MétissagesQuand l’art et la science se rencontrent par Pascale GuéricolasDe sa formation première de géologue et de géomorphologue, l’artiste Danielle Chapleau a conservé un intérêt marqué pour les beautés de la nature. La lave volcanique, les couches colorées de terre que laissent entrevoir certaines falaises, les vagues que forme le sable dans le désert, les colonnes de pierre qui s’élancent dans le ciel, autant d’éléments qui l’inspirent désormais lorsqu’elle jette pigments et matières sur ses grandes toiles colorées. «On l’oublie souvent, mais nous flottons finalement sur du magma en fusion. Pour moi, certains tableaux correspondent donc à la lithosphère.» «En me promenant dans un champ non loin du fameux site aztèque de Toetihuacàn, au Nord de Mexico, j’ai d’abord trouvé une pointe taillée dans une roche noire très dure, qui brillait au soleil. Puis, un peu plus loin une petite tête sculptée intacte en argile, grosse comme le poing». La main posée sur cette sculpture vieille de peut-être 3 000 ans, Danielle Chapleau a vécu une émotion artistique extraordinaire. Au fil des jours, elle s’est mise à se demander ce qu’il pourrait bien rester de notre civilisation actuelle dans de nombreux siècles, à part peut-être quelques sacs de plastique non dégradables, puisque les tours du Worl Trade Center se sont écrasées si facilement. Toutes ces réflexions l’ont conduite à plonger littéralement dans la matière en façonnant à son tour de ses mains des têtes la ramenant aux émotions primaires. Quelques mois et un stage en céramique avec la sculpteure mexicaine Maribel Portela plus tard, voilà Danielle Chapleau mère de plus de 180 têtes en argile. Des têtes dont les expressions reflètent des sentiments forts comme l’agressivité, la douleur, la tristesse, la résignation, l’abattement. Dans l’exposition, tous ces visages se retrouvent plantés au bout de piques en métal ou de poutres en bois, groupés dans des ensembles que l’artiste qualifie de céphalopodes. Au pied de cet ensemble, de grands tableaux colorés dont les empiècements de terre, d’argile, de rouille, les traces de pigments naturels ou d’oxyde de cuivre évoquent la croûte terrestre. «On l’oublie souvent, mais nous flottons finalement sur du magma en fusion, rappelle cette géographe de formation. Pour moi, les tableaux correspondent donc à la lithosphère.» L’exposition «Que restera-t-il de nous» est présentée du 8 au 17 septembre, du mardi au dimanche, de 12 h à 17 h, à la Galerie des arts visuel de l’Édifice La Fabrique 255, boulevard Charest Est. |