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22 avril 1999 ![]() |
Depuis quelques jours, le local abritant la piscine du PEPS joue le rôle d'un écrin renfermant un immense et magnifique bijou aux allures aquatiques. Sur le mur latéral longeant la piscine aux eaux achalandées, se déploie maintenant une imposante uvre d'art aux tons d'azur et de blanc, qui s'étale sur treize surfaces de douze pieds par douze pieds, le tout occupant une longueur totale de deux cents pieds. uvre d'art d'intégration architecturale, environnementale et acoustique, cette série de tableaux, qui recouvre et embellit les treize panneaux d'insonorisation servant à enrayer la réverbération des sons ambiants de la piscine, a été créée à l'issue d'un concours lancé par la Faculté des arts visuels à tous ses étudiants inscrits à la maîtrise.
Panneaux disgracieux
"À la suite des grands travaux d'aménagement
des installations de la piscine entrepris en 1997, nous avons
vite réalisé que les treize énormes et inesthétiques
panneaux d'insonorisation dont était affublé le
mur ouest de la piscine ternissaient grandement la vue d'ensemble",
explique Claude Désy, coordonnateur au Service des
installations et équipements sportifs du PEPS. "Et
puisque les sommes prévues pour les rénovations
n'avaient pas toutes été dépensées,
nous avons pensé allouer - un peu à l'image de la
politique du 1 % qui prévoit que ce pourcentage de la somme
prévue pour la construction d'un édifice public
soit réservé à l'intégration d'une
uvre d'art - un budget de 18 500,00 $ pour la création
d'une uvre artistique conçue selon un thème bien
précis, celui de l'eau et du mouvement de la piscine. Les
projets soumis par les équipes de travail devaient toutefois
respecter plusieurs critères dont deux très importants:
l'uvre devait recouvrir 20 % de la surface de chacun des 13 panneaux
d'insonorisation ou la totalité de ceux-ci et, surtout,
elle ne devait nuire en aucun cas à leur effet d'insonorisation."
Dix projets soumis
Des dix projets soumis au comité de sélection,
c'est à l'unanimité que le projet de Carl-Dave Lagotte,
étudiant à la maîtrise en arts visuels, Guillaume
Desjardins, étudiant au baccalauréat en arts plastiques,
et Éric Lapointe, diplômé en arts visuels
et sculpteur professionnel, a été retenu, en raison,
entre autres, de son originalité, du respect du thème
imposé et de ses méthodes d'installation. "Quand
j'ai entendu parler de ce concours, je me suis tout de suite informé
afin de savoir si les équipes devaient être composées
uniquement d'étudiants", explique Carl-Dave Lagotte.
Et après avoir appris qu'au moins une des personnes devait
être étudiant à la maîtrise, j'ai fait
appel à Éric et à Guillaume, que j'ai eu
la chance de côtoyer durant mes études de baccalauréat.
Nous nous sommes donc lancés tête première
dans cette aventure un peu folle qui nous a tenus occupés
presque à plein temps durant un an."
"Ce qui nous a séduits, c'est sans aucun doute l'ampleur d'un tel projet et les défis que cela représentait, renchérissent pour leur part Éric Lapointe et Guillaume Desjardins. Plusieurs normes devaient être respectée dans le choix de nos matériaux : la résistance aux chocs, aux déchirures, au chlore et à l'humidité, en plus de permettre aux panneaux d'insonorisation de fonctionner à leur pleine capacité."
Un procédé complexe
À la base, les images que les usagers de la piscine
peuvent déjà admirer ont été faites
au moyen d'une technique particulière de l'estampe nommée
monotype au carborundum, procédé qui permet d'obtenir
par impression un exemplaire unique. Le carborundum en poudre
(combinaison de silicium et de carbone utilisé entre autres
comme abrasif), ajouté à une certaine quantité
d'eau sur une plaque de zinc, se maintient en suspension dans
le liquide. Par des gestes rapides et souples, en utilisant leurs
mains en guise de pinceaux, les artistes ont imprimé un
mouvement à la poudre de carborundum et esquissé
ainsi des traînées de particules qui se répartissent
alors au gré des mouvements de l'eau. Une fois imprimées
sur papier, les différentes séquences en noir et
blanc ainsi obtenues ont été triées sur le
volet, numérisées, agrandies puis traitées
à l'ordinateur afin de leur ajouter la couleur bleue et
la texture qui donnent à chacune des images sa dimension
de profondeur et de mouvement. Le produit de ce long processus
de création et de transformation de l'image a été
par la suite imprimé à l'encre sur une membrane
de plastique perforée, afin de préserver l'effet
d'insonorisation des panneaux, à une température
de 300 degrés Farenheit.
"Chacun des treize tableaux est composé de trois bandes de toile de quatre pieds de largeur par douze pieds de longueur, explique Carl-Dave Lagotte. Pendant une semaine, à plein temps, installés sur des échafauds, nous avons cousu à la main les bandes de toile les unes aux autres puis les 26 ourlets qui reçoivent les tiges de fixation. Un travail de moine!"
"Dès le départ, nous avions décidé de couvrir la totalité des panneaux, ajoute Guillaume Desjardins. Et là résidait notre principal défi! Dénicher le matériau qui répondait à toutes les normes qui nous étaient imposées et qui ne nuisait pas à l'insonorisation et trouver un imprimeur utilisant un procédé d'impression qui assurerait la durabilité de l'uvre et qui parviendrait à reproduire nos images sur de très grandes dimensions. Entre les maquettes et la réalité, il faut dire que notre route a été pavée de plusieurs embûches. Tout cela a nécessité une année complète de réflexions et de travail. Mais aujourd'hui, nous en sommes tous très fiers."
Dans les ligues majeures
"Avec un projet d'envergure comme celui-là, nous
pouvons vraiment dire que nous sommes entrés dans les ligues
majeures ", fait remarquer Éric Lapointe. Comme c'est
probablement souvent le cas dans des projets de ce type, nous
avons eu à travailler de concert avec un ingénieur
en bâtiment, avec les autorités d'un lieu public
d'importance, avec des matériaux inusités et des
coûts de fabrication considérables. Nous avons même
dû trouver des commanditaires afin de mener à bien
notre projet, dont l'imprimeur Repro-Graphic de Québec,
entre autres, qui a accepté de nous accompagner dans cette
aventure et qui nous a accordé une commandite d'environ
17 000 $. Je crois que nous avons acquis beaucoup d'expérience
et, surtout, de confiance en nous. Nous n'aurons plus peur de
nous attaquer à d'autres projets de 1 %, ni même
à tout autre projet d'importance."
Ceux qui seraient intéressés à rencontrer les trois jeunes artistes et en apprendre davantage sur eux et sur leur magnifique uvre, peuvent se rendre au vernissage qui aura lieu à la piscine du PEPS, le vendredi 23 avril, à 11 h 30.