
LE COURRIER
HOMMAGE à Roger Chamberland (1956-2003)
Entré à l'Université Laval comme étudiant
en 1975, Roger Chamberland ne l'a jamais quittée par la
suite. Il y a obtenu tous ses diplômes et y a exercé
toute la gamme des fonctions de formation, ayant été
successivement auxiliaire d'enseignement et de recherche, chargé
de cours, professionnel de recherche, professeur subventionnel,
puis engagé comme professeur régulier en 1992.
Dans l'exercice de ces multiples responsabilités, il a
développé un très grand sens de l'institution.
Roger Chamberland aura toujours su nous étonner par la
diversité de ses intérêts et par sa créativité.
Quelques-uns des titres de ses publications définissent
dans l'espace et dans le temps ce personnage, certes bien connu,
mais pas toujours dans l'ensemble de ses facettes. Ces titres
ont valeur de symbole et ils illustrent au mieux sa conception
de la vie et le sens de ses engagements.
Roger avait intitulé la communication qu'il devait donner
à Dublin en octobre prochain " Le monde comme obstacle
et les failles du je lyrique ". Ces mondes poétiques,
cinématographiques, musicaux et chansonniers qu'il a si
vaillamment oeuvré à construire dans les champs
littéraires et culturels, il voulait les offrir en partage
aux milieux savants, au grand public instruit, lecteurs du Québec
français ou comme participant actif au projet de création
d'une maison de la littérature à Québec,
aux étudiants qu'il encadrait à la maîtrise
ou au doctorat, comme aux jeunes qui fréquentaient la
bibliothèque municipale de Saint-Romuald à laquelle
il a fait de nombreux dons de livres.
Sa dernière publication de conséquence, une remarquable
introduction à l'Anthologie de la poésie québécoise
a été publiée dans le cadre des Grandes
Fêtes de l'université Laval. Faisant référence
à Québec et à un poème de Paul Chamberland,
ce bondissement de comète annonçait, de
façon quasi prémonitoire, son parcours avec nous,
trop tôt et trop brutalement interrompu. Mais il est significatif
de noter que le seul extrait de poème - de Gaston
Miron - qu'il a retenu dans cette présentation se termine
ainsi:
Je ne suis pas revenu pour revenir,
Je suis arrivé à ce qui commence.
Le titre de sa préface à un ouvrage de Claude Péloquin
livre également une esquisse de sa vision de la vie: mercenaire
de l'éternité. Mercenaire, Roger s'est engagé
sans compter dans ses fonctions d'administrateur, de chercheur,
d'enseignant et de services à la collectivité.
Sa générosité et ses passions, toujours
traduites en actions, illustrent la force et la profondeur de
ses convictions, sa haute conception de l'institution universitaire.
Roger Chamberland a investi des énergies considérables
dans la poursuite de l'idéal de la mission universitaire.
Animé d'une soif insatiable de découvrir, d'innover
et de faire partager le savoir, il s'est intéressé
à toutes les facettes des études culturelles. Il
avait amorcé la réunion de plusieurs disciplines
dans la conception d'un programme de formation novateur destiné
aux futurs étudiants de premier cycle à l'Université
Laval. Généreux par profession et dans ses valeurs,
il encadrait une vingtaine d'étudiants à la maîtrise
ou au doctorat. Promoteur de son département et de sa
discipline, il avait été récemment élu
pour un deuxième mandat à la direction de son Département
des littératures. Avec ses collègues et le support
inconditionnel de son personnel, il avait entrepris avec autant
de passion une modernisation et une harmonisation du fonctionnement
du Département, tant par la réunion des secteurs
que par le développement d'ententes internationales.
Si Roger possédait le sens de l'institution, celle-ci
peut le lui rendre aujourd'hui, parce que l'institution s'inscrit
dans la pérennité. La force d'une institution c'est
de poursuivre l'uvre entreprise. Les étudiants de son
équipe de recherche par exemple contribueront, à
leur tour et dans la même foulée, à l'approfondissement
des connaissances. Les collègues, animés d'un semblable
désir de développement et de transmission du savoir
s'intéresseront aux nouvelles tendances de la recherche,
en prise sur les préoccupations des jeunes et du présent.
Le personnel poursuivra, avec une empathie inspirée par
celle que Roger leur prêtait naturellement, son attention
à l'encadrement et à la réussite des étudiants.
Voilà le sens de l'institution et le grand dessein de
la vie: se nourrir des valeurs de l'ami et les perpétuer
à travers les nôtres.
JACQUES MATHIEU
Doyen de la Faculté des lettres
Le 16 juin 2003
Quelques conseils à nos nouveaux diplômés
Le conseil du vieux sage Polonius offert au jeune Hamlet
était le suivant: "Ne soit ni emprunteur, ni prêteur".
Comme il n'est pas très actuel, voici donc, à l'intention
de nos nouveaux gradués, quelques autres conseils que
je crois plus pertinents.
- Il est fortement recommandé de faire un stage post-gradué
pour obtenir un diplôme supérieur et renforcer vos
connaissances.
-Faire un stage post-doctoral est une expérience très
utile qui permet au chercheur de se détendre, un an ou
deux, après une période intensive de travail pour
terminer le doctorat. C'est une période de réflexion
et de véritable liberté académique.
- Changer son domaine de recherche aux dix ans permet d'avoir
un travail toujours intéressant et motivant.
- Ne pas essayer d'approfondir son travail de recherche à
un point tel que l'on connaît tout de rien.
- Approcher votre recherche avec une perspective historique.
Qui a déjà travaillé sur le sujet? Pourquoi?
Ces personnes ont-elles réussi ou échoué?
Et pourquoi?
- Ne pas rester seul dans votre "tour d'ivoire". Voyager
et participer aux conférences apporte d'énormes
bénéfices, quelquefois inattendus.
-Toujours garder un registre de votre travail, la mémoire
est une faculté qui oubli. Produire des rapports annuels,
de participation à des conférences, de voyage,
et ce, même s'ils ne sont pas requis par votre employeur.
- Essayer d'expliquer votre travail concrètement de façon
à ce qu'une personne non experte puisse vous comprendre.
- Au moment de rédiger un rapport, soyez bref sans détruire
le sens de vos propos et soyez descriptif sans être redondant.
- "Une image vaut mille mots" dit le dicton. Les photos
sont très utiles pour se rappeler un phénomène,
un procédé, une personne ou un évènement.
Elles vous permettront de transmettre de l'information rapidement.
- Connaître une ou plusieurs langues étrangères
est un atout. Comme il est plus facile d'apprendre quand on est
jeune, profitez de votre jeunesse pour étudier les langues.
- Faire fortune ne doit pas être un but. La réussite
apporte ses propres récompenses.
- Lorsque vous cherchez une solution à un problème,
ne vous référez pas à un seul ouvrage. Vous
serez surpris de constater qu'il y a autant de solutions qu'il
y a d'auteurs pour traiter un même sujet.
FATHI HABASHI
Professeur émérite, Faculté des sciences
et de génie
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