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21 novembre 2002 ![]() |
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Contrairement à ce qu'on craignait, le lac Saint-Charles ne serait pas victime de vieillissement prématuré. Des chercheurs du Centre d'études nordiques (CEN) en ont fait la preuve en appelant, à la barre des témoins, les communautés de diatomées - des algues microscopiques - qui ont peuplé le lac Saint-Charles, au cours des 150 dernières années. | ![]() |
Ces mêmes témoins avaient cependant une toute autre histoire à raconter en ce qui concerne l'évolution d'un plan d'eau agonisant, le lac Saint-Augustin.
Les diatomées sont des algues unicellulaires dont la coque de silice finement ouvrée est caractéristique de l'espèce. "En étudiant les fossiles de diatomées contenus dans une carotte de sédiments, on peut reconstituer l'abondance relative de chaque espèce à une époque donnée", explique Reinhard Pienitz, du Département de géographie. Cet exercice permet d'établir indirectement l'évolution des conditions physico-chimiques du lac au fil du temps, puisque chaque espèce de diatomées a ses préférences à ce chapitre. Les données ainsi obtenues permettent aux chercheurs d'avoir une perspective historique de l'évolution du lac, qui remonte bien au delà des premières études scientifiques réalisées il y a à peine 20 ans.
Archives biologiques
Roxanne Tremblay, Stéphane Légaré, Reinhard
Pienitz et Warwick Vincent du CEN, et leur collègue Roland,
Hall de l'Université de Waterloo, ont ainsi établi
que depuis 1850, le plus important événement survenu
dans la vie du lac Saint-Charles a été la construction,
en 1934, du barrage qui a servi à stabiliser l'apport
en eau potable de la ville de Québec. Ce barrage a fait
grimper de près de 2 mètres le niveau du lac, ce
qui a entraîné l'inondation des berges, provoquant
du coup d'importants changements dans les caractéristiques
physico-chimiques des eaux.
Malgré ces bouleversements, aucune espèce de diatomée
indicatrice d'un enrichissement en éléments nutritifs
n'a encore vu son abondance croître et aucune espèce
typique de lac eutrophe (stade avancé de la vie d'un lac)
n'a fait son apparition, soulignent les chercheurs dans un récent
numéro de la Revue des sciences de l'eau. "Nos
données démontrent qu'il n'y a pas eu d'accélération
du processus d'eutrophisation engendrée par les activités
humaines depuis 50 ans", souligne Reinhard Pienitz.
Pourtant, la population qui habite à proximité
du lac a doublé entre 1976 et 1995, passant de 6 000 à
13 000 personnes, et le secteur a été victime de
déforestation. "Si le lac vieillit normalement, c'est
sans doute en raison de sa bonne gestion, avance le professeur
Pienitz. Depuis 1960, une loi oblige les résidants des
berges à posséder une fosse septique. De plus,
les embarcations à moteur et la baignade y sont interdites."
Vieil oncle mourant
Les diatomées du lac Saint-Augustin, un plan d'eau
situé en zone urbaine, racontent une toute autre histoire.
Les chercheurs Karine Roberge, Reinhard Pienitz et Sylvain Arsenault
ont pu établir un lien étroit entre certaines activités
humaines (utilisation accrue d'engrais, urbanisation du pourtour,
déforestation) et la prolifération d'espèces
de diatomées indicatrices de vieillissement accéléré.
"Si on gérait le lac Saint-Augustin comme le lac
Saint-Charles, il serait possible de ralentir ce vieillissement
et même d'améliorer l'état actuel du plan
d'eau, soutient le professeur Pienitz. Le processus n'est pas
irréversible, mais il faudrait apporter d'importants changements
dans la gestion du lac pour renverser la tendance."
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