
Un outil fondamental de liberté et d'égalité
La Charte québécoise des
droits et libertés de la personne fête ses 30 ans
Si la Charte canadienne des droits et libertés est
devenue le symbole de l'unité canadienne pour les Canadiens,
il n'en a pas été de même pour la Charte
québécoise et l'identification des Québécois
au Québec. Selon Guy Laforest, professeur au Département
de science politique, l'obsession des Québécois
pour la quête identitaire au détriment de l'aspiration
à la liberté politique expliquerait en quelque
sorte le faible statut politique, juridique et symbolique de
la Charte québécoise.
Guy Laforest faisait partie de la douzaine de spécialistes
provenant des milieux politique, juridique et universitaire qui
ont participé au premier congrès québécois
de droit constitutionnel, le 12 mai au pavillon Alphonse-Desjardins.
Adoptée à l'unanimité par l'Assemblée
nationale le 27 juin 1975 sous le gouvernement de Robert Bourassa,
la Charte des droits et libertés de la personne du Québec
est entrée en vigueur un an après son adoption,
le 28 juin 1976, et a donc trente ans bien sonnés.
"La Charte québécoise est le fruit de plusieurs
années d'un travail politique et juridique imposant auquel
ont contribué plusieurs gouvernements successifs et nous
trouvions important de souligner cet anniversaire qui a donné
au Québec un outil fondamental permettant de défendre
les principes de liberté et d'égalité",
explique Eugénie Brouillet, vice-présidente de
l'Association québécoise de droit constitutionnel
et professeure à la Faculté de droit.
La dignité humaine
Le député du comté de Mercier à
l'Assemblée nationale, Daniel Turp, a dit souhaiter l'enrichissement
des droits économiques, sociaux et culturels déjà
présents dans la Charte et qu'y soient également
enchâssés de nouveaux droits comme le droit à
l'éducation, par exemple. De son côté, Ghislain
Otis, professeur à la Faculté de droit, se déclare
non seulement en faveur d'une reconnaissance des droits des peuples
autochtones dans la Charte mais il pense que ces droits devraient
figurer dans un document séparé. Selon lui, cette
mesure respecterait davantage les autochtones, la Charte québécoise
étant axée sur les droits individuels alors que
les autochtones mettent plutôt l'accent sur les droits
collectifs.
Après une table ronde où juristes et professeurs
de droit ont débattu de l'arrimage parfois difficile entre
la Charte et le Code civil, Christian Brunelle, professeur à
la Faculté de droit, a soulevé le problème
de la notion de dignité, ce "savon philosophique"
dans les mains de la justice. Constituant une valeur qui sous-
tend tous les droits et libertés de la personne, la dignité
est en même temps élevée au rang de droit
dans la Charte, qui consacre, à son article 4, le droit
de toute personne à la sauvegarde de sa dignité.
Le fait de faire de la dignité un droit pose donc le problème
de sa définition. La dignité est-elle un droit
ou un principe? Jusqu'à quel point telle norme porte-t-elle
atteinte à la dignité d'une personne? Un débat
à suivre.

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