International
Une expérience qui fait grandir
En stage au Liban, des étudiantes de la Faculté de médecine ont vécu de près la guerre qui y faisait rage cet été
Geneviève Lalonde se souviendra toujours de son premier stage d’études en médecine. Et pour cause: ayant choisi le Liban pour y effectuer ses premiers pas de stagiaire, la jeune femme ne se doutait pas que le pays serait à feu et à sang quelques jours à peine après son arrivée à Beyrouth. Partie du Québec le 25 juin, son retour était prévu pour le 2 septembre. Mais la vie – ou plutôt la guerre - en a décidé autrement, alors que le conflit au Proche-Orient l’a forcée à écourter son séjour, à l’instar de quatre autres étudiantes de la Faculté de médecine ayant terminé leur deuxième année d’études. Avec le résultat que tout ce beau monde est revenu sain et sauf au Québec le 24 juillet, après une traversée en bateau d’une douzaine d’heures vers la Turquie et un voyage en avion tout aussi long.
«À mon arrivée à Beyrouth, le 25 juin, le nombre d’édifices en construction m’avait beaucoup étonnée, explique Geneviève Lalonde. C’était un vrai chantier. Depuis la fin de la guerre civile en 1990, une guerre qui avait duré 15 ans, la population avait espoir, paraît-il, de voir reconstruire la ville et que tout redevienne comme avant. En l’espace de quelques jours, tout s’est écroulé. Il régnait une atmosphère de désolation et on sentait une grande tristesse chez les gens.»
La suite des événements
Lors des premiers bombardements, même si elles habitaient le sécuritaire quartier chrétien de Beyrouth, Geneviève Lalonde et une autre étudiante en médecine, Katerine Charbonneau, ont dû, à la demande expresse du Bureau international de l’Université Laval, déménager en vitesse pour rejoindre les autres stagiaires en médecine qui résidaient dans le quartier de Hamra, non loin du campus de l’Université américaine de Beyrouth. «Nous n’avons jamais eu peur pour notre sécurité ou pour notre vie, confie Geneviève Lalonde. Mais quand on a entendu le bruit des détonations et qu’on a su que l’aéroport avait été bombardé, on a trouvé ça un peu inquiétant. Personne ne savait au juste quelle serait la suite des événements.»
Parmi les moments ayant marqué son séjour, Geneviève Lalonde évoque cet instant où les immenses jardins du quartier de Hamra ont été littéralement envahis par les milliers de personnes dont les maisons avaient été détruites ou les quartiers rasés. Ayant proposé leurs services aux responsables de ce camp improvisé, les étudiantes en médecine ont mis à jour des listes de médicaments et ont aidé à monter une pharmacie improvisée, notamment pour des personnes souffrant de diabète, d’hypertension ou d’asthme, ou qui se trouvaient en situation de vulnérabilité. À bord du navire qui les a menées vers la Turquie et sur lequel il n’y avait aucun autre équipement médical qu’une bonbonne d’oxygène, nos étudiantes ont aussi volé au secours de personnes en détresse, notamment en calmant une femme en proie à une grave crise de panique.
Et dire que Geneviève Lalonde avait choisi de faire un stage au Liban pour mieux comprendre le système de santé «à deux vitesses» en usage là-bas! «Je voulais également voir la manière dont les chrétiens et les musulmans pouvaient vivre en harmonie à Beyrouth» , ajoute-t-elle. J’étais évidemment loin de me douter que je côtoierais une tout autre réalité.»
De l’aide de leur université
«Dès que nous avons été informés de ce qui se passait au Liban, tout a été mis en œuvre afin que les étudiantes soient en sécurité et rapidement rapatriées, explique Catherine Bouffard-Dumais, médecin et responsable des stages en médecine pour le volet international à l’Université Laval. Nous leur téléphonions à chaque jour, de même qu’à leurs parents. Jamais, nous n’avons perdu le contact avec les filles qui ont toujours gardé leur calme, en plus de faire preuve d’une grande maturité.»
Pour les besoins de la cause, un comité spécial avait été mis sur pied. Outre Catherine Bouffard-Dumais, ce comité était formé de Myriam Leblanc, du Bureau international de l’Université et de Marie-Hélène Parizeau, professeure de philosophie et responsable du cours d’éthique en médecine à la Faculté. «Nous avons rencontré les étudiantes à leur retour pour parler de ce qu’elles avaient vécu, précise Catherine Bouffard-Dumais. Il semble bien qu’elles aient décidé de se servir du côté positif de l’expérience, ce qui ne peut que les faire grandir non seulement en tant qu’êtres humains mais aussi dans la profession qu’elles ont choisie.»
Si l’aventure des étudiantes en stage au Liban s’est bien terminée, qu’en est-il des 13 étudiants libanais nouvellement admis et des 14 déjà inscrits à l’Université Laval qui s’apprêtent à faire leur entrée le 5 septembre? Sensibles aux difficultés que peuvent vivre ces étudiants, l’Université a mis en place un plan d’intervention où la souplesse et la communication sont les mots d’ordre.
«Nous avons envoyé un courriel à chaque étudiant et nous les avons assurés de notre aide, explique Danielle Fleury, registraire de l’Université. Ceux qui prévoyaient éprouver des difficultés à venir au Canada pour entreprendre leur session d’études ont été invités à communiquer sans délai avec nous.» Si deux étudiants libanais ont répondu que tout allait bien, le Bureau du registraire demeure jusqu’à maintenant sans nouvelles des autres. De deux choses l’une, croit Danielle Fleury: ou les étudiants arriveront à la date convenue sans problèmes, ou encore certains ont d’autres priorités à traiter, après un conflit qui a fait beaucoup de morts et de blessés.
Rappelons que l’Université Laval a des ententes de partenariat avec trois universités libanaises permettant à des étudiants d’y effectuer un séjour d’une session. Il s’agit de l’Université Saint-Esprit de Kaslik (Jounieh), de l’Université Antonine (Baabda) et de l’Université Saint-Joseph (Beyrouth)
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