17 octobre 1996 |
Si une image vaut mille mots, le titre de l'exposition
que présente Claude Jirar témoigne également de la
démarche de l'artiste. Ce «jeu des différences»
consiste à rapprocher deux formes d'expression artistique - la peinture
et la photo - et à les faire «dialoguer» à l'intérieur
d'un même espace. En fait, ce professeur à l'École des
arts visuels propose des tableaux peints de façon «intuitive»,
auxquels viennent se juxtaposer de grandes photographies ayant subi un traitement
infographique.
La série d'oeuvres picturales qu'il présente consiste en de
grands tableaux construits par l'accumulation de gestes où la matière
pigmentaire est étalée et projetée avec les mains,
dans le respect de l'émotion et de intuition de l'instant. D'ailleurs,
s'il est un mot qui revient souvent dans la bouche de Claude Jirar, c'est
bien celui d'«intuition»: en effet, rien de moins «raisonnées»
(et raisonnables) que ces oeuvres évoquant à la fois l'éruption
de la spontanéité et le jaillissement de l'inspiration. Volcans
en ébullition et fontaines lumineuses sont ainsi reliés par
le fil conducteur de l'effervescence. L'approche est abstraite mais elle
suggère un sens, une structure: «Finalement, c'est une reproduction
de la réalité transformée. Quand je travaille, je suis
dans un état de disponibilité totale. Peu à peu, le
tableau se construit et prend vie, spontanément. Même chose
pour les photos qui ont subi un traitement infographique, alors qu'apparaissent
parfois des images et des formes qui n'étaient pas prévues,
au départ.»
Illusions perdues
À première vue, une oeuvre intitulée Le Parc
de Madurai évoque ainsi la radiographie d'une colonne vertébrale.
En y regardant de plus près, on découvre en son centre des
images faisant songer à des masques ou à des totems africains.
Même chose pour Un grand cri jaillit de sa poitrine,
où l'oeil le moindrement exercé détecte une radiographie
de la cage thoracique. Il s'agit pourtant d'une photo numérisée
en symétrie d'un cours d'eau.
«Chaque tableau est une pièce autonome, révèle
l'artiste. Je tiens à créer des ensembles afin que les éléments
puissent s'exalter les uns les autres. Il y a là un phénomène
d'amplification; chaque élément devient davantage ce qu'il
est, à cause justement de sa différence. En fait, le corps
parle en opposition avec la photo qui elle, constitue une image sophistiquée.
Un point commun unit les oeuvres: l'énergie» Outre ces tableaux
et photos grand format, Claude Jirar présente quatre minuscules clichés
pris en Inde. Démesurément encadrés, ces photos visent
à créer une intimité avec le visiteur, l'obligeant
à devenir voyeur, en quelque sorte.
Dans le futur, l'artiste compte intégrer davantage ces deux moyens
d'expression que sont la peinture et la photo, en appliquant la peinture
directement sur la photo. Il prévoit également revenir à
la couleur, quasi absente de cette exposition dont la palette vibre aux
teintes de la terre... et de la différence.
Les heures d'ouverture sont du mercredi au vendredi, de 9h30 à 16h
et les samedis et dimanches, de 13h à 16h. La Galerie des arts visuels
est située au rez-de-chaussée de l'Édifice La Fabrique,
255, boul. Charest Est.
Renée Larochelle