Du lait comme ça vous plaît!
De petits ajouts au régime alimentaire
du troupeau produisent des changements vachement spectaculaires
à la composition du lait
Jusqu'à tout récemment, les seuls éléments
de choix qui s'offraient aux consommateurs en matière
de lait avaient trait au taux de gras et au type d'emballage.
Si l'ère du lait "à la carte" n'est pas
encore arrivée, elle approche cependant à grands
pas, à en juger par les récents travaux de l'équipe
du professeur Yvan Chouinard, du Département des sciences
animales.
Lors du colloque du Centre de recherche en sciences et technologies
du lait, qui avait lieu les 28 et 29 avril à Québec,
l'équipe du professeur Chouinard a présenté
les résultats de trois expériences concluantes
de contrôle alimentaire de la ration, menées sur
le plancher des vaches.
Dans la région de Drummondville, 12 propriétaires
de ferme ont accepté d'ajouter de l'huile de soya au régime
normal de leur troupeau pendant huit semaines. Le volume de lait
produit et sa composition en protéines n'ont pas été
affectés par ce changement, a constaté l'étudiante-chercheure
Nathalie Plourde. Par contre, le contenu en matières grasses
du lait a diminué de 19 % chez les vaches qui ont reçu
1 litre d'huile de soya par jour. Plus intéressant encore,
le contenu en acide linoléique conjugué (ALC) -
un type de gras qui préviendrait le cancer, l'artériosclérose,
le diabète et même l'obésité! - a
augmenté par un facteur de 2,6.
Les chercheurs ont aussi évalué l'effet de l'ajout
d'ALC dans la ration de vaches de huit fermes situées
dans les régions de Beauce et de Bellechasse. Ces molécules
aux étonnantes vertus étaient servies sous forme
de sels de calcium d'ALC pour éviter leur dégradation
dans l'estomac de la vache. Là encore, ce supplément
n'a produit aucun effet négatif sur la production de lait
ou de protéines, signale l'étudiante-chercheure
Rachel Gervais. Côté positif, la production de matières
grasses a chuté, jusqu'à 34 % dans certains cas,
la teneur en matières grasses a diminué jusqu'à
29 % et la proportion de bons acides gras a augmenté,
tout cela sans que la santé des vaches n'en souffre.
Enfin, au Lac-Saint-Jean, l'équipe d'Yvan Chouinard a
ajouté 2 kg de graines de lin, une source importante d'acides
gras oméga-3, au menu quotidien de huit vaches laitières.
Ces acides gras auraient un effet préventif important
sur les maladies cardiovasculaires - chez l'humain, bien sûr!
-, mais le Canadien moyen en consomme très peu. Le test
s'est avéré concluant puisque le contenu en acide
linolénique oméga-3 a doublé dans le lait
des vaches qui ont consommé le lin torréfié
ou micronisé, a constaté l'étudiante-chercheure
Marilou Laprise.
"Ces expériences laissent entrevoir la possibilité
de développer des outils efficaces qui permettront aux
producteurs laitiers de contrôler la composition du lait
acheminé aux usines de transformation", conclut le
professeur Chouinard. Et le plus beau de l'affaire est que, contrairement
aux OGM et au clonage, la modification du régime alimentaire
de la vache ne risque pas de provoquer de levées de boucliers!
JEAN HAMANN
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