16 novembre 1995 |
Sida: le pire de deux mondes
Lorsqu'un protozoaire parasite et le virus du sida se c�toient, il faut s'attendre au pire.
Des chercheurs de la Facult� de m�decine viennent de d�montrer qu'une esp�ce de protozoaire parasite, Leishmania donovani, favoriserait le passage de la forme latente � la forme active du virus d'immunod�ficience humaine (VIH). Cette d�couverte, publi�e dans le num�ro de novembre du Journal of Virology, constitue la premi�re d�monstration du r�le de ce protozoaire comme cofacteur dans la progression du sida.
Selon les auteurs de l'�tude, Richard Bernier, Martin Olivier et Michel Tremblay de la Facult� de m�decine (Centre de recherche en infectiologie du CHUL) et Salvatore J. Turco de l'University of Kentucky Medical Center, cette d�couverte rev�t une dimension particuli�rement importante dans les r�gions du monde o� cohabitent le VIH et le protozoaire puisque leur action combin�e favorise la progression de la maladie vers le stade sida. Leishmania donovani se retrouve dans le bassin de la M�diterran�e, au Moyen-Orient, en Afrique de l'Est, en Am�rique du Sud et en Inde; environ le tiers de la population mondiale vit dans des zones o� le parasite est end�mique. L'Organisation mondiale de la sant� signale qu'environ 500 000 nouveaux cas d'infections caus�es par le protozoaire surviennent chaque ann�e. Au total, il y aurait 15 millions de personnes d�j� infect�es � travers le monde.
Transmis par une mouche
Au cours des derni�res ann�es, les autorit�s m�dicales de France, d'Espagne et d'Italie ont observ�, chez les personnes atteintes du sida, une recrudescence d'infections caus�es par Leishmania donovani . Dans ces trois pays, 50 % des adultes frapp�s par une infection due au protozoaire sont �galement infect�es par le virus du sida.
Leishmania donovani passe une partie de son cycle de vie dans un insecte, le phl�botome ou mouche des sables, qui le transmet aux humains par piq�re. Tout comme le virus du sida, le protozoaire s'attaque aux cellules du syst�me immunitaire. Une fois dans la circulation sanguine, il r�siste aux attaques des globules blancs gr�ce � des mol�cules de lipophosphoglycan (LPG) pr�sentes � la surface de sa paroi cellulaire. En reconstituant in vitro les conditions qui pr�valent lorsqu'un porteur du VIH est infect� par le protozoaire, les chercheurs de Laval ont d�montr� que la pr�sence du protozoaire ou celle de mol�cules isol�es de LPG enclenchait le m�canisme d'activation du VIH. �Lorsque des cellules du syst�me immunitaire sont confront�es au LPG, elles produisent une cytokine (TNF-alpha) qui stimule l'activit� de la transcriptase inverse, une enzyme intervenant dans la multiplication du virus du sida, explique Richard Bernier. Plus la concentration de LPG est �lev�e, plus la cellule produit de TNF-alpha.�
La progression des infections � Leishmania donovani doit �tre suivie avec attention, estime les auteurs de l'�tude. En effet, le protozoaire, en favorisant le passage de la phase latente � la phase active, risque d'acc�l�rer la progression du sida et d'accro�tre le nombre de victimes de cette maladie. Signalons que ce parasite n'est pas le seul cofacteur du sida. D'autres micro-organismes, tels que les virus de l'herp�s et de l'h�patite, peuvent �galement intervenir dans l'�volution de cette maladie.
JEAN HAMANN
-30-