11 mai 2000 |
Photo Marc Robitaille |
Le programme de maîtrise en aménagement du territoire et développement régional (ATDR) a fourni cette année un terrain d'expérimentation de taille à ses étudiants de deuxième année de maîtrise: la Rive-Sud de l'agglomération de Québec. Pendant plusieurs semaines, des équipes de cinq ou six étudiants du Département d'aménagement de l'Université Laval ont en effet arpenté "l'autre côté du fleuve" pour mieux comprendre, notamment, le fonctionnement de l'innovation dans les entreprises, les effets de la réforme municipale sur ce coin de territoire, ou la façon d'y développer le tourisme. Fin avril, ils présentaient le fruit de leurs travaux devant leurs camarades et quelques fonctionnaires très attentifs aux idées de ces étudiants.
L'étude de l'équipe du Laboratoire d'aménagement et de développement qui s'est penchée sur la situation de Lévis dans un contexte de réforme municipale, semblait d'ailleurs particulièrement d'actualité. À preuve, les étudiants ont dû intégrer à la dernière minute les nouvelles propositions de la ministre des Affaires municipales, Louise Harel, qui n'a fait connaître sa position que trois jours avant la présentation de leur étude. À travers ce projet, les étudiants souhaitaient consolider la position de Lévis dans la région, une ville qui se classe au cinquième rang actuellement par le nombre de ses habitants.
Au fil de leurs réflexions, les étudiants en sont venus à recommander la création d'une superstructure qui regrouperait l'ensemble des municipalités de la région métropolitaine de Québec. Des maires délégués pourraient siéger au sein de ce nouveau conseil qui régirait notamment les transports, l'aménagement du territoire, la gestion et l'assainissement des eaux usées, le tourisme. Selon l'équipe, un tel mode d'organisation favoriserait un développement économique plus harmonieux, et éviterait les gestions forcées.
Fusionner d'abord les voisins
Par ailleurs, les étudiants ont étudié
de près les effets d'une fusion entre Lévis, Pintendre
et Saint-Joseph-de-la-Pointe-de-Lévy. Selon leur analyse,
ces municipalités très liées auraient tout
intérêt à partager leurs services pour une
meilleure gestion, même si on ne peut chiffrer exactement
les coûts du regroupement. Par contre, ils font remarquer
également que la répartition de la dette risque
de poser problème, car les citoyens de Saint-Joseph risquent
de voir leurs taxes augmenter avec la création d'une nouvelle
ville incluant le passif de Lévis. Interrogés par
un fonctionnaire des Affaires municipales sur les méthodes
pour arriver à un consensus sur les fusions pressenties,
les étudiants ont souligné que les subventions conditionnelles
au regroupement pouvaient constituer un fort incitatif, de même
que le rapprochement entre municipalités aux caractéristiques
communes. Ils privilégiaient donc une politique de petits
pas, plutôt que des fusions à grande échelle.
C'est au fond au même genre de conclusion qu'en sont arrivés les étudiants qui ont examiné les facteurs poussant les entreprises manufacturières de la Rive-Sud à innover. Les résultats d'une enquête menée auprès d'une quinzaine d'entrepreneurs les amènent à conclure qu'ils prennent souvent la décision d'innover dans leur production ou dans leurs procédés de fabrication à la suite de remarques formulées par des clients et des fournisseurs. Autrement dit, les divers programmes d'organismes régionaux institutionnels qui proposent du financement à l'innovation, comme le ministère de l'Industrie et du commerce, ou de Développement économique Canada, auraient peu de succès auprès des PME de la Rive-Sud. Ces dernières les sollicitent surtout pour l'aide à l'exportation ou au démarrage.
Les étudiants suggèrent donc dans leur travail d'utiliser davantage les ressources locales, comme le Centre local de développement, pour inciter les entreprises à innover. Le CLD pourrait ainsi produire un guide d'information pour guider les entrepreneurs, adapté aux besoins spécifiques de PME souvent de taille très réduites, spécialisées dans la production de structures métalliques, de plastique ou de bois.
Concilier bac bleu et logement en immeuble
Le même souci de proposer des outils concrets qui font
mouche caractérise l'équipe qui a travaillé
sur les moyens à prendre pour augmenter la collecte sélective
des déchets auprès des résidants de Lévis.
Dans leur étude, les étudiants ont constaté
en effet que le nombre d'utilisateurs du fameux bac bleu plafonne
dans cette ville, même si Lévis se classe au-dessus
de la moyenne québécoise. En analysant les résultats
d'un questionnaire que l'équipe a distribué à
plusieurs centaines de foyers, ils ont remarqué que les
locataires habitants dans des immeubles semblaient les plus réticents
à placer les matières récupérables
dans un bac de recyclage, ainsi que les nouveaux arrivants dans
un logement. Ils suggèrent donc à la municipalité
d'envoyer un dépliant chaque année aux Lévisiens
pour leur rappeler d'utiliser le bac bleu, tout en facilitant
la vie des personnes habitant en appartement. Ces derniers pourraient
ainsi descendre au fur et à mesure leurs matières
recyclables dans des containers collectifs situés au pied
de leur immeuble, sans avoir à les conserver dans leur
appartement.
Une autre équipe s'est penchée, elle, sur le développement touristique de la Rive-Sud, une région surtout associée à une banlieue dortoir, dépourvue d'image touristique forte, et qui subit la concurrence de la Rive-Nord. Pourtant, les étudiants avancent que les excursionnistes auraient tout intérêt à découvrir ce coin de pays, peut-être en complément d'une visite à Québec. Dans cette perspective, il faudrait accentuer les efforts déployés autour du secteur de la Traverse de Lévis pour attirer les visiteurs dans la région, et les inciter à la parcourir avec des circuits touristiques à thème comme l'agrotourisme, ou l'industrie maritime.
Enfin, des stagiaires ont parcouru les méandres gouvernementaux pour comprendre la perception des agriculteurs face à la qualité des eaux de la rivière Le Bras, qui coule dans la région Chaudière-Appalaches. À la suite d'une enquête auprès des propriétaires de fermes dans le bassin versant, croisée avec les données sur les subventions obtenues par les agriculteurs, ils ont constaté que tout en se montrant sensibles à l'importance de la qualité des eaux, ses derniers ne recevaient peut-être pas le financement approprié. Là encore, il faudrait donc affiner l'approche gouvernementale pour qu'elle corresponde davantage aux besoins locaux.
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