toujours noir et blanc. Il faut savoir écouter, posséder un bon esprit d'analyse et avoir de l'initiative pour trouver des solutions. Il faut être bienveillant avec l'humain que l'on a devant soi; il faut respecter l'étudiant que l'on rencontre», explique-t-elle.
Et à l'instar des collègues, les étudiants ont aussi été reconnaissants de tout ce qu'elle a accompli pour eux. «L'an dernier, j'ai été surprise. Des représentants du ministère de l'Enseignement supérieur, de passage sur le campus, ont demandé à me rencontrer. Ils m'ont dit qu'ils voulaient voir la fameuse madame Morin, que plusieurs étudiants avaient mentionnée dans un sondage comme un des points forts du programme d'histoire à l'Université Laval. Les étudiants ont indiqué que j'étais toujours là pour eux et que leur dossier était toujours à jour», raconte-t-elle avec fierté.
Lynda Morin a-t-elle des projets pour la retraite? «Mon conjoint et moi allons en profiter pour visiter la province et faire toutes ces choses qu'on n'a pas eu le temps de faire, comme s'assoir sur la balançoire et regarder les arbres pousser. Et bien sûr passer du temps avec mes trois fils et mes quatre petits-enfants», dit-elle les yeux brillants.
Bonne retraite, Madame Morin, et mille mercis pour avoir légué votre amour de la gestion des études à de nombreux membres de notre communauté universitaire!
Témoignage
«Lynda est une personne discrète, mais elle marque profondément les gens qui croisent son chemin. Elle a apporté beaucoup de positif dans notre équipe de gestion des études. Elle a des qualités de pédagogue évidentes et elle garde son calme en toute situation. C’est aussi une personne rassembleuse. En fait, c’était le pilier de notre équipe. Et c’est une référence dans le domaine de la gestion des études.
Je l’admire beaucoup pour ses belles qualités humaines. Elle a une très belle écoute et elle ne juge personne. Elle accueille tout le monde et fait preuve d’une grande patience en toutes circonstances. C’est également une personne qui s’adapte facilement et qui est restée jeune de cœur.
Elle a apporté beaucoup à l’Université. Elle a joué le rôle de mentor auprès de tant de gens. De plus, elle a un regard très lucide et est excellente pour trouver des solutions aux problèmes.
Je suis bien contente qu’on mette sa personnalité et ses accomplissements en lumière, car c’est une personne très inspirante.»
Julie De Blois, conseillère à la gestion des études à la Faculté des lettres et des sciences humaines