
Rassurance vie?
Un bon counseling permet l'interprétation
adéquate du résultat non conclusif d'un test génétique
Même si le résultat peut être difficile
à accepter, un test génétique concluant
a le mérite de donner l'heure juste à une personne
qui s'interroge sur ses prédispositions génétiques
à une maladie donnée. À l'opposé,
un résultat non conclusif ne risque-t-il pas de susciter
de faux espoirs? Il semble que non, si on en juge par une étude
que des chercheurs des facultés de Pharmacie et de Médecine
ont menée auprès de 500 Québécoises
provenant de 196 familles particulièrement éprouvées
par des cancers du sein et de l'ovaire. En effet, l'appréciation
adéquate du risque de cancer semble possible lorsque la
divulgation des résultats de tests génétiques
s'inscrit dans le cadre d'un programme efficace de counseling.
Contrairement à ce que laissaient croire des observations
cliniques, les femmes qui reçoivent un résultat
non conclusif ne se sentent pas indûment rassurées
face au cancer, démontre l'équipe de recherche
dirigée par le professeur Michel Dorval.
L'étude a été menée dans le cadre
du programme INHERIT BRCA qui s'intéresse à deux
gènes de susceptibilité - BRCA1 et BRCA2 - qui
accroissent les risques de cancer. Les femmes qui sont porteuses
de mutations dans ces gènes ont un risque de cancer de
l'ovaire 10 fois plus élevé et un risque de cancer
du sein de 5 à 8 fois plus élevé que les
femmes non porteuses. Les chercheurs ont interrogé des
femmes avant qu'elles ne subissent le test de dépistage
de BRCA1 et BRCA2, et un mois après la divulgation des
résultats, afin de suivre l'évolution de leurs
perceptions du risque pendant cette période. Du counseling
génétique était offert à chaque participante
lors d'une session pré-test et lors du dévoilement
des résultats.
Les analyses des tests ont produit 105 résultats positifs
(la femme était porteuse de la mutation que l'on retrouve
dans sa famille), 140 négatifs (la femme n'était
pas porteuse de la mutation retrouvée dans sa famille)
et 255 tests non conclusifs. "Dans notre étude, un
test était déclaré non conclusif lorsque
les nombreux cas de cancers observés dans une famille
ne pouvaient être attribués aux mutations recherchées
dans les gènes BRCA1 ou BRCA2", explique Jacques
Simard, directeur du programme INHERIT BRCA. Des mutations encore
inconnues dans BRCA1 ou BRCA2, des mutations dans d'autres gènes
ou encore le hasard peuvent être en cause, ce qui rend
l'interprétation des résultats assez délicate
du côté des femmes qui reçoivent pareil verdict.
Malgré cette complexité, la perception du risque
de cancer demeurait inchangée chez les femmes qui obtenaient
un résultat non conclusif au test génétique,
démontre l'article publié par les chercheurs dans
un récent numéro de la revue Cancer, Epidemiology,
Biomarkers and Prevention. Tel qu'anticipé, un test
positif augmentait la perception du risque alors qu'un test négatif
la diminuait. Par ailleurs, peu importe le résultat du
test, la qualité de vie demeurait inchangée ou
s'améliorait pour la très grande majorité
des participantes. Seulement 8 % des femmes qui ont découvert
qu'elles étaient porteuses d'une mutation et 2 % des femmes
dont le résultat du test était non conclusif ont
connu une baisse de qualité de vie.
"Nos résultats démontrent l'importance de
bien expliquer aux femmes qu'un résultat non conclusif
n'exclut pas la possibilité que leur risque d'avoir un
cancer du sein ou des ovaires soit élevé, souligne
Michel Dorval. Nous effectuons présentement un suivi de
ce groupe de femmes afin de déterminer si elles appliquent
les recommandations qui leur ont été faites lors
des séances de counseling. Si l'intervention est efficace,
elle devrait se répercuter sur leurs comportements de
prévention et de suivi."
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