Pavages modèles
Une étude sur le "givrage différentiel"
inspire de nouvelles normes québécoises en construction
routière
Une des normes de construction des routes présentement
en vigueur au Québec peut, sous certaines conditions climatiques,
favoriser la formation ponctuelle de givre sur la chaussée.
En effet, la profondeur à laquelle il est prescrit d'installer
la couche d'isolant de polystyrène dans l'assise des routes
n'est pas assez grande pour prévenir le givrage différentiel
de la chaussée, sauf dans les régions les plus
méridionales de la province, révèlent des
recherches menées par Jean Côté et Jean-Marie
Konrad, du Département de génie civil. L'étude
des deux chercheurs, publiée dans un récent numéro
de la revue scientifique Cold Regions Science and Technology,
a été prise en considération par le ministère
des Transports du Québec qui s'affaire à revoir
ses normes de construction routière.
Au Québec, entre 10 % et 20 % du réseau routier
est particulièrement sensible aux cycles gel-dégel
qui causent les lézardes, les crevasses, les nids de poule
et les autres mouvements de chaussée bien connus des automobilistes.
Depuis quelques décennies, les constructeurs ajoutent
une couche d'isolant en polystyrène à l'assise
des tronçons les plus problématiques des routes
pour prévenir leur détérioration précoce.
L'isolant règle ce problème, mais il en cause un
autre: à certains moments de l'année, le comportement
thermique des tronçons de route avec isolant diffère
de celui des routes conventionnelles et favorise la formation
différentielle de givre. "Un automobiliste qui roule
sur un pavage sec peut soudainement croiser des sections de plusieurs
dizaines de mètres très glissantes en raison du
givre, explique Jean Côté. Évidemment, cet
effet de surprise pose des risques pour la sécurité
des automobilistes."
À partir de tests effectués sur un site expérimental
du campus, les chercheurs Côté et Konrad ont élaboré
un modèle numérique qui permet de prédire
la période critique pendant laquelle ce phénomène
de givrage différentiel risque de se produire. Ils ont
ensuite utilisé des données climatiques régionales
pour établir la durée de cette période à
Montréal, Sherbrooke, Québec, Val-d'Or, Roberval,
Baie-Comeau, Sept-Iles et Mont-Joli. Leurs analyses montrent
que la norme unique actuelle, qui consiste à placer 450
mm de matériaux granulaires au-dessus de l'isolant, ne
s'avère suffisante pour prévenir le givrage différentiel
qu'à Montréal et à Sherbrooke. Dans les
autres villes, la période critique où le risque
de givrage différentiel est élevé survient
en novembre et en décembre et sa durée est variable;
elle va de deux semaines à Québec à quatre
semaines à Mont-Joli.
Le modèle numérique élaboré par les
deux chercheurs est relativement complexe, mais il conduit à
une solution simple: il faut augmenter l'épaisseur de
matériaux granulaires déposés sur l'isolant
dans la plupart des régions. "Plus la couche de matériaux
granulaires est épaisse, moins il y a de risques de givrage
différentiel, mais plus ça coûte cher, observe
Jean Côté. Notre modèle permet de déterminer
la profondeur idéale à laquelle l'isolant thermique
doit être placé en fonction des conditions climatiques
régionales."
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