18 avril 2002 |
L'été prochain, Michèle Auger ira magasiner
en Suisse et au Colorado. Pas question ici d'une banale virée
de lèche-vitrine, puisque la professeure du Département
de chimie aura près de 1 million de dollars en poche pour
payer ce qu'elle désire. Les grandes boutiques qui l'attirent
là-bas sont celles des meilleurs fabricants mondiaux de
spectromètre à résonance magnétique
nucléaire (RMN). "On n'achète pas un appareil
de ce prix-là sur Internet, commente-t-elle avec pragmatisme.
Nous allons nous rendre sur place et tester les spectromètres
avec nos propres échantillons afin de déterminer
s'ils répondent à nos besoins spécifiques."
Le petit bijou que recherche Michèle Auger - un appareil
RMN -état solide de 400 MHz - viendra prendre la relève
du vénérable 300 MHz, installé au Département
de chimie il y a dix ans. "La durée de vie du 300
MHz est de 15 à 20 ans, mais cet appareil est limité
par rapport aux nouveaux modèles. Si nous voulions suivre
le rythme de la recherche dans ce domaine, il fallait pouvoir
tirer profit des possibilités offertes par les appareils
plus récents."
Il y a quelques mois, Michèle Auger et ses collègues
Géraldine Bazuin, Mario Leclerc, Michel Pézolet,
Robert Prud'homme, Anna-Marie Ritcey, Normand Voyer (Chimie),
Serge Kaliaguine (Génie chimique) et Bernard Riedl (Département
sciences du bois et de la forêt) ont donc adressé
une demande au programme de subvention pour installations majeures
du CRSNG afin de moderniser leur équipement. Résultat:
l'organisme fédéral vient de leur accorder 750 000
$. Le FCAR verse pour sa part 100 000 $ dans la cagnotte et l'Université
ajoute 10 % au montant des subventions reçues.
La résonance magnétique nucléaire est une
puissante technologie qui permet d'obtenir des données
sur la structure des molécules en étudiant le comportement
des atomes dans un champ magnétique. Les travaux que mène
l'équipe de Michèle Auger dans le cadre des activités
du Groupe de recherche en biophysique et RMN de l'état
solide et du Centre de recherche en sciences et ingénierie
des macromolécules, portent sur les membranes biologiques
et leurs interactions moléculaires. "Nous tentons
de comprendre le fonctionnement des membranes dans plusieurs phénomènes,
notamment dans l'action de certaines drogues", explique-t-elle.
Cette quête a notamment conduit à des études
sur les cardiotoxines extraites de venin de serpent et sur des
nanoparticules, fabriquées à partir de membranes
de globules rouges, en vue de leur utilisation comme système
de largage des médicaments.
Trois autres appareils
Le petit monde de la RMN semble en ébullition au pays
depuis deux ans. "Les chercheurs du Québec et du Canada
ont réalisé qu'ils accusaient un retard sur le plan
de l'équipement, ce qui les rendaient moins compétitifs,
constate-t-elle. On s'est réveillés et on a décidé
de faire des demandes de groupe. Les subventions de la Fondation
canadienne pour l'innovation (et l'appariement des provinces)
ont beaucoup aidé." Et comment! Michèle Auger
est associée à trois autres projets d'acquisition
d'appareils RMN, financés par la FCI et par ses partenaires.
Le premier appareil, un 600 MHz-état liquide de 1,2 M$,
a été obtenu il y a 18 mois par un groupe de chercheurs
de l'Université, piloté par Normand Voyer. Le second,
un 600 MHz-état solide qui sera installé à
Montréal, coûtera 1,5 M$ et sera utilisé par
quatre chercheurs du Québec. Enfin, Michèle Auger
compte parmi les dix chercheurs canadiens qui utiliseront un RMN-état
solide de 900 MHz, unique en son genre au Canada, qui sera installé
à Ottawa. Coût: 12 M$. "Il semble qu'on pourra
effectuer les manipulations à distance, par le biais d'un
lien Internet haute vitesse, sur les échantillons que l'on
aura acheminés à Ottawa", avance la chercheure.
L'équipe de Michèle Auger compte présentement
cinq étudiants-chercheurs et, malgré l'expansion
du parc d'appareils, elle ne prévoit pas agrandir son équipe.
"Assurer la supervision de cinq ou six étudiants est
un rythme qui me convient bien, dit-elle. Le but visé est
simplement de faire en sorte que chaque étudiant-chercheur
ait accès à des appareils grâce auxquels il
pourra réaliser de nouvelles expériences et acquérir
une formation comparable à celle dispensée dans
les universités américaines bien équipées."
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