Des pharmaciens docteurs?
Un programme de doctorat professionnel permettrait de mieux
préparer les futurs pharmaciens aux nouveaux défis
de la profession
D'ici dix ans, les nouveaux pharmaciens qui entreront sur le
marché du travail pourraient bien être docteurs...
en pharmacie bien sûr! En effet, les deux universités
du Québec qui forment des pharmaciens -l'Université
Laval et l'Université de Montréal - élaborent
présentement un programme qui conduira au doctorat professionnel
plutôt qu'à l'actuel baccalauréat en pharmacie.
"Il s'agit là d'une évolution normale de la
profession, pas d'une révolution", a précisé
la vice-doyenne de la Faculté de pharmacie de l'Université
de Montréal, Claude Mailhot, lors du Congrès "Médicaments,
pharmacie et société", qui avait lieu la semaine
dernière à Québec.
Présentement, 85 collèges américains offrent
ce programme qui comprend, en moyenne, 150 crédits de
formation. "Les programmes de baccalauréat de Montréal
et Laval ont respectivement 142 et 128 crédits, a souligné
la vice-doyenne Mailhot. Les crédits manquants touchent
surtout les stages et les cours de gestion. La marche n'est donc
pas très haute entre nos programmes et le doctorat professionnel."
Le programme de premier cycle conduisant au doctorat professionnel
en pharmacie s'échelonnerait sur quatre ans, comme l'actuel
programme de bac. Il placerait les étudiants du Québec
au même niveau que les étudiants américains
et il contribuerait à la valorisation de la profession
de pharmacien, estime Claude Mailhot. "Les étudiants
en pharmacie seraient mieux formés, ajoute la doyenne
de la Faculté de pharmacie de l'Université Laval,
Monique Richer. Les facultés rapatrieraient la gestion
des stages, ce qui permettrait un meilleur encadrement des étudiants
et une uniformisation de la formation pratique."
L'échéancier préliminaire prévoit
que les premiers étudiants de ce programme seront admis
à l'automne 2005, de sorte que les premiers détenteurs
de doctorat professionnel en pharmacie commenceront à
pratiquer en 2009. Les deux universités songent déjà
à offrir un programme destiné aux pharmaciens en
pratique qui souhaiteraient parfaire leur formation pour obtenir
le nouveau diplôme. Mais il y a encore loin de la coupe
aux lèvres, prévient la doyenne Richer. "C'est
l'Ordre des pharmaciens qui va déterminer si le doctorat
en pharmacie est une condition d'entrée à la pratique.
Il faudra ensuite obtenir l'aval de la CREPUQ et du ministère
de l'Éducation, ainsi que les fonds nécessaires
pour mettre le programme en marche. Ça pourrait être
plus long que prévu." Une chose est cependant certaine,
les deux facultés de pharmacie ont l'intention de tenir
ferme la barre en direction du doctorat professionnel.
Beaucoup d'appelés...
En 2002, la Faculté de pharmacie de Laval a choisi
147 nouveaux étudiants parmi les 1 000 demandes d'admission
qu'elle a reçues. À Montréal, 1 500 candidats
se sont disputé les 170 places disponibles. Dans les deux
facultés, les candidats en provenance des cégeps
sont évalués uniquement sur la base de leur cote
de rendement général. Pourrions-nous faire mieux?,
s'interroge-t-on dans les deux facultés. Le processus
de sélection des futurs représentants de la profession
ne pourrait-il pas tenir compte des qualités de communicateur,
de l'analyse critique, du jugement, du professionnalisme, de
la motivation et des autres qualités qui font le bon pharmacien?
Marie-Claude Binette, de la Faculté de pharmacie de l'Université
de Montréal, a dressé le bilan des démarches
effectuées depuis plusieurs mois pour identifier LE test
qui réussirait ce prodige. Si aucun ne s'est révélé
le remède à tous les maux, sa faculté a
tout de même décidé d'accorder une pondération
de 15 % au test de Profil d'admission de l'étudiant, dès
l'automne 2003. Ce test consiste à répondre par
écrit à cinq ou six questions portant sur la motivation,
la démarche qui a conduit l'étudiant à choisir
la pharmacie et au professionnalisme.
À Laval, la Faculté de pharmacie n'entend pas suivre
Montréal dans cette voie, du moins pas tout de suite.
"Nous réfléchissons à la question,
mais nous conservons le même processus pour les admissions
de l'automne 2003, avise Monique Richer. Nous étudions
cependant la possibilité d'utiliser le test de la Faculté
de médecine (Appréciation par simulation) parce
qu'il permet de bien évaluer la capacité de communiquer
des candidats. C'est l'un des problèmes les plus courants
que nous avons identifiés chez nos étudiants. Certains
sont surpris d'apprendre qu'il faut être capable de bien
communiquer lorsqu'on est pharmacien. Pourtant, c'est une qualité
fondamentale dans notre profession."
JEAN HAMANN
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