Les glaciers de l'île Bylot battent en retraite
Les glaciers battent en retraite
Échaudé par le réchauffement
climatique, le glacier central de l'Ile Bylot rentre la langue
Si on en juge par le recul des glaciers,
le réchauffement climatique serait un fait indéniable
et mesurable dans l'Est de l'Arctique. Deux chercheurs du Centre
d'études nordiques l'ont clairement démontré
en établissant que le glacier C-79, situé sur l'Ile
Bylot, reculait de plus de 20 mètres par année
depuis quatre décennies.
L'étudiant-chercheur Olivier Piraux et le professeur
Michel Allard du Département de géographie ont
reconstitué les mouvements d'un glacier alpin de la cordillère
arctique de l'Ile Bylot - le glacier C-79 - au cours des quarante
dernières années.
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Pour y arriver, ils ont d'abord établi, à
l'aide de données GPS, la position du front du glacier
lors de l'été 2001. Par la suite, grâce à
des photographies aériennes datant de 1958, 1982 et 1990,
ils ont suivi le déplacement de la langue glaciaire. "Les
analyses ont révélé que le glacier avait
reculé de 17 à 35 mètres par an entre 1958
et 2001, signale Olivier Piraux. Le recul s'est accentué
à partir des années 1980, alors qu'il a augmenté
d'environ 40%, pour atteindre 25 à 50 mètres par
an."
Au fil des millénaires, l'Ile Bylot a connu plusieurs périodes
glaciaires et interglaciaires, signale l'étudiant-chercheur.
L'île est présentement couverte d'un glacier central
d'où émanent plusieurs langues glaciaires, dont
le glacier C-79 qui s'étale sur une vingtaine de kilomètres
de longueur par 2 kilomètres de largeur. Plusieurs facteurs
conditionnent l'avancée et le retrait des langues glaciaires,
mais le climat est nettement le plus important, explique-t-il.
"La réponse d'un glacier aux changements climatiques
n'est cependant pas instantanée. Le temps de réaction
peut varier d'un an à un siècle. Le recul que nous
avons mesuré peut donc résulter du réchauffement
qui a suivi le Petit âge glaciaire, à partir de 1850,
ou celui, plus récent, que l'on attribue à l'activité
humaine."
Si le glacier C-79 recule, c'est que sa fonte surpasse l'accumulation
de neige, en dépit du fait que, sur Bylot, l'hiver dure
285 jours et que la température moyenne annuelle y est
de -14 degrés Celsius. Les glaciers sont de bons indicateurs
de l'évolution du climat, signale Olivier Piraux. Dans
le contexte du réchauffement climatique anticipé,
il serait pertinent d'observer et d'analyser leur comportement
dans l'Arctique canadien. "Les régions polaires comptent
parmi les milieux où les impacts d'éventuels changements
climatiques seraient les plus néfastes sur l'environnement",
ajoute-t-il.
Le troisième rapport national sur les changements climatiques,
déposé la semaine dernière à Ottawa,
signale d'ailleurs que l'écologie du Grand Nord canadien
est en péril en raison du réchauffement climatique.
Dans l'ouest de l'Arctique, la température a grimpé
de 1,5 degré Celsius depuis 40 ans, provoquant une diminution
de l'étendue et de l'épaisseur de la glace, ainsi
qu'une érosion de la côte.
JEAN HAMANN