17 octobre 1996 |
En dépit des avantages maintes fois répétés
du lait maternel pour la santé des enfants, les médecins encourageraient
peu les femmes à recourir à l'allaitement au sein, révèle
une étude menée par l'Équipe de pharmaco-épidémiologie
de l'Université auprès de 306 femmes de la région de
Québec. «Les médecins avaient peu encouragé les
mères, tant durant le suivi de grossesse qu'après l'accouchement,
alors que l'encouragement des infirmières à l'hôpital
était trois fois plus fréquent que celui des médecins»,
rapportent les chercheures Danielle Gilbert et Jocelyne Moisan (Pharmacie)
et leurs collègues du Centre de santé publique de Québec,
Marie-Claire Lepage et Gaston De Serres. Les mères qui choisissent
d'allaiter sont principalement encouragées en ce sens par leur conjoint,
leur mère ou une infirmière de l'hôpital. «On ne
sait pas si les patientes n'ont pas tenu compte de l'avis du médecin
dans leur choix ou si les médecins ne les ont tout simplement pas
encouragées», ajoute cependant Jocelyne Moisan pour préciser
la portée de l'étude.
Ces résultats proviennent d'une enquête menée auprès
de femmes ayant accouché d'un bébé de poids normal
entre mai et septembre 1993. Dans l'ensemble, moins de 60 % des participantes
allaitaient leur enfant au sein. Le mode d'allaitement choisi par les mères
semblait indépendant de leur âge puisque 58 % des 205 jeunes
femmes (18 à 24 ans) et 59 % des 101 mères plus âgées
(34 à 43 ans) avaient opté pour l'allaitement naturel. «Le
médecin traitant n'avait pas eu d'influence sur la décision
du mode d'alimentation pour 75 % des mères jeunes et 81 % des plus
âgées», notent les chercheures dans l'article qu'elles
publient sur le sujet dans la Revue canadienne de santé publique.
Autre fait étonnant, la moitié des mères qui ont participé
à des rencontres prénatales n'ont pas été encouragées
à allaiter par l'intervenante. Enfin, les mères qui avaient
15 ans ou plus de scolarité préféraient, dans une proportion
d'environ deux pour un, l'allaitement au sein plutôt que le biberon.
Les femmes qui allaitaient expliquaient leur choix en fonction des avantages
physiques pour le nourrisson et des avantages psychologiques pour elles-mêmes.
De leur côté, les mères qui optaient pour le biberon
faisaient plutôt valoir la commodité, la fatigue, le stress
et l'anxiété suite à l'accouchement.
La proportion de mères allaitant leur enfant, notent les auteures
de l'étude, demeure bien inférieure à l'objectif de
l'Organisation mondiale de la santé qui recommande que 80 % ou plus
des nourrissons soient exclusivement allaités au sein pendant les
quatre à six premiers mois de vie. «Nos résultats font
clairement ressortir l'importance de favoriser la promotion, la protection
et le soutien de l'allaitement maternel», concluent les chercheures.
Cette année, divers organismes de promotion de la santé ont
profité de la Semaine mondiale de l'allaitement maternel, qui avait
lieu pendant la première semaine d'octobre, pour rappeler les vertus
de l'allaitement naturel. Aliment parfaitement adapté aux besoins
du bébé, le lait maternel offre une protection contre diverses
infections, les otites et les rhumes notamment, le diabète juvénile,
l'asthme, les allergies et le syndrome de la mort subite.
Jean Hamann