Des appellations à contrôler
Marie-Claude Desjardins, étudiante
à la maîtrise en droit, propose un régime
juridique de certification visant à s'assurer qu'un produit
"équitable" l'est bel et bien
On sait qu'au Canada de plus en plus de consommateurs sont
prêts à débourser davantage pour acheter
un produit équitable. Les entreprises le savent aussi
et certaines, peu scrupuleuses et attirées par l'appât
du gain, pourraient bien être tentées de profiter
de la situation et d'apposer la mention "équitable"
sur un produit qui ne l'est pas. Pour contrer cette situation,
l'avocate Marie-Claude Desjardins propose la création
d'un régime juridique de certification qui donnerait au
consommateur l'assurance que le café équitable
qu'il achète à l'épicerie, par exemple,
a été produit dans des conditions respectant les
principes de ce type de commerce.
"Le commerce équitable est très peu encadré
au Canada et ne fait l'objet d'aucune restriction spécifique
quant à l'utilisation d'une appellation claire et véritable.
Dans cet esprit, il faut éviter qu'une philosophie de
commerce ne devienne qu'un simple outil de marketing", souligne
Marie-Claude Desjardins, qui a donné un exposé
sur l'encadrement juridique du commerce équitable lors
d'une journée d'étude portant sur les droits individuels
et collectifs à l'ère de la mondialisation organisée
par la Faculté de droit, le 24 mars. Terminant une maîtrise
en droit sous la direction de la professeure Sophie Lavallée,
Marie-Claude Desjardins estime que l'absence d'appellation claire
et vérifiable ne fait que créer le doute et la
confusion chez le consommateur sensible à la cause et
qui ne sait pas à quoi s'en tenir quand vient le temps
de faire un choix éclairé.
Un prix juste et stable
"Actuellement, la certification se fait sur une base
strictement volontaire et plusieurs entreprises se sont fixé
des normes maison qui, selon leur propre interprétation,
seraient conformes à l'objectif du commerce équitable,
explique Marie-Claude Desjardins. Toutefois, ces normes peuvent
varier d'un pays à l'autre et ce qui est équitable
pour l'un peut très bien ne pas l'être pour l'autre."
Mais comment définir le commerce équitable? "Avant
tout, c'est un commerce qui contribue au développement
durable en offrant de meilleures conditions aux petits producteurs
agricoles et aux travailleurs des pays en développement,
résume l'avocate. Le prix du produit équitable
s'avère juste et relativement stable. Les producteurs
participent à la gestion de la commercialisation du produit
et ont leur mot à dire sur la façon dont seront
réinvestis les profits, par exemple."
Prônant un régime juridique de certification au
niveau fédéral, de façon à ce qu'il
s'applique uniformément à travers tout le Canada,
Marie-Claude Desjardins souligne que ce régime pourrait
s'apparenter à l'appellation réservée mise
de l'avant par le Québec pour les produits biologiques.
Cependant, l'instauration d'un tel régime comporte des
risques, comme le nivellement par le bas des critères
visant à déterminer si le produit est équitable
ou non. C'est d'ailleurs ce qui s'est passé en France
quand on a essayé d'y appliquer une norme sur le commerce
équitable, révèle Marie-Claude Desjardins.
"Pour le moment, il faut miser sur la conscientisation,
dit-elle. Actuellement, les seuls produits vendus au Canada dont
on est sûr qu'ils sont équitables portent le logo
de certification Transfair Canada." Après s'être
penchée sur la façon dont l'analyse du cycle de
vie pourrait être mise à contribution dans le processus
d'élaboration et d'évaluation des réglementations
en matière de développement durable, Marie-Claude
Desjardins souhaite consacrer sa thèse de doctorat au
commerce équitable et à l'Organisation mondiale
du commerce (OMC).
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