Controverse en cardiologie
Les conclusions d’une méta-analyse sur une classe de médicaments pourraient changer le traitement des maladies coronariennes
Après avoir passé en revue trois vastes études portant sur près de 30 000 patients, une équipe internationale dirigée par Gilles Dagenais, professeur à la Faculté de médecine et membre du Centre de recherche de l’Hôpital Laval, conclut qu’une classe de médicaments nommée inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine (IECA) peut non seulement apporter des bienfaits aux malades coronariens qui présentent des risques élevés, mais aussi à ceux qui ont des risques modérés ou faibles. Les résultats de cette étude viennent d’être publiés dans la prestigieuse revue médicale The Lancet.
Des études antérieures avaient démontré que les IECA réduisaient les risques de mortalité et d’accidents cardiovasculaires chez les malades coronariens souffrant d’insuffisance cardiaque ou de dysfonction ventriculaire gauche. Pour déterminer si cet effet préventif pouvait aussi se manifester chez des malades présentant des risques moins élevés, le professeur Dagenais et ses collègues canadiens, britanniques et néerlandais ont combiné des données provenant de trois vastes études internationales, HOPE, EUROPA et PEACE.
Leurs analyses montrent que les patients qui ont pris un médicament de type IECA ont eu une incidence plus faible de mortalité générale, de mortalité liée à une maladie cardiovasculaire, d’infarctus et d’accidents cérébrovasculaires que ceux qui ont reçu un placebo. Dans l’ensemble, le risque relatif de ces événements était 18 % plus faible dans le groupe qui prenait le médicament. Ceci signifie que pour chaque tranche de 1 000 patients sous médication, 21 personnes de moins ont été victimes d’accidents cardiovasculaires graves pendant le suivi de 4,5 années, précisent les chercheurs. «Contrairement à ce que laissaient entendre les responsables de l’étude américaine PEACE, de même qu’un commentaire éditorial publié dans The Lancet, il ne semble pas y avoir de seuil au-dessous duquel les IECA n’apportent pas de bénéfices aux malades coronariens, analyse le professeur Dagenais. Il faut donc envisager le recours à ces médicaments pour tous les malades coronariens et évaluer, dans chaque cas, s’il est approprié d’en prescrire.»
Ces positions divergentes sur le recours aux IECA sèment une certaine confusion dans le monde de la cardiologie, reconnaît Gilles Dagenais. Les divergences entre son équipe et l’équipe PEACE s’étaient manifestées avant même la publication de l’article dans The Lancet puisque, contrairement aux responsables des projets HOPE et EUROPA, les chercheurs américains qui dirigent le projet PEACE avaient refusé de lui transmettre certaines données non publiées. Les chercheurs auront bientôt l’occasion de renouer le dialogue et de tirer l’affaire au clair puisque Gilles Dagenais présentera les grandes conclusions de son étude lors du Congrès mondial de cardiologie qui aura lieu au début de septembre à Barcelone.
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