Douche froide pour les nageurs La pratique intensive de la natation est associée à plusieurs problèmes de santé chez les jeunes Le sport, c'est la santé? Peut-être, mais il y a un prix à payer si on s'adonne intensivement à la natation, semble-t-il. En effet, des chercheurs de la Faculté de médecine rapportent dans le dernier numéro de Archives of Occupational and Environmental Health que les jeunes nageurs ont beaucoup plus de problèmes de santé qu'un groupe équivalent d'athlètes qui pratiquent le soccer intérieur.
Benoît Lévesque, Jean-François Duchesne, Suzanne Gingras, Robert Lavoie, Louis-Philippe Boulet, chercheurs à l'Institut national de santé publique, et leurs collègues Denis Prud'homme, Emmanuelle Bernard, et Pierre Ernst, ont interrogé 305 nageurs et de 499 joueurs de soccer de niveau primaire jusqu'à universitaire, sur les problèmes de santé qu'ils avaient éprouvés au cours de la dernière année. Près de 40 % des nageurs signalaient avoir eu des problèmes respiratoires et oculaires pendant cette période. Les problèmes des voies respiratoires supérieures (congestion nasale, irritation de la gorge) et des voies respiratoires inférieures (toux, difficultés respiratoires) étaient respectivement 3,7 fois et 1,5 fois plus courants chez les nageurs que chez les joueurs de soccer. Même scénario pour les irritations oculaires (12 fois plus courantes) et les otites externes (4 fois).
Les chercheurs attribuent ces différences à la présence de sous-produits du chlore (chloramines) - des irritants pour les voies respiratoires et les yeux - dans l'air et l'eau des piscines. "Les chloramines sont formées lorsque le chlore utilisé pour traiter l'eau réagit avec les matières organiques (sueur, saleté, cheveux, urine, bactéries) que les nageurs libèrent dans la piscine, précise Benoît Lévesque. La chloration protège les nageurs contre les maladies causées par les bactéries, les virus et les parasites, mais par contre elle cause d'autres problèmes de santé." Pour démontrer le lien entre les chloramines et les problèmes rapportés par les nageurs, les chercheurs ont mesuré la concentration de ces composés dans l'air et dans l'eau de sept piscines lors de cinq entraînements. Les irritations des voies respiratoires supérieures et des yeux étaient respectivement 2 fois et 5 fois plus courantes chez les nageurs exposés à des concentrations plus élevées de chloramines.
"La situation n'est pas dramatique, mais il faut s'en préoccuper, insiste Benoît Lévesque. Il est certain qu'il faut traiter l'eau des piscines, mais il n'est pas normal que les jeunes toussent beaucoup pendant et après un entraînement ni qu'il y ait aggravation des symptômes chez ceux qui souffrent d'asthme. Si ça se produit, il faut trouver une façon de réduire la concentration de chloramines."
Les alternatives à la chloration de l'eau sont dispendieuses et elles n'apportent pas de solution magique, prévient le chercheur. "La chloration peut être un procédé sécuritaire lorsqu'elle est bien faite et que la ventilation est adéquate. Malheureusement, il n'existe pas de normes pour les concentrations de chloramines dans l'air des piscines intérieures. C'est une lacune au Québec et ailleurs dans le monde." À défaut de mieux, le chercheur invite donc les responsables des piscines à assurer un contrôle rigoureux du taux de chlore et une ventilation adéquate des installations. "Il ne faut économiser sur le dos de la santé des personnes qui fréquentent la piscine", souligne-t-il. Quant aux nageurs, la règle est simple: moins il y aura de matières organiques dans l'eau, mieux ils s'en porteront. Tout le monde aux douches, sans exception! | |