
De la prudence
L'entrée d'Internet dans les salles
de classe soulève certains problèmes légaux
L'avènement de l'ère numérique a creusé
un fossé large d'une cinquantaine d'années entre
la société et les règles qui régissent
le droit d'auteur et le droit à l'image. Cet écart
devrait nous inciter à faire montre d'une prudence à
la mesure de la puissance de diffusion des nouvelles technologies
de l'information. En cas de doute, il est plus sage d'obtenir
le consentement écrit de toutes les parties intéressées
avant de faire quoi que ce soit. Voilà sommairement l'avis
que Sylvain Dufour, conseiller juridique au Bureau du secrétaire
général de l'Université, a offert à
un groupe de professeurs et d'étudiants de la Faculté
de foresterie et de géomatique qui l'avait invité,
le 17 février, à prononcer une conférence
sur le droit d'auteur en milieu universitaire et l'utilisation
d'Internet comme outil d'enseignement.
Cette invitation faisait suite à un cas particulier où
Internet et le droit s'entrechoquent dans le cadre d'un cours
offert en sciences forestières. Chaque étudiant-chercheur
inscrit aux cours Colloque II et Colloque III de
ce programme doit présenter un séminaire sur ses
travaux de maîtrise ou de doctorat devant une assemblée
de professeurs, d'étudiants aux cycles supérieurs
et d'invités. Le professeur responsable du cours, Maurice
Lalonde, proposait de réaliser une vidéo numérique
de chaque présentation pour que l'étudiant puisse
la visionner après coup et évaluer sa performance.
Il proposait également de diffuser cette présentation
sur le site Internet du cours. "Pour les étudiants,
il s'agit d'un outil de rétroaction intéressant
et d'une nouvelle façon de diffuser leurs travaux à
l'échelle de la planète, fait valoir le professeur
Lalonde. En plus, il s'agit d'une carte de visite exceptionnelle
pour l'étudiant qui veut se faire connaître."
Mais, est-ce bien légal? Si la question est simple, la
réponse l'est moins parce qu'elle fait appel aux lois
qui régissent le droit d'auteur, le droit à l'image
et le droit à la vie privée. "La simple captation
de l'image d'un étudiant dans une salle de cours ne peut
avoir lieu avant d'avoir obtenu son autorisation, a souligné
Sylvain Dufour. En cas de doute, il faut obtenir le consentement
écrit de l'étudiant. C'est à lui de décider
s'il est d'accord ou non avec la captation et la diffusion de
son image et de ses travaux de recherche."
Ce genre de problème est devenu le lot quotidien de Sylvain
Dufour. "Chaque année, je reçois des centaines
de questions concernant les droits d'auteur de la part de membres
de la communauté universitaire, affirme-t-il. Il faut
comprendre que chaque jour des milliers d'oeuvres sont créées
sur le campus." Pour ceux qui seraient tentés de
croire qu'il y a là exagération, sachez qu'un simple
plan de cours et même l'article que vous avez sous les
yeux sont des oeuvres littéraires au sens de la loi.
Le conseiller juridique prépare d'ailleurs un guide qui
devrait répondre aux questions que se posent les professeurs
en matières de droit d'auteur se rapportant au matériel
pédagogique, qu'il soit sur support papier ou numérique.
D'ici là, la prudence est de mise. "Il faut respecter
les oeuvres et les créations des autres, comme on veut
que les autres respectent les nôtres", conclut-il
sagement.

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