Des lois à resserrer
Rien n'est parfait au pays de la protection
des droits de la personne
par Renée Larochelle
La réalité du petit camelot québécois
qui se lève à six heures tous les matins pour livrer
le journal a beau être à des années-lumière
de celle du petit Indien qui travaille 12 heures par jour dans
une manufacture de tapis pour survivre, il n'en demeure pas moins
que le Québec doit parfaire ses lois en matière
de protection contre le travail des enfants. Par exemple, aucune
mesure spécifique n'est prévue pour limiter la
durée de travail des enfants au Québec, sans compter
qu'une simple signature parentale suffit à ce qu'un enfant
de 13 ans ou moins puisse travailler. Enfin, l'âge minimum
d'admission à l'emploi, fixé à 14 ans, ne
concorde pas avec celui de la scolarité obligatoire, qui
est de 16 ans.
Ce sont ces problèmes et ces incohérences contenus
dans la Loi sur les normes du travail qu'a soulevés l'étudiante
au doctorat en droit et avocate Tanaquil Burke, lors d'une Journée
d'étude organisée par la Chaire de recherche du
Canada en droit de l'environnement, le Groupe de recherche sur
les aspects juridiques internationaux et transnationaux de l'intégration
économique (AJIT) et l'Association des étudiantes
et étudiants des 2e et 3e cycles en droit de l'Université
Laval (ADDUL). Claire L'Heureux- Dubé, juge à la
retraite de la Cour suprême du Canada, présidait
cette journée dont la première partie était
consacrée à la protection internationale des droits
de la personne.
Pour pallier le flou juridique entourant le travail chez les
enfants au Québec, Tanaquil Burke privilégie l'instauration
d'une loi qui interdirait à tout enfant âgé
de moins de 14 ans de travailler. "Je ne parle pas des tâches
ménagères que l'enfant accomplit chez lui pour
aider ses parents ou encore d'activités de gardiennage,
a affirmé la juriste, mais de toute forme de travail plus
dangereux, comme par exemple la manipulation d'outils agricoles
ou même la livraison de journaux à la porte des
résidences, où un enfant risque de se voir infliger
des morsures par un chien agressif. Une chose est certaine: il
faut encadrer le travail des enfants pour mieux les protéger."
Un trafic payant
Ayant complété un mémoire de maîtrise
en droit international sur la prévention et la répression
de la traite d'êtres humains, Sara Deck a pour sa part
souligné que de quatre à cinq millions de personnes
dans le monde feraient annuellement l'objet de trafic, la plupart
étant des femmes exploitées à des fins de
prostitution. Dans certaines régions d'Asie, ce type de
commerce générerait d'énormes revenus, encore
plus élevés que ceux découlant du trafic
de la drogue. Citant l'exemple de la France "où 90
% des prostituées sont des étrangères arrivées
au pays par des voies clandestines", Sara Deck croit que
si des ententes internationales comme le Protocole de Palerme,
signé en 2000, contiennent des principes capitaux comme
l'impossibilité juridique pour ces femmes d'être
traitées comme des criminelles ou encore l'accès
pour les victimes à une aide médicale, psychologique
et matérielle, il y a encore loin de la théorie
à la pratique.
"Dans la réalité, les pays se heurtent à
divers obstacles, a révélé Sara Deck. Le
manque d'effectifs pour arrêter les trafiquants et les
proxénètes, ajouté aux faibles moyens mis
en place pour accueillir les femmes, compliquent la tâche.
En fait, il existe une sorte d'indifférence chez les gouvernements
face à la prostitution, comme s'ils ne se sentaient pas
véritablement concernés par ce problème."
|
|