18 septembre 1997 |
Vivre la Belgique pendant cinq mois, c'est ce que nous, Christine Côté et moi, Dave Thomas, étudiants à la maîtrise en génie mécanique, avons eu la chance de faire de février à juin. C'est dans le cadre d'un réseau de coopération initié par le professeur Stanislaw Tarasiewicz, responsable du Laboratoire d'automatisation complexe et mécatronique (LACM), et des laboratoires des États-Unis, de l'Allemagne, de la Pologne, de la France et de la Belgique que nous avons vécu cette expérience. Accueillis par le Laboratoire d'automatique de la Faculté Polytechnique de Mons (FPMs), petite ville pittoresque du sud de la Belgique, nous y avons poursuivi nos recherches, suivi des cours, donné des séminaires et, bien sûr, profité des plaisirs belges et européens.
Les échanges entre le laboratoire belge et le LACM ont débuté en 1993. À la suite d'une entente entre les deux directeurs de laboratoire, un étudiant belge est venu terminer son doctorat sous la direction de M. Tarasiewicz. Suite à cette experience satisfaisante, deux autres étudiants belges venaient, en 1996, travailler à la commande d'un robot mobile, sujet typique du LACM. L'automne dernier, c'était notre tour de construire notre séjour chez nos partenaires belges. Après accord avec le laboratoire d'accueil, l'obtention d'un visa et la recherche de fonds, fournis par M. Tarasiewicz et M. François Léger, on s'envolait le 28 janvier dernier, journée mémorable pour sa tempête.
La plus forte impression que nous retenons de notre passage à la FPMs et son laboratoire d'automatique, c'est un sentiment de coopération et d'enthousiasme démontré sans arrêt par les chercheurs. On était à peine arrivés au "labo" que, déjà, les chercheurs de l'équipe amorçaient les premières discussions et l'on échafaudait des projets afin que la collaboration porte ses fruits. De plus, nous avons observé une grande coopération entre les différents laboratoires. En effet, les postes de professeurs étant attribués par concours aux assistants ayant cumulé plusieurs années d'expériences de recherche et d'enseignement, la compétition y était moins forte et l'entraide plus facile. C'est ainsi que Christine et moi avons trouvé plusieurs personnes ressources dans la Faculté.
Mons, quant à elle, est une ville qui a été fondée au XIVe siècle et qui regorge des charmes de l'époque. Ainsi, la ville est circonscrite par un anneau routier où s'élevaient, à l'époque moyenâgeuse, ses murailles. Elle est n'est construite qu'avec de vieilles pierres, de vieux pavés et nombreuses sont les rues piétonnières. De toute façon, dans une ville d'environ deux kilomètres de diamètre, nul besoin d'une auto. Enfin, que dire de la Belgique et de ses citoyens sinon que c'est un petit pays où les activités et l'actualité bouillonnent et où les gens sont chaleureux, accueillants et, pour la plupart, fort détendus.
Ce séjour de cinq mois en Europe nous a permis d'avancer grandement dans nos recherches, de revenir avec des idées nouvelles, et d'en apprendre beaucoup sur nous-mêmes. Merci à tous ceux qui nous ont permis de vivre ce beau projet, spécialement M. Remy et M. Tarasiewicz.
En 1958, l'ancien président du Ghana, Nkroumah, tint en privé des propos - qui nous semblent aujourd'hui prophétiques - à Patrice Lumumba, alors jeune militant inconnu du Congo. Ce dernier était en visite au Ghana, qui venait d'entrer dans le concert de pays libres d'Afrique noire. Patrice Lumumba, alors ami et confident de Claude Imbert, lui rapporta tout chaud: "Pour nous débarrasser de la tutelle belge, ne vous confiez pas à vos voisins francophones. Les Français ne visent qu'à installer une pseudo-indépendance avec des marionnettes noires. Marchez avec moi l'Amérique nous aidera!... ".
Lumumba est mort. Nkroumah aussi. Mais voici que son rêve est en passe de se réaliser sur l'échiquier africain: les rois et les pays voisins de la République centrafricaine ont échappé à la main française. C'est le tournant le plus significatif de l'Afrique postcoloniale depuis la chute de l'apartheid en Afrique du sud.
L'Amérique nous aidera, mais de quelle aide s'agit-il? Une aide purement empoisonnée. Mobutu, depuis sa prise du pouvoir et avec l'aide des Américains et de leurs alliés pendant 32 ans, a vraiment mis le pays à genoux. La population zaïroise est forcée de quémander une banane chez les voisins, alors qu'elle en a suffisamment chez elle. Le Zaïre est une poule aux oeufs d'or. Sa population constitue une couche des peuples les plus pauvres de la planète. Ces pauvres ne sont-ils pas assis sur un tas d'or, de diamant, de cuivre, etc.?
Face aux enjeux économiques que représente l'ex-Zaïre, les divergences franco-americaines sur la rapidité avec laquelle il était souhaitable que l'ancien président Mobutu abandonne le pouvoir apparaissent aujourd'hui comme une véritable péripétie. En raison de son importance géopolitique et de ses richesses minières, le troisième pays africain par sa taille constitue en effet l'une des cibles commerciales privilégiées pour Washington sur le continent. Voilà pourquoi l'administration Clinton a même pris le risque de favoriser "des seconds Mobutu", après avoir constaté que le premier était déjà mourant.
Laurent désiré-Kabila, dont l'attachement à la démocratie, aux droits de l'Homme et au libre-échange sont au mieux sujets à caution, poursuit un objectif très clair: protéger les intérêts américains comme l'a fait son prédécesseur Mobutu pendant 32 ans de règne, au détriment de la population locale. Les Américains se sont précipités quelques mois avant même qu'il s'auto-proclame président de la République du Congo afin de signer des contrats avec Kabila. À cet égard, on peut se demander en vertu de quelle autorité Laurent Désiré-Kabila était habilité à signer de tels contrats alors qu'il n'était pas le représentant dûment autorisé de la population zaïroise.
C'est triste de voir un pays comme les États-Unis, soi-disant modèle de la démocratie, favoriser la dictature en Afrique. La session parlementaire américaine s'est achevée, fin juillet, sur une question brûlante: quel a été exactement le rôle de l'armée et des services de renseignement américains dans la campagne de Laurent Désiré-Kabila au Congo-Kinshasa ? Tout a commencé par une séance de témoignages, devant la Chambre des représentants, sur la situation des droits de l'Homme au Rwanda, plus particulièrement à l'Est et à Kinshasa. Plusieurs intervenants ont mis en doute la neutralité des coopérants militaires américains présents au Rwanda dès 1997, dans les conflits qui dévastaient les pays voisins. Croyez-vous que Kabila peut aider le Zaïre à se sortir de l'impasse? Comme c'est quelqu'un qui est entré au pouvoir par la même porte que celle que Mobutu avait empruntée, il nous donnera toujours le même résultat. La preuve en est que nous avons appris de sources dignes de foi - provenant des rescapés - que quatre étudiants ont été tués à bout portant et que plusieurs autres ont été blessés lors d'une manifestation contre le gouvernement Kabila.
À vrai dire, le passage des militaires de Kabila, qui ne parlent même pas la langue du pays, est horrible pour la population locale. Mobutu est mort, mais son vent continue de souffler sur le grand Zaïre. Tant que des élection ne seront pas organisées au Zaïre et que les Américains n'auront pas laissé les Zaïrois se choisir librement les dirigeants de leur choix, le peuple zaïrois continuera de souffrir et de quémander la banane chez son voisin.