À la recherche des murs disparus
Une étude archéo-architecturale fait le point
sur les vestiges dégagés lors de fouilles au domaine
Maizerets
De 1986 à 1999, plusieurs chantiers archéologiques
se sont déroulés au domaine Maizerets, un parc
urbain d'une superficie de 27 hectares situé dans le quartier
Limoilou à Québec. Dans le cadre de son chantier-école,
l'Université Laval y a mené quatre campagnes de
fouilles printanières entre 1996 et 1999. "Les interventions
faites par les archéologues de Laval ont mené,
entre autres, à la mise au jour de plusieurs fondations
de murs appartenant à divers bâtiments, des vestiges
architecturaux érigés sous le régime français",
indique Steve Douville, dont le mémoire de maîtrise,
terminé il y a quelques mois, fait la synthèse
archéologique des fouilles menées au domaine Maizerets.
"Les fouilles, dit-il, ont permis de constater que ces murs
avaient été construits en plusieurs étapes
et représentaient diverses occupations du site."
Un emplacement recherché
Selon Steve Douville, la datation au carbone 14 d'échantillons
de bois prélevés lors des fouilles révèle
une présence humaine, donc amérindienne, sur le
site dès le 15e siècle. Le premier occupant européen
de l'endroit est un colon du nom de Simon Denys qui s'y installe
en 1652. En 1697, François Trefflé et Thomas Doyon
achètent ces terres pour y aménager une véritable
ferme. Ce dernier signe même un contrat de maçonnerie
prévoyant la construction d'une habitation complétée
par une grange et une étable. Mais dès 1705, le
Séminaire de Québec se porte acquéreur des
terrains et bâtiments. Il restera propriétaire du
site jusqu'en 1979.
Le bâtiment principal du domaine actuel est érigé
entre 1711 et 1713. D'abord appelée maison de la Canardière,
cette construction devient par la suite le château Maizerets
en raison de ses dimensions imposantes. Incendié et reconstruit
à trois reprises, agrandi en deux autres occasions, il
voit son architecture d'origine se modifier au fil du temps.
"En 1987, des fouilles ont révélé la
présence, dans le sous-sol du bâtiment, de vestiges
que l'on interpréta comme étant ceux de la première
maison construite par le Séminaire après leur prise
de possession du site", explique Steve Douville.
Une construction de 46 mètres de long
De nouvelles dépendances, soit une grange, une étable
et une écurie, sont construits au 18e siècle. L'ensemble
forme éventuellement un bâtiment unique de 46 mètres
sur 10 à la toiture de planches et aux divisions internes
multiples. Selon Steve Douville, on sait maintenant que le secteur
de la grange en bois a été occupé de façon
continue de 1697 à nos jours. Les fouilles ont permis
de mettre au jour trois niveaux de construction sous la grange
en bois actuelle. "Un premier niveau, souligne-t-il, est
constitué d'un mur fait de pierres des champs datant du
régime français. Plus tard, on construisit sur
ce mur un bâtiment fait de pierres taillées, des
pierres carrées plutôt que rondes. Un troisième
niveau repose sur ce mur de pierres taillées, soit une
semelle de béton sur laquelle on construisit la grange
en bois actuelle."
En 1759, diverses cartes indiquent à cet endroit la présence
de trois constructions entourées d'une enceinte. Ce mur,
explique Steve Douville, aurait pu être une enceinte de
pierre. "Toutefois, dit-il, une telle enceinte de maçonnerie
aurait laissé des vestiges importants qui n'ont pu être
identifiés lors des fouilles. Nous pouvons donc affirmer
qu'il s'agissait plutôt d'une palissade de pieux."
Agricole jusqu'au 20e siècle, la fonction du domaine Maizerets
s'enrichit entre temps d'un volet éducatif et récréatif.
Colonie de vacances à partir de 1932, l'endroit devient
un terrain de camping en 1967. Dans les années 1930, le
domaine compte une douzaine de bâtiments, dont une chapelle
et une forge. Nouveau propriétaire du site en 1979, la
Ville de Québec effectue plusieurs travaux de terrassement
et de réfection des bâtiments. Réaménagé,
le domaine comprend notamment des sentiers pédestres,
une piste cyclable, une piscine, un arboretum, une scène
extérieure et un jardin horticole. En 2002, la Commission
de la capitale nationale se porte acquéreur de l'endroit.
YVON LAROSE
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