
Famille recomposée, rôle de composition? Le mythe du beau-parent méchant et cruel tend lentement à disparaître par Renée Larochelle Les mythes ont la vie dure et celui du beau-parent méchant et cruel est encore bel et bien présent dans notre société. Certes, l'image de la marâtre qui bat sa belle-fille en se délectant des cris de douleur de sa victime fait presque partie de notre folklore. Notre imaginaire est de plus entaché de ces histoires mettant en vedette un enfant ayant maille à partir avec le parent qui s'est ajouté à la famille. En témoignent les représentations négatives que véhiculent les films, les spectacles et les médias sur les beaux-parents qui sont les parents pauvres de la famille recomposée.
C'est l'un des aspects qu'a abordé Claudine Parent lors du colloque portant sur la vie familiale après la séparation des parents qui a eu lieu récemment sur le campus. Organisée par les chercheurs du JEFAR (Centre de recherche sur l'adaptation des jeunes et des familles à risque), la rencontre réunissait des intervenants du milieu travaillant au quotidien avec des parents et des jeunes vivant la réalité de la famille recomposée. Pour les fins de sa recherche, Claudine Parent, professeure au Département des sciences humaines de l'Université du Québec à Chicoutimi, a analysé 24 articles provenant du journal Le Soleil et de revues dites populaires publiées au Québec entre 1999 et 2002. "Mon beau-père, ce tueur" "Prenons par exemple la critique d'un film racontant l'histoire d'un jeune garçon qui assiste à un meurtre commis par son beau-père, a expliqué Claudine Parent. Intitulée "Mon beau-père, ce tueur", la critique fait ressortir le caractère franchement stéréotypé des personnages où le beau-père, véritable incarnation du Mal, affronte dans une scène finale le Bien, personnifié par le père biologique. En contribuant à alimenter le mythe du méchant beau-parent, ce genre de production ne fait pas seulement guider les perceptions et les attentes des gens vis-à-vis des beaux-parents, elle affecte aussi les perceptions qu'ont les beaux-parents d'eux-mêmes, leur rendant du même coup l'exercice de leur rôle plus difficile."
Des chercheurs avancent que si les frères Grimm ont transposé les mères en belles-mères dans leurs contes, c'est peut-être qu'ils estimaient que personne n'accepterait qu'une mère abuse, abandonne ou néglige ses enfants, de faire valoir Claudine Parent. Une chose est certaine: ces contes de la littérature jeunesse ont largement contribué à renforcer l'image négative des beaux-parents. Aujourd'hui, certains films, opéras rock ou articles d'opinion vont dans le même sens en continuant à présenter des images très négatives des beaux-parents. " Plusieurs hypothèses ont été avancées pour expliquer le fait que les beaux-parents soient aussi mal vus et si peu valorisés dans la société et dans les écrits, affirme Claudine Parent. Certains chercheurs croient que les beaux-parents ont été utilisés dans les contes ou dans les récits pour adultes comme mécanisme d'exorcisme afin de lutter contre les turpitudes de la condition humaine. Ils deviennent donc les vilains de l'histoire, c'est-à-dire des figures pouvant être haïes de tous, alors que l'image du bon parent est préservée."
Depuis quatre ou cinq ans toutefois, le beau-parent occuperait de moins en moins un mauvais rôle dans les récits destinés aux jeunes. Le beau-père serait présenté comme un éducateur responsable, tandis que la belle-mère serait davantage à l'écoute des enfants. En somme, la situation s'améliorerait pour tout le monde.
"Au Québec, des signes d'évolution positive concernant les beaux-parents se font sentir, note la chercheure. Le fait de pouvoir trouver des cartes d'anniversaire pour les belles-mères en est un. La série télévisée Virginie, dans laquelle l'héroïne est décrite comme une belle-mère responsable et attentionnée envers sa belle-fille, en est un autre. Tout cela préfigure des représentations plus positives ou, à tout le moins, plus réalistes des beaux-parents." 
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