
"Personne n'écoute les chercheurs"
Le nouveau président de l'Acfas, Marc-André
Sirard, veut que cette association devienne le porte-voix des
chercheurs auprès des décideurs et de la population
Lorsque le nouveau président de l'Association francophone
pour le savoir (Acfas), Marc-André Sirard, a accepté
de se joindre à l'équipe de direction de l'auguste
institution, il y a deux ans, il ne réalisait pas un vieux
rêve, loin de là. "Quand on m'a contacté,
j'ai été très critique envers l'Acfas. Je
trouvais que ça ne marchait pas fort, que le congrès
avait de moins en moins de pertinence, que les étudiants
présentaient devant des salles vides. J'ai été
très surpris de me faire répondre que, justement,
on cherchait des gens comme moi qui voyaient les problèmes
et qui souhaitaient que les choses changent!"
Accepter un poste au bureau de direction de l'Acfas, c'est signer
un contrat de quatre années: deux à la vice-présidence,
une à la tête de l'organisation et une comme président
sortant. Professeur au Département des sciences animales,
directeur du Centre de recherche en biologie de la reproduction,
titulaire de la Chaire de recherche du Canada en génomique
fonctionnelle appliquée à la reproduction animale,
cofondateur de TGN Biotech, adepte de triathlon et père
de famille, Marc-André Sirard avait pourtant des journées
bien remplies. Mais il a tout de même dit oui.
Son engagement dans l'Acfas ne se nourrit pas de nationalisme
scientifique, ni du souci de ménager une place au français
en sciences. "Je crois tout simplement qu'il est important
que notre culture d'éducation française fasse une
plus grande place à la science. Il faut faire comprendre
aux décideurs et à la population que la science
est l'un des paramètres importants de l'équation
d'une société basée sur l'économie
du savoir." S'il a accepté de s'engager dans l'Acfas,
c'est d'abord parce qu'il considère que cette organisation
a le potentiel pour devenir la voix indépendante utilisée
par les chercheurs pour faire valoir leur opinion auprès
des décideurs politiques. "Présentement, personne
n'écoute les chercheurs", déplore-t-il.
Ses trois travaux
Dans un an, lorsqu'il passera le flambeau à son successeur,
Marc-André Sirard espère avoir changé trois
choses dans cette organisation, vieille de 80 ans. Premièrement,
les chercheurs saisiront mieux l'utilité de l'Acfas et
ils s'en serviront pour faire connaître leurs positions
et pour faire valoir leurs revendications. "Je suis bien
conscient que ce changement ne se fera que très progressivement",
admet-il toutefois.
Deuxièmement, une formule mieux adaptée aux spécificités
des sciences exactes aura été implantée
au congrès. Les présentations s'insèreront
dans des colloques thématiques connus dès novembre,
étudiants et patrons y présenteront leurs résultats,
des colloques transdisciplinaires favoriseront les échanges
entre les scientifiques de différents horizons et la population
sera invitée à davantage de conférences
publiques en soirée. Ces changements entreront d'ailleurs
en vigueur dès le congrès de 2004 qui aura lieu
à l'UQAM. Troisièmement, l'Acfas aura obtenu des
fonds fédéraux pour la promotion des sciences auprès
des jeunes. "La science est une aventure extraordinaire,
mais malheureusement les jeunes s'en désintéressent.
C'est très inquiétant pour l'avenir et l'Acfas
doit faire quelque chose pour renverser cette tendance."
JEAN HAMANN
|