26 mars 1998 |
L'Université Laval et l'Université d'État des sciences humaines de Russie unissent leurs forces.
C'est maintenant chose faite: le Centre Moscou-Québec a été inauguré officiellement le 11 mars, à l'Université d'État des sciences humaines de Russie (RGGU). Grâce à l'appui du Centre d'études interdisciplinaires sur les lettres, les arts et les traditions de l'Université Laval (CÉLAT), ce centre interuniversitaire voué à l'étude de la culture québécoise a enfin pignon sur rue dans la patrie de Dostoïevski, avec toutes les lettres de noblesse que ce statut lui confère.
S'étant déplacée pour l'occasion à Moscou, Louise Filion, vice-rectrice à la recherche, a parlé des liens et intérêts communs unissant l'université moscovite et l'Université Laval, lors de la cérémonie marquant l'ouverture du centre russo-québécois: "Comme l'Université d'État des sciences humaines de Russie, l'Université Laval possède un intérêt très ancien et très prononcé pour les études culturelles: elle loge le plus ancien fonds d'archives de folklore du Canada, le premier centre de recherche fondé au Canada pour l'étude de la culture populaire (le CÉLAT) et la plus importante revue de sémiotique visuelle publiée actuellement dans le monde, Visio, disponible dans la bibliothèque du Centre. L'Université Laval loge aussi un programme d'archivistique et les Archives nationales du Québec sur son campus. Nous pouvons d'ores et déjà voir se dessiner la vocation riche et diversifiée de ce centre interuniversitaire."
Échanges de bons procédés
Rappelons qu'en 1994, l'Université Laval et RGGU ont signé
une entente-cadre permettant l'échange d'étudiants, de chercheurs
et de professeurs ainsi que la codirection de travaux de recherche. À
partir de 1996, les échanges d'étudiants se sont multipliés.
C'est à l'invitation de Youri Afanassiev, recteur de RGGU, d'y fonder
un centre russo-québécois que Laurier Turgeon, directeur du
CÉLAT, a frappé à la porte du ministère des
Relations internationales du Québec qui lui a octroyé une
subvention de 50 000 $ destinée à l'organisation matérielle
du Centre Moscou-Québec.
Depuis 1996, plus d'une vingtaine d'étudiantes et d'étudiants du Programme d'études russes de l'Université Laval sont allés poursuivre leur apprentissage de la langue et de la culture russes à RGGU. Responsable du Programme d'études russes de la Faculté des lettres, Alexandre Sadetsky espère que l'établissement en bonne et due forme du Centre incitera de plus en plus d'étudiants de Laval à poursuivre leurs études à RGGU. "Les étudiants ont tellement à gagner en vivant une telle expérience, explique-t-il. Placé sous le signe de l'interaction, le Centre a été créé afin que nos deux peuples, qui ont beaucoup en commun, puissent communiquer. De part et d'autre, il y a beaucoup de connaissances à offrir et à partager." À cet égard, il faut signaler que les étudiants russes ont la possibilité de suivre des cours d'histoire du Québec et de langue française, offerts par des étudiants québécois. En échange, ces derniers sont hébergés gratuitement en résidence.
Dans le cadre de l'ouverture officielle du Centre Moscou-Québec a eu lieu un premier colloque auquel ont notamment participé une vingtaine de professeurs et d'étudiants de 3e cycle de l'Université Laval, à Moscou, les 12, 13 et 14 mars. Sous le thème "Entre globalisme et localisme au Québec et en Russie: pour une sémiologie de l'interculturel", des anthropologues, philosophes, historiens des deux pays ont discuté de sujets aussi variés que les langues autochtones, les problèmes de traduction et la philosophie émanant de l'oeuvre de Dostoïevski, pour ne nommer que ceux-là. But de l'opération: inciter les professeurs québécois et russes à collaborer dans des projets futurs.
Bien que tout semble aller comme sur des roulettes pour le Centre Moscou-Québec, une seule ombre au tableau subsiste: celle du financement. Selon le directeur du CÉLAT, le centre aura besoin d'un budget annuel allant de 25 000$ à 100 000$ pour remplir adéquatement sa mission. "Dans cette optique, il faudrait que l'Université Laval s'implique financièrement dans le projet, insiste Laurier Turgeon. Cette implication serait tout à fait dans l'ordre des choses, le Centre Moscou-Québec contribuant au rayonnement de l'Université à travers le monde."
L'année prochaine, si tout va bien
Inscrite à la mineure en études russes, Katie Gagnon a fait
un séjour d'études de trois mois à RGGU, l'été
dernier. Pour elle, l'expérience demeure inoubliable; en fait, cette
jeune femme qui parle (maintenant) couramment le russe n'a que des bons
mots à l'endroit de toutes les personnes qu'elle a côtoyées.
"Les professeurs ont fait preuve d'une grande disponibilité
à mon égard et se sont toujours efforcés de répondre
avec empressement à mes besoins d'étudiante étrangère,
explique-t-elle avec enthousiasme. Quant aux étudiants russes, ils
se distinguent par leur amabilité et leur générosité.
Je n'avais qu'à exprimer un désir - visiter un parc ou un
musée par exemple - pour qu'on réponde immédiatement
à ma demande. En fait, il m'est impossible de parler de la Russie
sans évoquer cette capacité incroyable qu'ont ses habitants
d'accueillir les gens si chaleureusement."
Qualifant le Centre Moscou-Québec d'"absolument génial", Katie Gagnon considère que l'endroit représente un outil extraordinaire pour faire connaître le Québec, non seulement aux Russes mais également aux étudiants québécois de passage, qui peuvent retourner aux sources, en lisant des ouvrages québécois ou en visionnant des films. "Finalement, il n'y a rien de tel que d'effectuer un séjour à l'étranger pour se rendre compte de ses propres lacunes", laisse tomber Katie Gagnon, qui compte retourner à Moscou afin d'y faire sa maîtrise, l'année prochaine, si tout va bien.