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17 avril 1997 ![]() |
Métrinord, la première banque de données sur les communautés isolées, comble des trous du gruyère statistique du Nord québécois.
"La couverture statistique du Québec nordique était, jusqu'à tout récemment, un gruyère où il y avait plus de trous que de fromage. Chercher des données valides et comparables pour décrire les réalités socio-économiques boréales était une opération qui rassasiait rarement", caricature Gérard Duhaime, directeur du Groupe d'études inuit et circumpolaires (GÉTIC).
L'existence de pareilles carences étonne considérant le nombre d'organismes publics intervenant dans le Nord. "Malgré tous ces organismes, les thèses et les rapports écrits sur le sujet, à peu près personne ne mesurait les mêmes réalités ou n'utilisait des méthodes concordantes, explique-t-il. Ceci rendait toute comparaison très difficile".
La rareté des données nordiques était une réalité bien connue des chercheurs universitaires. Il y a six ans, les responsables de la recherche sociale chez Hydro-Québec se sont butés, à leur tour, au même problème lorsqu'ils ont voulu mieux connaître les populations des régions éloignées. De cette convergence de problèmes a germé l'idée de constituer une banque de données sur les communautés isolées du Québec. Appuyés financièrement par Hydro-Québec et assistés par la firme Roche, les chercheurs du GÉTIC, Jean-Pierre Garneau, Gérard Duhaime et Paul Charest, ont mis la main à la pâte pour sortir les communautés isolées des limbes statistiques.
Les chercheurs ont donc entrepris de recueillir toutes les données chiffrées disponibles pour décrire, analyser et interpréter la situation socioéconomique des communautés isolées (non reliées au réseau routier). Depuis le milieu des années 1980, à la faveur d'une amélioration de l'administration du Nord, la collecte et la compilation statistique des données se sont grandement améliorées. "Il existait des données valides mais elles étaient dispersées à travers de nombreuses banques de données gouvernementales, dit Gérard Duhaime. Nous les avons réunies, validées et rendues facilement accessibles dans un ensemble informatisé cohérent. Il a fallu six ans de travail pour en arriver à cette banque de données unique, permanente, publique et indépendante sur les communautés isolées du Québec."
Métrinord renferme des données sur 79 localités isolées regroupant une population totale d'environ 60 000 personnes. Ces communautés, dispersées sur tout le territoire québécois, comprennent des villages autochtones du Nord, mais aussi des localités de la Basse-Côte-Nord, de la Haute-Mauricie, de l'Abitibi, de la Minganie, etc. Selon le directeur du GÉTIC, les données contenues dans Métrinord peuvent être d'un précieux secours non seulement pour les chercheurs en sciences sociales et en sciences de la santé mais aussi pour les décideurs publics et les gestionnaires de programmes. Les données peuvent servir à appuyer des décisions touchant l'administration publique ou encore à évaluer les impacts de mesures sociales ou économiques prises dans le passé. Elles permettent aussi de chiffrer les dépenses gouvernementales en santé, en éducation, en logement et autres programmes sociaux dans les localités isolées.
Métrinord corrige une partie du problème des statistiques nordiques mais la valeur de la banque ne peut surpasser la qualité des données disponibles. "Il y a certainement des lacunes notamment au chapitre des activités économiques, admet Gérard Duhaime. Les méthodes utilisées normalement pour établir les différentes indices de performance économique ne sont tout simplement pas applicables dans un contexte nordique. Le gruyère des statistiques nordiques renferme maintenant plus de pâte qu'autrefois mais les trous sont encore très abondants."