
Dentistes et humanistes
Cinq étudiants ont effectué un stage humanitaire
cet été auprès des défavorisés
de Bolivie
À cur vaillant rien d'impossible, pourrait-on dire. Vers
la fin de l'hiver dernier, Anne-Marie Barussaud et neuf de ses
confrères et consoeurs, tous étudiants de troisième
année au doctorat en médecine dentaire, ont appris
une bien triste nouvelle. Le stage humanitaire au Paraguay auquel
ils prévoyaient participer cet été était
annulé à cause de problèmes de politique
intérieure dans ce pays. "Cinq d'entre nous se sont
alors virés de bord, raconte Anne-Marie Barussaud. Nous
avons monté un autre projet par nous-mêmes et nous
avons trouvé le financement."
Grâce aux contacts d'Anne-Marie Barussaud, les étudiants
ont trouvé un pays de remplacement en Amérique
du Sud: la Bolivie. "J'ai étudié au Collège
Jésus-Marie, dit-elle, et les religieuses de cette communauté
sont présentes en Bolivie, notamment à Anzaldo,
un petit village situé à 2 800 mètres d'altitude."
La clinique dentaire d'Anzaldo
À la mi-juillet, Anne-Marie Barussaud, Danielle Poirier,
Andréa Picard, Martin Delisle et Christine Sauvé,
de même que le dentiste Robert Bouclin et le technicien
Michel Tardif, se sont installés dans deux locaux du Centre
de réadaptation nutritionnelle infantile d'Anzaldo.
En deux semaines, environ 150 patients ont été
traités à cet endroit, pour la plupart des enfants
de plus de six ans provenant d'écoles situées dans
un rayon d'une dizaine de kilomètres du village. Une salle
servait à entreposer l'équipement, l'autre local
servait de clinique dentaire. L'équipement fourni par
l'Université Laval comprenait deux fauteuils dentaires
portatifs, une génératrice à essence, un
compresseur et des instruments. Des sociétés du
domaine dentaire avaient fourni lampes frontales, produits anesthésiques,
gants chirurgicaux ainsi qu'un stock d'environ 200 brosses à
dents.
La semaine précédant les traitements, l'équipe
de Laval avait fait la tournée des écoles de la
région immédiate. Environ 400 diagnostics avaient
été posés. "Les enfants n'ont pas d'hygiène
buccale, par exemple, ils n'utilisent pas de brosse à
dents", souligne Anne-Marie Barussaud.
Parcourant des routes de roche et de terre sinueuses, un chauffeur
au volant d'un véhicule prêté par les religieuses
d'Anzaldo allait chercher les cas prioritaires et les ramenait
dans la journée. En tout, 200 extractions de dents et
200 plombages ont été effectués à
la clinique. Les journées de travail étaient longues:
de neuf heures du matin à huit heures du soir. "À
Laval, on apprend à traiter des enfants et à faire
de la chirurgie en quatrième année, indique Anne-Marie
Barussaud. La troisième année est seulement théorique.
Mais comme nous sommes vraiment bien formés, je me sentais
prête, les autres aussi, pour ces deux tâches."
Un choc linguistique
Ce complément de formation pratique crédité
a duré trois semaines. Il s'est déroulé
dans un contexte particulier où la pauvreté est
omniprésente. Où même la langue pose problème
puisque les habitants de la région ne parlaient pas espagnol,
mais bien la langue des anciens Incas, le quéchua. "Le
chauffeur ainsi qu'une infirmière du Centre de réadaptation
agissaient comme interprètes", raconte Anne-Marie
Barussaud.
Le contact avec les enfants fut marquant. "Ils sont attachants,
dit-elle. Ils ont une vie difficile et ils sont plus tranquilles
que les enfants d'ici. Ils étaient très gentils,
obéissants, coopératifs. Certains, qui avaient
entendu parler de nous, ont marché pendant cinq heures
pour venir nous voir. On ne pouvait pas les refuser." Selon
Anne-Marie Barussaud, participer à une mission humanitaire
fait prendre conscience de ce que signifie aider vraiment les
gens. Et cela donne le goût de continuer en ce sens. "Nous
avons tous dit que nous serions prêts à accompagner
d'autres étudiants dans un projet semblable", explique-t-elle.
YVON LAROSE
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