21 novembre 2002 |
L'étudiant encadré
Je suis de tempérament colérique; je m'indigne
contre tout, parfois sans raison, parfois pour meubler le silence.
J'aime apporter mon opinion sur chaque nouvelle lue ou entendue
pendant la journée mais, en toute sincérité,
cette même opinion peut souvent être révisée
ou carrément abolie selon ce qu'on m'apprend ensuite. Des
virages à 180 degrés, j'en ai fait plus d'un et
je suis d'avis que le fait de changer d'opinion ne fait pas d'une
personne un être sans cervelle ou sans capacité de
penser par elle-même: elle démontre toute l'importance
que cette même personne accorde aux deux côtés
de la médaille. Une opinion avec preuves à l'appui
peut parfois devenir mienne si je la considère sensée,
juste et véridique. À cet avis, et ce, sans tenir
compte qu'un parti est meilleur ou plus intéressant qu'un
autre, est-ce par le même principe que plusieurs personnes
vantent maintenant le parti démocratique de Mario Dumont,
alors qu'il se trouvait dans l'ombre il y a quelques mois?
Mais ce pourquoi je m'indigne aujourd'hui n'a aucun lien avec
la politique. Ma colère vise particulièrement l'étudiant
d'aujourd'hui, celui des années 2000 quoi! Qu'a-t-il fait,
cet étudiant? (Et j'aimerais rappeler que je suis aussi
une étudiante, et loin de moi l'idée de me mettre
en rogne contre moi-même... j'en ai plutôt contre
la minorité qui ternit l'image des autres, et non pas contre
la généralité.)
La réalité semble me donner raison, et pour cause:
de nos jours (je devrais plutôt dire "dans mes cours"),
l'étudiant, au nom de la liberté d'expression je
suppose, explique à l'enseignant COMMENT donner son cours,
COMMENT formuler ses notes pour que ce soit plus simple, COMMENT
fabriquer son examen, en ajoutant plus ou moins de questions dites
"par cur" pour alléger l'étude... un sundae
avec ça? Comme si ce n'était pas assez, il n'en
finit plus d'ajouter que les lectures sont plates, que l'examen
était trop difficile, que le cours est ennuyeux...
COME ON!!! J'aimerais rappeler que nous sommes à l'université,
le dernier échelon avant le marché du travail, la
dernière porte vers le monde extérieur! À
L'UNIVERSITÉ, oui. Si nous étions au secondaire,
je comprendrais que nous avons encore besoin d'encadrement et
ne me donnerais pas la peine d'écrire ce texte, mais à
l'âge où nous sommes rendus, il y a longtemps que
l'encadrement est une discipline personnelle propre à chacun.
À l'université, comme au cégep (oui! oui!
ce n'est pas nouveau tout ça), il y a une démarche
d'enseignement faite par le professeur et une autre faite par
l'étudiant; ce dernier devrait avoir compris qu'il doit
être autonome, qu'il n'est qu'une personne parmi des centaines
dans un même local, que l'enseignant ne sera pas assis à
côté de lui pour lui montrer quelles notions sont
les plus importantes. Enfin, à quoi servent ces années
passées au cégep, sinon pour apprendre différentes
méthodes à l'application d'un programme pré-
universitaire? Quelques-uns ne semblent pas comprendre que l'université
est un investissement pour la vie, qu'il ne suffit pas de mettre
le pied à son cours pour développer des aptitudes,
que tout ne sera pas mastiqué à leur place!
En vérité, je voyais l'université beaucoup
plus pénible qu'elle ne l'est en réalité.
Mais il n'y a pas que les étudiants dans tout cela: parfois,
les enseignants semblent oublier que nous avons atteint la majorité.
Encore une fois, ne généralisons pas. Mais spécifier
à ses élèves de prévoir la "pause-pipi"
avant le début d'un examen, c'est plutôt embarrassant.
Serait-ce le fait d'être en première session, les
"bébés" de l'université, qui justifierait
ces propos?
Finalement, nous pouvons nous compter chanceux que plusieurs professeurs
spécifient les lectures, notes et extraits vidéos
comme étant matière à examen; mais, de notre
côté, qu'est-ce qui nous empêche d'être
curieux et de s'intéresser plus profondément aux
sujets vus en classe? Où est la culture personnelle dans
ce cas-là? Le petit bout de chemin à faire par
soi-même?
Questionnons-nous: les enseignants devraient-ils être plus
sévères et omettre de mastiquer l'information pour
l'étudiant? Ressemblent-ils maintenant à un format
télévisuel qui envoie tous les messages dont nous
avons besoin sans qu'on ait à lever le seul petit doigt?
Se pourrait-il que je sois seulement trop abrutie pour me taire
devant cette nouvelle méthode qui semble plaire à
l'ensemble? À suivre...
Musak au complexe Desjardins-Pollack
Dans l'une de ses toutes premières éditions
du trimestre, le 29 août dernier, le Fil publiait
une lettre ouverte sous la plume d'un certain Louis-Émile
Gélinas. Celle-ci dénonçait la piètre
qualité musicale qui prévaut aux pavillons Desjardins-Pollack.
"Ah..." me suis-je alors dit, dans un grand soupir de
soulagement. Enfin quelqu'un qui se rebiffe contre la médiocrité
ambiante. Or, deux mois et demi plus tard, rien n'a changé:
on nous prend toujours pour des attardés intellectuels
qui ne connaissent rien d'autres que les plus insignifiantes productions
musicales angloétatsuniennes. Charmante université.
Comme il serait agréable pourtant de se voir entraînés,
voire cajolés, le jour durant (et même en nocturne)
dans une ambiance de bon goût (classique, semi-classique,
la belle chanson française et québécoise,
des pièces instrumentales plus populaires aussi, bien sûr,
et même de la chanson américaine ...s'il le faut.
Mais de grâce: pas n'importe quoi). Mais non. On préfère
nous casser littéralement les oreilles, l'esprit et le
cur avec du "lirage" et du "criage". In
English please, and only!
Comment un univers civilisé comme celui qui en principe
prévaut au sein d'une université, a fortiori s'il
s'agit rien moins que du symbole nord-américain du haut-savoir
d'expression française, peut-il sombrer dans une déchéance
semblable? Ce peut paraître bien peu a priori, mais à
devoir supporter tout le jour, tous les jours, semaine après
semaine, mois après mois, année après année,
pareil climat de travail et/ou d'étude, il faut admettre
que c'est à devenir un tantinet schizophrène. D'ailleurs,
je constate à mon corps défendant que je donne moi-même
de plus en plus dans le "retrait du monde": il m'en
faut désormais beaucoup, en effet, pour sortir de mon bureau.
Et quand je dois procéder, je quitte le pavillon immédiatement.
Baladeur sur les oreilles. Pas question de me laisser déprimer
par ces lieux. Aussi j'évite, autant que faire se peut,
les multiples accès, la cafétéria au premier
chef (il est vrai que le café y est tellement faible, médiocre
et de mauvaise qualité que je puis m'abstenir sans trop
de remords. Mais voilà déjà autre chose).
Collègues de la communauté universitaire, sommes-nous
tous devenus des zombies dignes du "Meilleur des mondes"
pour accepter passivement de la sorte de nous faire empaler tout
à la fois l'intelligence et le sens esthétique?
À croire que nous donnons carte blanche à Toronto,
New York ou Los Angeles pour ce qu'il est séant d'écouter
au Québec, à Québec, à Laval University...
Le pavillon central que constitue les pavillons Desjardins et
Pollack offre décidément une atmosphère qui
s'apparente à celle qui règne dans le premier supermarché
venu ("aveugle d'oreilles" d'égale façon
au sens culturel profond d'une pareille non-décision de
"colonisés", s'il faut dire les choses crûment)
sinon à l'hôpital psychiatrique d'"Un vol au-dessus
d'un nid de coucous".
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