À couper le souffle!
Plus de 20 % des athlètes d'élite souffriraient
d'asthme, dont plusieurs d'entre eux à leur insu
Près de 7 % athlètes présents aux Jeux
Olympiques de Sydney ont déclaré, certificat médical
à l'appui, souffrir d'asthme. Du coup, ce verdict autorisait
ces quelque 600 personnes à prendre des médicaments
contenant des produits dopants interdits par le Comité
international olympique (CIO). "Parfois, on dirait que les
Jeux Olympiques sont devenus des jeux pour malades!", avait
alors déclaré, peu compatissant et très
sceptique, le prince Alexandre de Mérode, président
de la Commission médicale du CIO. "Personnellement,
ça m'étonne qu'il n'y en ait pas plus", déclare
le chercheur Louis-Philippe Boulet du Centre de recherche Hôpital
Laval. La prévalence d'asthmatiques dans la population
est d'environ 10 % et tout indique qu'elle est encore plus élevée
chez les athlètes d'élite. Il y a beaucoup d'asthmatiques
qui s'ignorent chez les sportifs de haut niveau."
De plus en plus d'indications portent à croire que la
pratique intensive de certaines activités physiques contribue
à l'apparition de l'hyperréactivité bronchique,
un état qui peut conduire à l'asthme, rapportent
Jean-Bruno Langdeau et Louis-Philippe Boulet, dans une récente
édition de la revue scientifique Respiratory Medicine.
Les deux chercheurs ont passé en revue une vingtaine d'études
réalisées à travers le monde sur la question
de la prévalence de l'asthme chez les athlètes.
Cet exercice leur a permis de démontrer que la prévalence
des diagnostics d'asthme établis de façon subjective
par des médecins ou par les athlètes eux-mêmes
(à l'aide d'un questionnaire auto-administré) se
situe à moins de 10 %. Par contre, lorsque le problème
est évalué à l'aide de méthodes objectives
(variation du volume pulmonaire maximum avant et après
exercice, test d'histamine ou de méthacholine), elle dépasse
les 20 %. "Chez les athlètes, comme dans la population
en général, le recours à des méthodes
diagnostiques subjectives conduit à une sous-estimation
des problèmes respiratoires", concluent les deux
chercheurs.
Le système respiratoire, tout comme les articulations,
peut se dérégler chez les athlètes qui s'entraînent
intensivement, avance Louis-Philippe Boulet. "Lorsqu'un
nageur passe six heures chaque jour à respirer l'air chargé
de chlore d'une piscine ou qu'un skieur de fond inhale de l'air
à - 25 degrés Celsius, parfois au rythme de 200
litres à la minute, ça cause un stress terrible
aux bronches. Ces personnes sont plus à risque d'hyperréactivité
des bronches et d'asthme et elles doivent demeurer aux aguets."
Si le taux de 7 % d'asthmatiques parmi les athlètes olympiques
apparaît plausible à Louis-Philippe Boulet, le chercheur
n'écarte pas la possibilité que certains athlètes
bien portants recourent à des médicaments qui dilatent
les bronches dans l'espoir d'améliorer leurs performances.
"C'est pour cette raison qu'il est important d'établir
le diagnostic d'asthme à l'aide de méthodes objectives
qui ne laissent pas planer de doute sur les intentions des athlètes."
JEAN HAMANN
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