
Le cercle infernal
Les adolescentes qui ont vécu de la violence
dans leurs relations amoureuses ont de fortes chances de se retrouver
à nouveau dans la même situation
Les adolescentes qui vivent de la violence physique ou psychologique
dans leurs relations amoureuses doivent prendre conscience de
la situation et tâcher d'y mettre fin rapidement, sous
peine de voir la situation perdurer. Certaines jeunes filles
peuvent ainsi décider de rompre avec leur partenaire violent
mais n'osent pas, ne sachant trop comment s'y prendre et ayant
peur d'éventuelles représailles. D'autres ne réussissent
pas vraiment à sortir du cercle vicieux de la violence
et se retrouvent constamment dans des situations où elles
ont à composer avec des conjoints violents. C'est ce que
Marie-Hélène Gagné, professeure à
l'École de psychologie, appelle la "victimisation".
Cette victimisation peut se perpétuer, d'où la
nécessité d'implanter des programmes de prévention
et d'information sur la violence dans nos écoles, de manière
à sensibiliser les filles au phénomène lorsqu'elles
sont très jeunes.
Dans une étude menée en collaboration avec Francine
Lavoie, de l'École de psychologie et Martine Hébert,
de l'Université du Québec à Montréal,
Marie-Hélène Gagné souligne que la violence
vécue en dehors du milieu familial a une influence plus
forte que celle vécue dans la famille sur la revictimisation
dans les relations amoureuses. En d'autres termes, la victime
d'harcèlement sexuel ou de violence physique émanant
d'un chum court de fortes chances de revivre le même
type de violence dans le futur.
Enfermées dans un monde
Pour en arriver à cette conclusion, les chercheures
ont administré un questionnaire à 917 adolescentes
dont la moyenne d'âge était de 16 ans. Les jeunes
filles provenaient de cinq écoles de Québec et
de Montréal. Les chercheures ont concentré leurs
analyses sur les 622 jeunes filles qui avaient affirmé
avoir entretenu une relation amoureuse au cours des 12 derniers
mois. "Par le biais des réponses données par
les participantes à l'enquête, nous avons découvert
que 33 jeunes filles avaient vécu de la violence de la
part du même partenaire, explique Marie-France Gagné.
Pour 24 d'entre elles, cette violence avait eu lieu à
l'intérieur d'une relation à long terme. Pour un
autre groupe de 43 jeunes filles, la violence avait été
infligée par des partenaires différents."
"Loin de nous l'idée d'affirmer que la violence
familiale n'a pas d'influence sur la victimisation, souligne
Marie-Hélène Gagné. Mais il n'en demeure
pas moins que la violence que vivent certaines jeunes filles
à l'extérieur du milieu familial, en l'occurrence
dans une relation amoureuse, risque de les enfermer dans un monde
dont elles auront beaucoup de difficultés à émerger.
Quand on sait que le taux de victimisation augmente à
mesure que les femmes vieillissent, le phénomène
est très inquiétant."
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