
Doisneau sous zéro
La ville de Québec et ses habitants
vus à travers la lentille de deux étudiants français
Comme la plupart des touristes du monde, Eve Vanelslande et
Edouard Nasri aiment capturer en images leurs voyages. Cependant,
à la différence de bien d'autres, ces deux étudiants
français, venus à l'Université Laval en
décembre dernier dans le cadre des échanges avec
la CRÉPUQ, soignent leurs prises de vue et fuient comme
la peste les clichés stéréotypés.
Rien d'étonnant dans ces conditions qu'ils profitent de
leur séjour en terre québécoise pour affiner
leur approche et scruter Québec d'une façon presque
ethnographique.
L'exposition d'une douzaine de photographies en noir et blanc
que le couple présente jusqu'au 28 février au Café
Chez Temporel, au 25, rue Couillard, dans le Vieux-Québec,
témoigne donc en partie de leur vision de la ville. Originaires
tous deux du Nord de la France, ces deux étudiants découvrent
avec bonheur l'hiver Québécois depuis quelques
semaines. "J'aime beaucoup cette photo d'une branche gelée
que j'ai prise à la Chute Montmorency le 31 décembre",
raconte Eve Vanelslande, étudiante à la maîtrise
en gestion internationale à la Faculté des sciences
de l'administration. "J'adore photographier le gel, la lumière
sur la neige, les stalactites qui pendent des toits des maisons."
Pour les photographes, l'hiver s'incarne aussi dans la fumée
de cette usine qu'un curieux jeu de perspective semble faire
sortir d'un des canons de la rue des Remparts.
Fréquemment, le couple prend l'autobus pour partir à
la découverte d'un quartier de Québec et surtout
de ses habitants. Initialement, d'ailleurs, ils souhaitaient
exposer des portraits de Québécois. Cependant,
en découvrant que la loi interdit de montrer des personnes
sans leur autorisation préalable, ils ont dû modifier
leur choix de photos. Restent quand même dans l'exposition
ce supporter soufflant avec enthousiasme dans sa trompette lors
d'un match du Rouge et Or ou cette mamie, foulard sur la tête
et espadrilles aux pieds, manifestement indécise devant
un rayon de produits ménagers. Des personnages en noir
et blanc, comme pouvaient l'être ceux que le photographe
Robert Doisneau capturait dans le Paris de l'après-guerre.
"Nous utilisons un appareil photo numérique réglé
sur le noir et blanc, explique Ève Vanelslande. On apprécie
cette atmosphère, les contrastes, les expressions qui
semblent plus significatives." Dans le futur, les deux étudiants
aimeraient saisir davantage de scènes sur le vif, au hasard
de leurs rencontres. Ils se promènent donc désormais
avec un carnet pour faire signer les autorisations nécessaires.
Edouard Nasri, étudiant à la maîtrise en
philosophie, s'intéresse aussi au décor urbain.
Il aime arpenter au hasard les quartiers et croquer des éléments
d'architecture bien modernes comme la structure en verre d'un
magasin de banlieue. Une image du Québec que les touristes
ne valorisent pas toujours. "C'est bien beau les caribous
et les grands espaces, mais nous avons plutôt envie de
casser les stéréotypes sur le Québec, de
montrer la vie telle que nous l'aurons vécue ici comme
étudiants pendant un an", confie Eve Vanelslande.
Le couple a d'ailleurs déjà prévu de monter
une autre exposition en France à son retour en juin prochain,
au Centre culturel de l'Université Lille 1. L'exposition
aura pour titre: "Québec: aller et retours. Regards
croisés sur la Belle Province".

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