25 janvier 2001 |
Il n'y a pas de sable dans l'engrenage de la compagnie Silicycle.
La jeune entreprise de Québec, spécialisée
dans la fabrication et la régénération de
gels de silice, a le vent en poupe. Démarrée modestement
au début des années 1990 par Luc Fortier, un diplômé
du Département de chimie, et par Hugo Saint-Laurent, un
diplômé de génie chimique, Silicyle compte
maintenant 30 employés et la compagnie réalise 80%
de son chiffre d'affaires à l'étranger. "J'ai
accepté de venir vous rencontrer pour vous montrer que
ça vaut la peine de croire en ses idées", a
lancé Hugo Saint-Laurent, aux 250 personnes qui participaient
au 5e Forum provincial Carrière en chimie, présenté
sur le campus le 19 janvier.
Silicycle a germé dans la tête de Luc Fortier, qui
trouvait dommage de jeter le gel de silice, un produit utilisé
pour la chromatographie dans les laboratoires de recherche et
d'analyse. L'étudiant en chimie réalise donc son
projet de fin d'études sur la régénération
de ce produit et les résultats qu'il obtient le convainquent
du potentiel commercial de l'idée. Il installe donc son
premier laboratoiredans son appartement. Arrive Hugo Saint-Laurent.
"Nous nous étions donnés rendez-vous à
la Bibliothèque scientifique un samedi matin, dit ce dernier.
Je me souviens que j'ai dû lui donner un dollar et que j'ai
signé un papier qui m'interdisait de parler du projet à
quiconque. Peu après, nous avons ouvert notre deuxième
laboratoire, dans le cabanon de mes parents cette fois!"
Vaches maigres
Suit une période de vaches maigres pendant laquelle
les deux compères, qui s'y connaissent peu en affaires,
éprouvent beaucoup de difficulté à trouver
du financement pour leur entreprise. "Personne ne comprenait
ce qu'était la chromatographie et ce que l'on faisait exactement
comme produits", raconte Hugo Saint-Laurent. Ils se tournent
alors vers Entrepreneuriat Laval où ils apprennent les
rudiments du monde des affaires. "On a utilisé leurs
services au maximum et ça a été essentiel",
dit celui qui siège aujourd'hui au conseil d'administration
de l'organisme. En 1995, ils incorporent leur compagnie et, la
même année, ils remportent deux prix de 2500$ chacun
au concours d'Entrepreneuriat-Laval. L'argent est aussitôt
réinvesti dans le développement de la compagnie,
qui s'installe dans l'incubateur du CREDEQ. "En juin 1996,
on a réalisé notre première vente et notre
chiffre d'affaires annuel a atteint 6000$."
Progressivement, ils industrialisent leurs procédés,
délaissant la cuisinière électrique, les
fours micro-ondes et les marmites à blé d'Inde pour
de l'équipement mieux adapté. Leur chiffre d'affaires
grimpe à 31 000$ en 1997, mais les investisseurs se font
toujours tirer l'oreille. Ils font alors leurs premières
tentatives à l'étranger. "Je me souviens d'une
exposition qui a eu lieu à Boston et où aucun client
ne semblait intéressé. Nous ramassions tous les
carnets de notes et les crayons qui étaient distribués
gratuitement pour ne pas revenir les mains totalement vides. Pour
économiser des frais d'hôtel, nous avions même
dormi dans notre auto."
Actions capitales
Le vent tourne finalement en 1998, alors que la Caisse de
dépôt du Québec et d'autres investisseurs
achètent pour 800 000$ de capital-actions de Silicyle.
"C'est là que j'ai reçu ma première
paye en quatre ans, signale Hugo Saint-Laurent. Notre chiffre
d'affaires a monté rapidement et je ne le ne dévoile
plus maintenant, parce que ça ne fait plus rire",
dit-il avec un large sourire.
Aujourd'hui, la silice régénérée ne
représente plus que 20% des ventes de Silicycle. L'entreprise
offre plus de 50 produits différents et elle explore de
nouveaux marchés comme les tamis mésoporeux. En
septembre dernier, l'entreprise lançait les deux premiers
produits industriels mésoporeux au monde. Ces produits
ont été mis au point grâce aux licences d'exploitation
que Silicycle détient sur deux brevets déposés
par les professeurs Serge Kaliaguine du Département de
génie chimique et Laurent Bonneviot du Département
de chimie. Les tamis moléculaires mésoporeux sont
des filtres qui permettent d'isoler des molécules. Les
experts leur prédisent un bel avenir en pétrochimie,
en pharmaceutique, en microélectronique, en environnement
et dans plusieurs autres domaines industriels.
Silicycle prévoit construire une nouvelle usine et porter
son personnel à 80 d'ici l'an 2003. Elle n'est pas seule
à convoiter les diplômés en chimie, si on
en juge par les 18 exposants présents au 5e Forum. "Plusieurs
d'entre eux affichaient des ouvertures de postes, signale l'un
des organisateurs, François Otis. L'objectif de notre événement
est justement de favoriser l'établissement de contacts
directs entre les futurs chimistes et les professionnels provenant
des différentes sphères de la chimie."
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