Dans le sens du bois
Voyage au pays de la géométrie
et de l'espace à la Galerie des arts visuels
par Pascale Guéricolas
"C'est une expérience visuelle." Le photographe,
peintre et sculpteur Alexandre David ne veut surtout pas que
l'on fasse dire à ses oeuvres autre chose que ce qu'elles
sont, soit des tableaux sous forme de constructions en contreplaqué
non peint, conçus comme un ensemble de volumes, d'arêtes
et de lignes. "Nous vivons dans la culture du commentaire,
tout est ramené au langage. Cela ne m'intéresse
pas de faire la même chose en art. Je ne cherche pas à
transmettre de représentation du monde", précise
ce chargé de cours à l'École des arts visuels.
Une fois ce principe bien compris, la balade au milieu des trois
oeuvres exposées à la Galerie des arts visuels
jusqu'au 6 février prochain devient un voyage au pays
de la géométrie et de l'espace.
Depuis son plus jeune âge, Alexandre David vit un crayon
à la main. Ses chiens, son chat, les bâtiments qu'il
croise et ses proches se retrouvent fréquemment dans son
carnet de dessins et sont ses sources d'inspiration pour réaliser
ses tableaux. Parvenir à créer des volumes de grandes
dimensions en bois qui prennent l'allure de boîtes est
donc une façon d'inviter les autres à pénétrer
dans l'univers spatial de cet amoureux de l'architecture. D'autant
plus que de grands rectangles ou certaines formes rappellent
immédiatement des éléments connus. Telle
tablette pourrait facilement être une marche, tel angle
droit aurait pu devenir une table, tandis que cette verticale
ressemble furieusement au drapé d'une nappe. De telles
références à l'univers du quotidien distinguent
donc les oeuvres du sculpteur de celles d'artistes partisans
d'un art minimal dans les années soixante, puisque ces
derniers tentaient d'éviter tout lien avec la réalité
connue.
"Lorsqu'on regarde mes oeuvres en trois dimensions, on passe
constamment d'un objet physique à un dessin mental. C'est
un peu la même démarche lorsqu'on suit un plan dans
sa tête avant d'effectuer un trajet dans la rue, indique
Alexandre David. Le regard suit les plans, les volumes, ce sont
des dessins mentaux qu'on reconfigure dans son esprit."
Se définissant comme "un créateur très
lent", le sculpteur, qui a notamment exposé au Musée
d'art contemporain de Montréal ainsi que dans plusieurs
centres d'artistes et galeries, met parfois plusieurs années
à produire un tableau. Il dessine énormément,
réalise des maquettes en carton pour souvent découvrir
que les angles imaginés ne fonctionnent plus avec du contreplaqué.
Parfois, aussi, la longueur ou la largeur d'une tablette ne lui
semble plus appropriée une fois celle-ci coupée
et vissée, et il lui faut alors défaire la structure.
De la même façon, il tente de faire coïncider
les veines et les noeuds des différentes lattes de bois
utilisées, même si le dessin de fond ne l'intéresse
que modérément. En fait, tout comme les vis apparentes,
ces veinures participent à l'oeuvre sans que l'artiste
ne s'arrête vraiment à leur signification ou à
l'impression qu'elles pourraient produire. L'important demeure
la vision d'ensemble."
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